DOEDSMAGHIRD est l’anagramme de DØDHEIMSGARD. Bon j’imagine fort bien que vous l’aviez de toute façon. Peut-être que je prémâche le taf, même s’il est plus aisé à trouver que celui qui se cache pour le mot luzerne par exemple. Brève trêve de blague inutile, plongeons donc au cœur de cette bizarrerie avant-gardiste, hybride et formant un nouveau prototype de Black Metal. Voyons, voyons, avant de partir sur une autre planète ou de l’autre côté du miroir, jetons un œil au line-up… Ah oui Vicotnik et Camille Giraudeau. Tiens mais connais pas ce Frenchie. Information prise, on vient à me conseiller son projet STAGNANT WATERS et l’album éponyme de 2012… Renseignement supplémentaire, le sieur joue en live avec DØDHEIMSGARD. Il ne tombe donc pas dans la marmite de Vicotnik par simple hasard…

À peine ai-je mis STAGNANT WATERS dans les oreilles que se dresse à l’intérieur de mon cerveau le spectre funeste d’un viol de neurones. Argh ! Ce Cyber Black Metal totalement expérimental avec ses sonorités harsh et parfois à la limite de l’exotisme, le tout ordonné par des rythmes de batterie folle et d’Électro hors de contrôle sont autant de ruptures et d’agglomérats de choses insensés à vous constricter les boyaux. Impossible d’écarter le casque le corps ne répond plus. Cette dinguerie vient de prendre possession du reste de lucidité qu’il me restait. Bon courage aux heureux cobayes qui voudront tenter l’expérience. Mais réatterrissons en terres sauvages mais au référentiel connu. Oui, car DOEDSMAGHIRD est intraduisible et son univers bigarré nous ramène aussi beaucoup à certaines sonorités de l’immense "Black Medium Current" qui s’accouplerait de manière eugéniste à d’autres forces en présence dans le "666 International" de 1999 et l’EP "Satanic Art" de 1998.

Voilà vous êtes prévenus. "Omniverse Consciousness" est un album expérimental non pas déjanté mais finement construit qui ouvre une troisième voie. Le duo a réussi à joindre ses compétences techniques pour magnifier l’ombre omnipotente du "Black Medium Current" sans tenter de la déconstruire car les clins d’œil ou les ressemblances de certaines sonorités sont parfois flagrantes jusque parfois dans l’intitulé des titres. Citons par exemple le dernier titre "Requiem Transens", n’y voyez-vous pas une main tendue au "Requiem Aeternum" de "Black Medium Current" (= BMC) ? Entendez-vous le "Endeavour" convoler vers le titre "Voyager" ? Ou bien encore au sein de "Endless Distance", ne retrouvez-vous pas les sonorités électroniques du "Journey To The End" de WINDIR présentes aussi sur le "Abyss Perihelion Transit" de BMC ?

Tout ça pour vous dire que malgré la complexité et l’approche pas si aisée, de but en blanc, du disque, il comporte des moments extatiques. Quelle belle chose que ce "Death Of Time" bordel ! C’est pour ce genre de titres que je vénère sieur Vicotnik. Entre crapulerie et "descente émotionnelle mélancolique… J’aime le décalage d’agressivité et de sournoiserie de "Min Tid Er Omme" avec ces mélodies Électro planantes, robotiques ou à la Atari, à vous tailler en pièces tout en vous souriant innocemment. Diantre, parbleu que ce titre est dingue aussi... "Sparker Inn En Åpen Dør" et "Then, To Darkness Return" me font associer à du ABIGOR new-school mais taillé menu pour les besoins enfantins ou paternaliste de DOEDSMAGHIRD. Ça blaste, ça dissone dans tous les sens en tissant une toile vénéneuse à vous dissoudre le corps. Mais pourquoi fallait-il penser que Vicotnik allait s’arrêter aux seules expérimentations de BMC ? Quel diable a-t-il encore avaler ?

Disque furieux, furibard même, aux expériences interdites mais abouties, "Omniverse Consciousness" est un monstre à la tête tranchée qui n’en finira pas de hurler dans vos petites plaines pacifiques. Cette œuvre singulière vous hantera jusque dans vos chiottes, du moins jusqu’à ce que vous consentiez à vous transformer. Démarrez par le commencement, les beats de "Heart Of Hell" vous attendent sourire sardonique aux lèvres. La main et le couteau, le clavier et les spectres, la fureur et le consentement, le martèlement et l’écrabouillage s’invitent à votre dernière partie. Osez avancer en ouvrant les yeux avec DOEDSMAGHIRD… Pour mieux fantasmer.