"Attende" n'avait pas entièrement convaincu les fans chauvins de WINDIR, bien que leurs contemporains de MISTUR aient accompli un petit miracle pour un premier album, un hommage à peine déguisé à la légende norvégienne du Viking Metal. J'étais dans le camp des enthousiastes, car "Attende" évoquait non seulement la grandeur mélodique et guerroyeuse de WINDIR, mais il défrichait un petit sentier dans le Black Atmo/Mélo inspiré des affres de leurs ancêtres. Un petit bijou dont je ne me lasse pas.

Il aura fallu attendre près de sept ans avant de pouvoir confirmer nos doutes ou nos certitudes envers ce groupe surprise venu de nulle part, à part de Norvège, bien sûr… Un son comme ça, ça n'émane pas de l'hémisphère sud, loin s'en faut. SIGTYR, VREID, KAMPFAR, DRAUGNIM et, par extension, la nouvelle vedette du Black Pagan WINTERFYLLETH, ont cultivé leurs terres nordiques pour en récolter l'usufruit dont nous sommes témoins. MISTUR est sorti du même cocon frigide et s'est envolé sous un lyrisme viril et vindicatif.

"In Memoriam"a été conçu par le même noyau qu'"Attende", première bonne nouvelle ! Les frères (ou cousins ?) Bakketeig aux commandes, en compagnie d'Andre Raunehaug, le vaisseau MISTUR fend les flots rageurs de la mer du Nord avec un peu plus d'aplomb qu'en 2009. Les guitares sont toujours pesantes et ultra mélodiques, alors que le synthé est un peu moins vintage que sur "Attende", ce qui peut être une lame de fond à deux tranchants. C'est pour moi une perte, car le côté rêveur et enneigé d'"Attente" est ici tronqué, remplacé par une ferveur offensive résolument moderne et plus carrée. Sans oublier le piano, qui est lui aussi passé presque complètement à la trappe, dispersant quelques bribes poétiques dans les steppes.

Donc, plus d'aplomb, mais moins de charme.

Ce constat est d'autant plus frappant quand on réécoute "Attende" après "In Memoriam", dont les morceaux, certes musclés, ne se rapprochent pas des élans homériques de son prédécesseur. Cette cuvée 2016 se noie dans l'océan d'albums sortis par des groupes connexes au cours des sept dernières années. Mauvais timing dirons-nous… Seule "Tears Of Remembrance" semble tirée d'un proche passé et aurait pu figurer sur la tracklist du grand frère.

Mais bon, tout n'est pas perdu quand on a des musiciens talentueux en jeu. Les mélodies tournoyantes, les solos et le riffing bien affûté des Norvégiens viendront sauver la mise, bouchant de nombreux trous créés par un synthé convenu, qui a oublié la place prépondérante qu'il occupait jadis. Les incontournables chœurs de MISTUR contribuent aussi à coller le glaive dans la paume et les blastbeats nous rapprochent constamment du champ de bataille. Quand les combats se termineront, on se souviendra d'une galette martiale, dont les quelques épanchements affectifs nous permettent de croire qu'il y aura un lendemain ensoleillé.

Bien en-deçà d'"Attente" à mon goût, mais tout de même solidement construit, "In Memoriam" est victime du temps et du syndrome du premier album exemplaire dont il est ardu de s'approcher. Une bonne manière toutefois d'alterner entre vos vieux albums de WINDIR et ceux de vos groupes du genre favoris.

MISTUR est une flèche efficace à glisser dans votre carquois, car vous ne manquerez pas souvent la cible avec.

Note : 3,5/5 arrondi au supérieur parce qu'on est en présence d'un futur leader de la scène norvégienne… s'il pouvait sortir les albums dans un délai raisonnable !

Podium : (or) "Tears Of Remembrance", (argent) "Firstborn Son", (bronze) "Distant Peaks".