Tout est question de ressenti dans la musique, n'est-ce pas ? Peu importe ce qu'on écoute, l'important est l'effet que les notes provoquent comme réflexes primaires et ensuite, dans notre for intérieur au fur et à mesure que les œuvres nous habitent.

GRIMA, comme plusieurs groupes de Black Atmo forestiers, m'a rapidement happé avec ses compositions plus grandes que natures, mélodiques et profondes, épiques et poétiques. Ce duo russe possède tous les atouts pour jouer les cadors dans son style, car il maîtrise autant la virtuosité que la combativité, les deux éléments qui ressortent illico d'un Black Atmo organique, éthéré et organique qui se respecte. "Will Of The Primordial" est son troisième skeud, après un très remarqué "Tales Of The Enchanted Woods", dont la thématique nordique n'était pas aussi aboutie en 2017.

Deux ans plus tard, les jumeaux Morbius et Vilhelm remettent le couvert avec leurs collaborateurs (basse, batterie, synthé et ce superbe accordéon ajoutant une couche Folk qui fond comme du beurre sur les épinards) afin de pousser les rudes hivers russes sur le devant de la scène. Inutile de préciser que l'objectif est réussi haut-la-main et à un niveau que j'avais rarement entendu pour un Black tourbeux comme ça, un chouïa immersif, mais pas trop hypnotisant ou occulte de chez occulte.

GRIMA nous fait planer les deux yeux ouverts, gratte comme un chef, gueule comme un loup et peint de jolies aquarelles enneigées qui restent dans la tête et le cœur. De plus, la tracklist n'est pas intimidante, les morceaux s'emboîtent bien, alors le processus de réécoute de ces huit pièces – dont deux instrus – est une sinécure. Ce Metal Extrême tombe sur nous comme des flocons et nous permet d'avancer, galvanisé et heureux.

Si GRIMA n'arrive pas à vous chambouler avec le magnifique trio de départ "Siberian Sorrow" – "The Shrouded In Darkness" et "Leshiy", n'allez pas plus loin. Les autres, ne tardez pas à poursuivre votre route, les Russes sont prêts à enfoncer le clou jusqu'à la dernière minute. Et ils le font avec tempérance, sans abuser des archétypes, en se collant à leur concept et en exploitant leurs affinités naturelles de jumeaux inspirés.

La seconde moitié du skeud est sans doute un poil en-deçà de la première, mais si vous avez bien embarqué dans le bain, vous ne voudrez pas le quitter sans avoir goûté chaque goutte de ce Black frigorifique, mais si chaleureux à la fois. "The Shrouded In Darkness" et "Blizzard" représentent bien cette dualité que GRIMA instaure habilement. Si cela contribue à abaisser le niveau de violence de l'orchestre, le degré d'émotions s'en retrouve rehaussé pour notre énorme plaisir.

"Will Of The Primordial" s'avère ainsi un album plutôt personnel dans le genre, imparfait, mais situé dans le haut du panier. Il jouit d'un bon équilibre, rend hommage à son sujet avec perspicacité et humanité et contentera la majorité des accros de technicité. Ses teintes Folk viennent poser le point d'exclamation idéal sur cet ensemble fort pertinent, notamment à la fin de "Howl At Night".

GRIMA, même après trois albums seulement, est déjà une valeur sûre. Il évolue vite et comme ses homologues doués, a compris qu'en cette époque moderne impitoyable, il n'y a pas une heure à perdre.

Quelle carrière incroyable qui s'annonce !

Podium : (or) "The Shrouded In Darkness", (argent) "Leshiy", (bronze) "Blizzard".

Indice de violence : 2,5/5.