Cadaver Inc, c’est l’histoire de quatre Norvégiens qui jouent un death thrash plutôt old school depuis 1988 et qui se disent un beau jour de 2000 : « eh, si on jouait un truc encore plus violent ». Exit le côté gore et grind à la Carcass, changement de logo et après une démo pour se rôder (Primal) arrive ce Discipline, survitaminé, massivement haineux et destiné à toucher un public davantage versé dans le black.

Alors pour cette sortie en dehors des voies dans lesquelles officiait jusque-là Cadaver, imaginez un duo de gratteux morts de faim qui alignent des riffs ultra-violents, soutenus par une batterie calée sur le mode « je détruis mes fûts » et un chanteur effrayant de rage (je ne vois pas bien comment on aller plus loin dans le déchainement barbare que sur « Deliverance » ou « Reptile Robots »). Déjà, ça part plutôt bien mais quand je vous dirais en plus que niveau technique ça suit méchamment (pas étonnant quand on connaît la progression du groupe) et que sur les onze titres, il n’y a pas grand-chose à jeter, je crois que vous aurez compris que les amateurs de black thrash détiennent avec ce Discipline quelque chose de sérieux à se mettre sous la dent. La comparaison avec Angelcorpse s’impose, tant au niveau des bases rythmiques que du chant, lui aussi animé d’une hargne vengeresse, qui frappe tout particulièrement. Véritable défouloir de colère rentrée (l’apocalyptique « Rupture »), Discipline envoie du très lourd et du très méchant sur chaque titre, au nom souvent réduit à un simple mot et pour une durée moyenne comprise entre 2 minutes 30 et 3 minutes.

De cette furie constante, on retient surtout la grande maîtrise de Cadaver : le groupe a de la bouteille et ne s’est pas lancé dans cette entreprise de destruction menée tambour battant en amateur. Pas d’approximation dans cette cavalcade échevelée (oui échevelée), la rage est omniprésente mais contrôlée, le groupe « dresse » sa fureur : ça cogne, souvent dur mais ça tombe pile. Par ailleurs, il y a un côté deathcore dans cette production, mais aussi quelque chose de difficilement définissable, de très « urbain ». Bien que le groupe soit norvégien on n’est pas dans l’ambiance d’une sombre forêt scandinave, en pleine tempête de neige avec un émissaire de Satan rôdant à la recherche d’une brebis égarée. Non. Cadaver signe un album qui se distingue du reste de sa discographie ou même de la tradition métallique norvégienne.

Après ce Discipline, Cadaver Inc est redevenu Cadaver, mutation de style de courte durée donc, mais riche d’enseignements et particulièrement réussie : sauvage et cru, cet album tient la dragée haute à des groupes qui s’autoproclament au summum de la violence musicale et qui sont pourtant loin de tenir la distance. Une authentique tuerie.