Quand un groupe est bon, on l’apprécie. Quand la musique est bonne, on s’en souvient. Surtout quand celle-ci développe en nous un pouvoir de séduction inexplicable qui jaillit des enceintes et nous berce langoureusement. Bien sûr avec un EP, la base de la dithyrambe est mince. Donc point d’éloge au menu, seulement un attrait plus que poli pour la musique de BODYSNATCH.

Les Suisses sont les maîtres du groove. Un groove sale, mordant et hystérique. Ce facteur n’est pas une tare car c’est par cette hystérie que le combo marque des points. La thèse est osée, le verbe haut, BODYSNATCH conçoit de ses petites minimes quelque chose de bon, voire de très bon. Mais comme il s’agit d’un prémisse à leur ascension (ce qu'on leur souhaite) la retenue guide mes mots. Riffs très serrés, jamais en dessous de ceinture, toujours fidèles au juteux d'un groove crasse, nos petits Suisses élaborent sans retenu un répertoire culotté qui met à jour un penchant pour la libre expression. Malgré le sobriquet de « Slam Death Metal » (fièrement exposé sur son myspace) et son visuel à la « Texas Chainsaw Massacre », BODYSNATCH n’est pas DEVOURMENT. Le genre de Death qu’il pratique est celui d’un INTERNAL BLEEDING époque « Voracious Contempt ».

Petit récapitulatif :
INTERNAL BLEEDING est accrédité comme un des précurseurs du mouvement slam aux States. Mais son style reste voisin de SUFFOCATION ou DYING FETUS. Cette école du groove est connue sous le nom de NYDM. C’est entraînant, soit, et ça bouge beaucoup ! Néanmoins ce n’est pas aussi gras, ni ultra guttural que le TXDM par exemple. BODYSNATCH c’est la nouvelle génération du NYDM. La couleur de cette musique tend bien vers cette définition ; un flot de Brutal Death, une dose de free Jazz (que je nommerai « improvisation libre ») et une pincée de Hardcore (pour la forme). Voilà.

« Universe Of Gory Tales » commence très bien et finit très bien aussi. Les Suisses tricotent dur mais tricotent bien ! Le tandem Camenisch / Allig assure par rythme régulier, une série d’uppercut bien sentis. Du travail bien orchestré, comme des chefs quoi. La voix de Livio résonne comme un monologue glaireux très autoritaire, similaire à Frank Rini dans « Voracious Contempt ». Tel un général qui ordonne à sa troupe de foncer sur l’adversaire pour le réduire en poussière, et la troupe obéit. « Crypt of Gore » est généreux en chiffonnage de cordes saturées (le titre éponyme en regorge et c’est d’ailleurs succulent) qui côtoie par la magie de l’improvisation libre, une frappe acoustique et feutrée alliant les ronronnements onctueux des quatre cordes qui slap et slap encore. Et rebelote pour un rasage de très près. La lame passe à deux millimètre au-dessus du crâne. Les autres morceaux sont loin d’être timides en avoines d’obèses mal embouchés ; les montagnes russes de la double (je soupçonne une BAR cependant) couplées au frottement hystérique des six cordes savamment dosé de l’énorme « In the Chamber of Anger » donnent une pierre gigantesque à cet édifice suisse. Mention au monstrueux « Universe Of Gory Tales » (en dernière partie du disque) où la joute de riffs crades est une véritable source de jouissance.

Cet EP est donc bourré d’audace et de talent. Pas de répit (respectivement 6, 5 et 6 minutes pour les titres) et pourtant pas de fatigue auditive en vue. Avec BODYSNATCH on fait son petit rototo bien gentiment sans souci. L’énergie et la créativité tout aussi rudimentaire soit-elle, sont bien là ! Maintenant je prends ma boule de cristal et je croise les doigts pour que la révélation 2009 vienne de Suisse. L’élu tant attendu va-t-il nous sortir de la matrice ? To be continued... comme on dit.


Pour info : Les Suisses préparent leur premier album pour la rentrée. Vous pouvez être sûrs que le prochain BODYSNATCH passera par NIME !

3/5 NYDM Rules !!!