La Pologne a depuis longtemps opéré une franche percée dans le metal. Mais c’est du côté du black et du death que sont tournés tous les regards. Et au milieu, quelle place occupe le heavy ? La plus anecdotique possible, c’est évident ; il y a tellement peu de groupes à se mettre sous la dent. Alors quand surgit de nulle part un nouveau patronyme, quand il est dit que PRIVATEER pratique un heavy mélodique nourri à diverses influences, je ne peux m’empêcher de céder à la curiosité et de lui consacrer une oreille curieuse. Non que j’attende un nouveau prodige, il n’y en a guère depuis longtemps. Mais un son neuf et personnel, pourquoi pas.

Finalement, il est difficile de déceler la façon dont les origines de PRIVATEER percent dans son premier album. On pourrait lui accoler n’importe quel pays d’origine qu’on n’y verrait que du feu. Pour autant, il y a tout de même un aspect de plus en plus évident de la part des formations de l’est, c’est cette volonté de refuser les étiquettes. Là où allemands, italiens ou espagnols cousent dans leur manche des mots qui identifieront rapidement la musique pratiquée, speed mélodique ou heavy symphonique, par exemple, les cadets venus de Russie, Roumanie et à présent Pologne dévoilent un spectre plus large. PRIVATEER joue du heavy mélodique, d’accord. Parfois du speed mélodique, parfois du heavy/doom, parfois du symphonique. Aucune intention ne s’impose plus que les autres sur « Traitors ».

« A Flaming Bath » privilégie la mélodie, s’affranchit d’une rythmique tout-azimut, couche une voix pleine de charisme. On a droit à du bon heavy, avec quelques points de repère intéressants, comme ce refrain entraînant. Constat identique pour « Beholder », avec une part heavy/doom à certains endroits et une hargne bien mise en valeur. « Children Of The Dog Star » joue quant à lui la carte speed mélodique. Un registre dans lequel PRIVATEER se montre très à l’aise. Refrain tonitruant et rythmique décomplexée rendent un résultat plus qu’honnête. « Closure », fausse ballade, est là pour tisser une ambiance nostalgique plus que pour faire chavirer les cœurs. Sur un fond porté par un piano et une guitare acoustique, la voix de Marcin Maliszewski égrène une litanie touchante. « The Traitors » montre un visage fédérateur, avec ce heavy léger, sautillant, ses lignes de chant en forme d’hymne et ce refrain entraînant. « Dark Father » se la joue folklorique, avec son clavecin et ses mélodies qui fleurent l’humus des forêts. Enfin, « Monolith » fait la part belle à quelques soli très inspirés, cousus par un Tomasz Bator prolixe en la matière. Oui, vraiment, PRIVATTER mange à tous les râteliers. Pour un résultat assez dense et qui parvient à réserver quelques surprises.

Dommage que la production ne suive pas toujours. Acceptable, elle a parfois du mal à servir un metal riche d’éléments, notamment lorsque la guitare et les orchestrations cohabitent (le duel de « The Traitors »). Il s’agit là d’un point à améliorer, histoire de donner plus de crédit encore à une formation réservée aux seuls amateurs d’underground.

En tout cas, ce premier essai me semble des plus prometteurs. Si PRIVATEER n’a rien inventé, il accouche de compos accrocheuses, capables de convaincre les amateurs de heavy ou de speed mélodique. Une agréable entrée en matière. A voir si l’on aura droit à une suite.