On peut avoir deux attitudes différentes quand on se retrouve soudainement confronté à un groupe comme TYRANT. Deux types de personnes se distinguent : les amateurs de kitsch, et les autres. Et cet élément, qui semble anodin, prend finalement une ampleur largement supérieure quand on sait que le groupe nous vient du Japon, sachant les sommets que sont capables d'atteindre les plus créatifs d'entre eux.
Oui, en fait on se retrouve presque avec des musiques de Disney remises à la sauce Metal : pardon mais pour une partie de "Fallen Angel Of Plague" c'est limite si on n'a pas la chanson de Merlin ou du Bossu de Notre-Dame en corpse paint sous nos yeux.

Mais comment est-on arrivés à cela, alors que sur le premier album, "Under The Dark Mystic Sky", on avait encore une belle part Black avec des synthés plus discrets, bien qu'on mise déjà sur la mélodie à outrance ? Les rôles ont beau s'inverser, et la partie sympho a beau prendre le pas sur l'agressivité des riffs, on garde toujours les mêmes structures et des compositions assez similaires. "Grimoires" est simplement plus rythmé, moins noir, et redonne un nouveau souffle à ses titres en appuyant là où ça fait mal. C'est à dire que TYRANT repousse tout du côté de la technique, des ambiances macabres à coups d'instruments de musique de chambre comme les Japonais savent si bien le faire. Le rendu a un aspect finalement très Burtonien, avec ces envolées de piano, ces déclamations diaboliques et ces placements d'orgue qui s'immiscent un peu partout.
La production quasiment parfaite sied du mieux qu'elle peut à cette nouvelle volonté du groupe. Cependant les instruments tels que le violon, ont un grain très synthétique et peu naturel, et a tendance à casser l'image qu'on se fait d'un petit orchestre maudit qui nous jouerait sa symphonie funèbre.

On remarque tout de suite que TYRANT prend racine sur des écoutes prolongées de CRADLE OF FILTH et affiliés (style fin 90s, début 2000)... Mais imaginez qu'on en enlève tous les éléments les plus négatifs (le chant de Dani Filth, le côté "regardez je pleure des larmes de sang et je chante dans le brouillard du cimetière de mon village"). Reste l'aura noire romantique, les riffs pompés sur du Heavy en plongeant le tout dans une grande cuve estampillée Black Metal. On ajoute une bonne dose de kitsch et on y est.

Je cite peu de titres, tout simplement car ils adoptent tous la même position, en mélangeant un peu l'ordre d'arrivée de chaque instrument et les différents breaks. Chaque titre se compose d'éléments sans défauts, agréables pour leur technique, cette superposition d'instruments qui vont dans tous les sens, et cette atmosphère sinistre et théâtrale à la GLOOMY GRIM en parallèle des riffs plutôt punchy. L'anomalie est qu'on se retrouve finalement vite ennuyés par l'enchaînement de ceux-ci. L'album, qui dure plus d'une heure, tourne assez rapidement en rond bien que quelques passages réussissent à sortir du lot. Malheureusement, c'est plus souvent pour leur côté kitsch extrême qui prête à sourire que pour un riff novateur ou un passage orchestral impressionnant.

Malgré cela, je verrais mal quelqu'un dire que cet album est mauvais, à travers toutes les mélodies et leur juste dose par ci et par là, il y a un véritable effort de réalisé. Même sans apprécier le côté extravagant et grandiloquent de la composition, il faut savoir avouer qu'il y a de la diversité, et de la réflexion au sein de chaque morceau. Néanmoins, crier au génie serait également exagéré. Il faut écouter TYRANT comme on écoute un groupe ultra trve où les musiciens se prennent pour des envoyés de Satan ou d'Odin, ce côté fantaisiste et fanatique qui donne une aura presque crédible à certains, dont on ne sait plus où la limite de la réalité se pose.

Morceaux préférés : "Devil’s Pact", "Prophecy Of Lucifer", "Bell, Book And Candle"

Note réelle : 3,5.