Les supergroupes chez Frontiers, on en bouffe, et souvent le constat est le même : des morceaux souvent déjà bien prémâchés par les nègres de studio de la boîte, fignolés par de grands noms au savoir-faire indéniable qui n'ont qu'à laisser parler leur talent sans trop forcer. Parfois ça fonctionne, j'en retiens quelques-uns, comme SWEET/LYNCH, le premier REVOLUTION SAINTS et surtout BLACK SWAN où la réunion de Reb Beach, le trop rare Robin McAuley, Matt Starr et Jeff Pilson fait des étincelles.

Ce dernier quartette, qui sans se positionner comme un successeur par défaut de DOKKEN (dont deux des membres ont fait partie) a proposé deux albums excellement bien fichus fait figure de proue pour l'écurie italienne, qui nous habitue à des albums au savoir-faire indéniable, mais dont l'esprit de groupe manque cruellement, ne créant aucune filiation avec l'auditeur qui doit déjà être satisfait d'avoir pas mal de vieilles gloires réunies ensemble et dont la seule carrière suffit comme carte de visite.

ICONIC tape aussi fort sur le papier, se posant cette fois-ci dans le sillage de WHITESNAKE, avec trois de ses membres ou anciens membres. Mais attendez, il n'y avait pas déjà une formation qui avait pris le relais artistiquement il y a cinq ans de ça ? Bonne mémoire, Heavy Metal maniacs ! Ça s'appelle INGLORIOUS, et son chanteur, Nathan James, est un tueur, peut-être la seule relève crédible de Jørn Lande (oui je sais il y a aussi Dino Jelusić, mais comme il chante exactement comme le colosse norvégien, il n'a généré pour l'instant que peu d'intérêt chez moi). Et Nathan James se retrouve au sein d'un quintette grand luxe pour mettre son organe le plus en valeur possible. Pensez donc, avec Joel Hoekstra (WHITESNAKE) et Michael Sweet (STRYPER) aux guitares, une section rythmique explosive constituée de Marco Mendoza et Tommy Aldridge (tous deux WHITESNAKE ou ex WHITESNAKE), le tout fignolé par les claviers, la co-écriture et la production d'Alessandro Del Vecchio (partagée avec Michael Sweet, qui ne se gêne pas pour donner de la voix lui aussi – c'eut été fort dommage de la part de la voix de STRYPER), reconnaissez qu'on a connu plus complexe comme terreau pour faire germer un talent déjà bien affirmé.

Et "Second Skin", le fruit de ce travail majoritairement fourni par le triumvirat Del Vecchio/Sweet/Hoekstra, semble au premier abord largement à la hauteur des espérances que ce line-up de rêve peut susciter. Après une première mise en jambes permettant de retrouver un Nathan James ultra performant, mon coup de cœur tient dans la pièce-titre, celui sur lequel tout le monde lâche les chevaux (cette grosse caisse de Tommy Aldridge), avec son tempo échevelé, et ses lignes de chant qui transpirent l'écriture de Michael Sweet, qui forme un duo implacable avec Nathan James, comme si David Coverdale et Glenn Hughes avaient tous les deux accouché d'un rejeton encore plus doué que leur père. "All I Need" réussit haut la main l'écriture du mid-tempo plus bluesy (Nathan James a participé à son écriture, ça doit jouer).

Si on s'était baladé dans le haut du panier après une ouverture de quatre titres aussi forts, on aurait tenu un des meilleurs albums de Hard Rock que j'ai écouté depuis un bail. Il manquait le titre qui swingue un peu plus, et on l'a avec "Nowhere To Run" ou le final "Enough Of Your Love", hélas mal servi en fin d'album, et une série de mid-tempi absolument interchangeables, bien joués mais insignifiants. Et si on ne passe pas vraiment de mauvais moment, on commence à trouver le temps long. Passé "Worlds Apart" dont on se dit qu'elle est bien mignonne mais que ça passe, on n'est pas assez rattrapé par le groove de "All About", et après c'est pire. Si bien que… Non, rien n'égale encore BLACK SWAN chez Frontiers et surtout son deuxième album sorti deux mois plus tôt. Néanmoins ne manquez pas ce quarté inaugural qui a moyen de vous mettre une bonne tape derrière les oreilles, et en particulier "Second Skin". Boudiou que j'aurais aimé que tout l'album soit de cette trempe ! La bonne nouvelle, c'est que le prochain STRYPER s'annonce sous les meilleurs auspices.