Petite sensation dans le monde de l'hyper underground, AÄKON KËËTRËH mérite qu'on le remette gentiment à sa place. Sous ce patronyme méphitique se dissimule, on s'en serait douté, une énième Légion Noire. Ses manœuvres ont lieu en Aquitaine, le centurion n'est autre que monsieur guitares chez BELKETRE et TORGEIST. Voilà, AÄKON KËËTRËH, c'est de la guitare. Et c'est aussi de l'Ambient. Le décor est posé, tout le monde a saisi à quoi pouvait ressembler "Dans La Forêt", deuxième des trois démos accouchées par ce nouvel ignoble.

Révolutionnaire de mes deux, original de mon cul, tout ça a déjà été entendu chez BURZUM, rien de moins. Le morceau s'intitule "The Crying Orc", les pleurs désespérés d'une guitare neurasthénique. D'accord, mais est-ce mauvais pour autant ? Non. Mais je n'ai pas non plus dit que c'est franchement bon. C'est en fait assez facile et peu inspiré. Tout se joue ici sur la texture sonore. Une saturation excessive mais humaine, criant sa rage dans des hauts médiums sensibles. Et voilà pointé l'atout premier d'un disque, pardon d'une cassette, enfin d'un pack de MP3 piqués sur la mule qui sait faire du cracra en conservant une vraie clarté. Là encore, c'est facile, ni riffs, ni batterie, ni basse grondeuse ne viennent brouiller le spectre. Et bis repetita, Varg Vikernes nous a sorti la même chose en 1992, que le temps passe vite.

Alors quoi, on fout tout ça à la poubelle (postée en haut à gauche du bureau Windows), on fait tourner en boucle "The Cryinc Orc" et on meurt ? Non, restons calme, "Dans La Forêt" mérite tout de même une certaine attention. Et AÄKON KËËTRËH, aussi surestimé soit-il, n'est pas à jeter.

Et "Dans La Forêt" serait même fortement recommandable s'il faisait preuve d'une plus grande maturité. Pas de ter repetita, si BURZUM l'a défriché, le sol foulé par l'infâme KËËTRËH a depuis poussé d'une idée, la dualité des guitares. Deux "Crying Orcs" si vous voulez. Et se baladent dans une misère noire des notes aiguës accompagnées de sons plus graves joués par un instrument identique. Et c'est tout. Une première plage agrémentée d'un clavier bien inutile, une courte litanie suicidaire qu'on croirait sortie d'une démo de MÖEVÖT en plage 2 puis près de vingt minutes de ce gimmick largement acceptable.

Mais voilà, la démo s'en tient uniquement à cette adjonction d'une idée née en Norvège. Les doigts parcourent le manche des guitares un peu au hasard, se contentant de suivre des pas en mineur afin de ne pas risquer la fausse note. Dommage, on aurait tant aimé l'artiste approcher une gamme plus fleurie et voir ce qu'il aurait pu en faire. Oui voilà, il y en a qui débarquent là où on ne les attend pas, et d'autres qu'on attend de pied ferme là où ils ne débarqueront jamais. Le monde est mal fait.

Assurément dispensable, AÄKON KËËTRËH montre sur cette démo toute l'étendue de ses limites, de son manque d'ambition peut-être, de son poil dans la main. Ça fait deux fois que je le dis et je suis bien obligé de recommencer, "Dans La Forêt" fait dans le facile, AÄKON KËËTRËH fait dans le facile, les Légions Noires font souvent dans le facile. Et c'est comme ça. Et c'est un peu dommage.