Fermez les yeux – ouvrez les oreilles... Et laissez divaguer votre pensée.

Voyez-vous cette Terre, calme et froide dans l'obscurité, non parasitée par notre lumière artificielle ? Les bois sont silencieux. L'odeur de l'humus flotte dans l'air. Une légère brume glisse sur les champs. Le ciel est clair et la lumière de milliards d'étoiles, dont nous ne voyons même pas la moitié, nous fige de leurs grands âges. La Lune elle-même, inchangée et éternelle, vous fixe. Vous cherchez à vous reposer au milieu de cette Nature – vous aimeriez qu'elle vous accueille... Mais au fond de vous s'agite cette Humanité, capable de tant de beautés et qui pourtant, conduit invariablement cette Terre tant chérie... vers la Mort. L'humain meurt, assurément, un jour. Son souffle s'éteint et c'est comme s'il fallait que tout s'éteigne avec lui – comme s'il était impossible à l'Humain de laisser cette Maison telle qu'elle l'a vu naître. Non... Non. « La Maison brûle ». L'Humain conduit l'Humanité à la Mort et pour cela, assassine la Vie même... La « Nature » ne voudra jamais de ceux qui la tuent. Et cela vous attriste...

Voilà ce que m'évoque « Destroying Something Beautiful » de TRANCELIKE VOID. Son Black Metal est atmosphérique, éthéré, hypnotique et vraiment magique. Sur un mid-tempo linéaire, ce premier full-lenght du duo Belge est également quasi sans paroles. Etrange... Reposant. C'est un chant de Mort pour nos ruines... Sorti récemment chez De Tenebrarum Principio, jeune label italien partenaire du non moins bon et élitiste label A.T.M.F, « Destroying Something Beautiful » de TRANCELIKE VOID ressemblerait à du DRUDKH moins rapide et plongé dans un brouillard spectral. Un DRUDKH nocturne, ralenti par le froid des ténèbres tel ELISIAN BLAZE. On pourra aussi penser à BURZUM, époque « Filosofem » et « Hvis Lyset Tar Oss ». Ainsi qu'aux dernières réalisations de NEUROSIS. TRANCELIKE VOID fait partie de cette vague de plus en plus forte rassemblant des formations pratiquant un Black Metal spirituel et spectral. Ainsi la production cotonneuse, le rythme lourd et la répétition hypnotique des riffs de guitares réverbérées sont des piliers incontournables pour définir ce sous-genre de qualité à la limite du Funeral Doom Metal.

Ici l'ambiance dégagée, chargée de souffrances expurgées, ne paraît pas être de ce monde. Nous atteignons d'autres rivages. Ceux d'une mort douce. D'une mort poétique – peut-être pas héroïque, mais comme si l'auteur voulait une mort en paix, après avoir trop souffert dans sa vie de merde. Une mort semblable à un rêve, après le cauchemar. L'esprit voyage dans l'astral. Terriblement mélancolique, tragique et morbide sans tomber dans le nécrotique, « Destroying Something Beautiful » vous prend délicatement la main pour ne plus la lâcher. C'est une splendeur - mais une splendeur éteinte... Comment le dire ? Parfois, les « choses » sont plus belles mortes que vivantes, ou du moins, elles restent belles. Voilà pour moi une autre manière d'imager TRANCELIKE VOID et sa langueur cadavérique et millénaire – une musique parfaite pour les vampires d'Anne Rice. Un Black Metal qui n'en est presque plus un, un Black Metal qui vous retourne les tripes sans être le moins du monde agressif, qui vous met face à la tragédie de la vie. Et qui vous met face à cette putain de certitude que quoi que nous sachions des conséquences de nos actes, nous ne serons empêcher notre auto-destruction.

Un superbe disque de Black Metal atmosphérique qui pousse à l'introspection, voire au suicide si l'on est trop fragile. Nous ne sommes pas loin du chef-d'œuvre... N'hésitez pas à vous le procurer. « Destroying Something Beautiful » de TRANCLIKE VOID est un bi-jou ! Qui mérite amplement son 4,5/5.