En scrutant la décrépitude urbaine contaminer des ruines en friche, et le fatras de béton et d’humidité, de rouille et de toiles d’araignée enchâsser l’Homme et le corrompre à n’être qu’un objet inerte parmi d’autres, la musique de "Obliviosus" qui étale les sentiments de disgrâce et de désenchantement est une évidence. Car, cet album est un ensevelissement long et prolongé par les escortes de la Mort. En effet, "Obliviosius" est un appel à l’aide, une main tendue vers cette peut-être irraisonnable demande mais aussi un chantre d’espoir d’une aide du destin.

Cet unique album de MSW est dédié au frère de Matthew Scott Williams (M.S.W, c’est bon vous l’avez ?), drogué au possible, au contact de l’ordalie et de la dépendance, en grande lutte et décimé à la fois, lui, son être mais aussi décimant son entourage ("I will never forget you/I will never forgive you"). Aveu et prière fraternel, "O Brother" est d’une sensibilité sans nom, tout comme ce titre se love dans les fanges boueuses de la colère, de l’irrépréssible douleur. Les riffs nébuleux et sludgy s’amoncellent avec des passages de lumière portés par des claviers atmosphériques et le chant féminin très beau de la chanteuse Karli McNutt.

Cette mélancolie noirâtre qui tatoue la peau de cet album est à la fois si vénéneuse et attirante. Lorsque surgit la pièce au piano "Funus", je pense à Erik Satie et à ses "Gymnopédies" notamment avec cette empreinte délicate des notes et de la frappe des touches. Très belle interlude qui nous fait respirer un peu avant une nouvelle noyade, une aimantation de nos émotions et de nos failles vers les abysses insondables. Car il y aura de la lourdeur et de la lenteur sur le titre suivant, "Humlanity", qui s’habille d’un Funeral Doom torturé et spectral à la fois. Le chant clair, les chœurs et les déchirements hurlés vont commuer vers un sentiment contemplatif.

Mais il y aura bien les vingt minutes de "Obliviosus" pour nous arraisonner sur l’autre rive du Styx là où la vie file dans le courant de son eau noirâtre à la profondeur inconnue. Un Doom Atmosphérique sludgy va s’allier avec des éléments davantage Post Metal et s’entrelacer pour nous conter musicalement non pas la déroute mais davantage l’aventure inconsciente de l’enfer de la dépendance. Sinueux au possible ce long titre possède néanmoins quelques longueurs évidentes qui brisent parfois un peu l’attention. Néanmoins, cet album est remarquable. Totalement désenchanté et terriblement poignant, "Obliviosus" est un disque à ne pas mettre entre toutes les mains car sa grande tristesse ne fera pas bon ménage si le moral de l’auditeur est déjà égratigné. MSW ne s’est pas arrêté en si mauvais chemin, un EP est sorti par la suite mais n’atteindra pas la même profondeur et hostilité que cet album fuligineux au possible.