Death Metal, Norvège.
En lisant ça vous vous dites "bouarf, le Death en Scandinavie, voilà quoi, là bas y a que ça, aucune originalité là-dedans...". Et vous avez raison. Entre le demi-million de groupes de Death Suédois et la scène Finlandaise, y'a de quoi faire. Par contre la Norvège, y a du Black partout, mais niveau Death c'est une autre paire de manches. Pour les trucs mélo, progressifs, d'accord. Par contre le pur Death qui tâche, à part BLOOD RED THRONE je vois pas trop. Surprenant hein ?
Du coup, AMONG GODS c'est un nouveau groupe formé de membres officiant dans l'underground pas forcément récent (premières armes des membres chez des groupes que je ne connais pas comme VIDR, VINTEBRIS ou SYRACH - oui moi aussi j'ai pensé à notre illustre ancien président, n'ayez pas honte) et c'est norvégien. Fin de l'introduction.

Et donc cet album éponyme, daté au carbone 14 de 2011, était disponible en téléchargement un bon moment avant d'être récupéré par PRC Music qui en a fait une véritable sortie physique avec une vraie pochette en avril 2013. Et ma foi, c'est plutôt une bonne pioche pour le label tellement ces mecs affichent un gros potentiel, leur expérience dans le milieu se faisant sentir d'office.
AMONG GODS officie dans une sorte de Death Metal old School, avec un son de guitare bien gras et grésillant comme on l'aime, mais qui adore partir dans des mélodies étranges, tordues, avec un gros aspect Progressif. Même si j'avoue que 6 titres au compteur pour une grosse trentaine de minutes, ça reste peu.
Déjà pour parler d'office du truc qui fâche un peu : la production. Oh rien de grave, c'est puissant, super clair, bref du travail de haute précision. Mais ça manque de tripes, les guitares sont un peu trop aiguës et donc n'écrasent jamais véritablement la tronche (et pourtant du riff qui cogne dur, y en a et pas à moitié !) et surtout semble totalement désincarné. Assez dommage vu que ça fait un tort à la musique derrière, qui dispose de suffisamment de relief pour exiger une production en étant davantage dotée...

Parce que même si AMONG GODS vient de Scandinavie et est doté d'un son en conséquent, pas mal d'influences sont à piocher outre-Atlantique. On a certes des gros riffs écrasants qui tombent sur la gueule en mode bon gros Swedeath ENTOMBED-power ("The City Of The Dead") mais c'est surtout par un côté assez atypique, rappelant parfois SUPURATION, que le groupe se démarque (le morceau "Martyr" pourrait presque faire partie de la trilogie cubique pour tout vous dire !). Parce que même si le son est foncièrement Death, que ça cogne fort mais jamais trop non plus (disons qu'on accélère jusqu'au mid-tempo supérieur) et que les vocaux sont bien arrachés dans une veine typique Death/Thrash, riffiquement ça reste assez éloigné des clichés du genre, préférant élaborer le tout et prendre la direction d'une musique froide et à l'ambiance soignée, feutrée. Rien que le break acoustique du titre d'ouverture, faisant très Post-trucs (le riff sur la reprise est d'ailleurs à la limite du Sludge atmosphérique, et précède un surprenant passage à l'ambiance Black dont on retrouvera des traces sur "Martyr") et tout ça fonctionne particulièrement bien, montrant un talent de composition certain.

Et c'est donc en entremêlant ces influences dans une sorte de Post-Atmo-Death quand même bien plus Death que quoi que ce soit d'autre que AMONG GODS tire son épingle du jeu. Le résultat, à défaut d'être déroutant, est bien prenant et nous permet de nous mettre sous la dent des morceaux épiques et puissants, admirablement bien fichus comme ce "Apocalypse" qui ouvre les hostilités de manière efficace et assez énervée, et surtout le morceau-phare, les 7 min de "Crucifixion" qui réussit à lancer des passages totalement hypnotiques et ritualisants au milieu de torrents de lave guitaristique, changeant un peu l'atmosphère de l'album pour quelque chose de brûlant et martial, complètement irréprochable, modèle du genre. Mais à côté, c'est le rendu global qui casse un peu tout. On se dit assez souvent "putain ça bute, ce passage là woaw, hey mais en fait yeah !" mais l'album finit par se montrer répétitif, les riffs étant toujours trop basiques, monolithiques malgré un tempo évolutif. Il manque une véritable touche viscérale, la furie, quelque chose qui montrerait que tout ça, ça vient des tripes, parce que le rendu est franchement clinique et semble trop sage et posé au vu de l'énorme potentiel et des qualités de composition... En gros, histoire d'évoquer quelque chose, AMONG GODS c'est la version light de ULCERATE avec un son qui Swedishe gentiment.

Le constat est donc mitigé. Pas que ce soit mauvais, pas que l'album soit inégal, c'est juste mitigé dans mon cerveau. La musique de AMONG GODS est bourrée de qualités, a tout pour plaire, que ce soit le grain de guitare abyssal et bien nordique comme il faut, des compositions audacieuses brassant pas mal d'influences détachées du Death pur et dur, bref, ultra robuste. Mais il manque un truc. La folie, la spontanéité, un petit éclair de furie, genre montrer que c'est du Death, du vrai, débrider un peu tout ça et casser la baraque parce que se prendre le chou sur ses riffs alternatifs qui Sludgent vite fait dans la Poste, ça va un peu.
Mais vous serez nombreux à pas être d'accord avec moi. Alors foncez sur cette œuvre solide, massive, portant admirablement bien son nom et sa pochette que je trouve sobrement magnifique.

Allah Akbar : un bon gros opus solide, pas commun mais trop froid et sage pour faire de l'effet à ceux qui cherchent du vrai Death viscéral...