Quand on ressuscite aujourd’hui les démos de NECROBUTCHER, groupe de Blacko-grindcore brésilien de la fin des années 80, il ne faut certainement pas voir dans cet acte un hommage au groupe et encore moins à sa musique. Car ce n’est en effet pas pour leur qualité artistique mais bien au nom du kvlt que l’on arrache aujourd’hui des pléiades de groupes obscurs d’un anonymat mérité. Le "Kvlt" est un phénomène étrange, pas très clair et propre au milieu du Metal Extrême et qui lui vaudra d’ailleurs bien des railleries de la part des autres cercles metalliques. Si cette tendance caricaturale à respecter, à adorer et à diviniser des groupes aussi inconnus que dégueulasses en fait rire plus d’un, elle n’est certainement pas innocente (et très loin de descendre simplement de la bêtise) et fait figure de véritable phénomène dans le monde du Metal, méritant donc qu’on lui accorde un œil attentif.

Les kvlteux aimeraient bien nous faire croire que le kvlt est aussi vieux que le monde et que leur vénération serait du même ordre que celle des satanistes de toutes les époques. Il ne faut pourtant pas remonter plus loin que la fin du siècle dernier pour percevoir les malaises et les conditions propices à l’émergence de cette nouvelle valeur bizarre dans le Metal Extrême (dont le credo est : "si tu es vieux, si tu pues et que personne ne te connaît, tu es forcément génial !"). Ainsi après deux vagues de créativité dantesque (l’effervescence des années 80 et le début des années 90, de "Bathory" à "Filosofem", à quelques démos près), le Black de fin de siècle, tourné vers les canons du genre, ne parvient plus ou très difficilement à se détacher des conventions, des idéologies et des sonorités propres à leurs aînés. Le Black se traîne, s’embourbe et, incapable de s’extrêmiser plus il décide de remuer ses entrailles plutôt que de prendre un nouvel envol.

Sans en être un point de départ rigoureux, un groupe comme WATAIN, en choisissant de s’appeler WATAIN, est la face la plus visible de l’élan patrimonial qui infeste doucement le Black Metal à ce moment là. Car le nom du groupe suédois revendique une parenté directe à VON, l'entité kvlt par excellence. Inconnu et poisseux, ce trio américain éphémère, lors de son exhumation officielle en 2003, fut placé à coté de MAYHEM, DARKTHRONE et compagnie sur l’autel des Dieux du Black, ce qui provoqua colère et fascination, respectivement chez les anciens et les nouveaux puristes. Commença alors une longue campagne (qui s’est étendue aujourd’hui à tous les genres, mais c’est le Black qui a été le premier a honorer ses dieux secrets) de "muséification" de nouvelles idoles fraîchement arrachées au cimetière des malchanceux de l’histoire. Ainsi chaque grand mouvement extrême a eu sa part de repêchage arbitraire, et c’est du fin fion du Black/Death brésilien de la fin des années 80 que NECROBUTCHER refait surface.

Il arrive que certains groupes soient à la hauteur de leur niveau de Kvlt. L’aura obscur et la force musicale se combine alors divinement et la notion de trésor oublié prend alors tout son sens. NECROBUTCHER, manifestement, n’est pas de ceux-là. Cette compilation désastreuse de deux démos et de quelques lives nous laissent percevoir un groupe adolescent dénué de toutes formes de talents. Ce rejeton maigrelet de SARCOFAGO opère dans un Black/Grind si mal produit et interprété qu’il tombe involontairement dans la Noise moisie. Ne dépassant jamais les 2 minutes, les titres de "Schizophrenic Noisy Torment" sont interchangeables et tous aussi mauvais les uns par rapport aux autres. Supplice pour oreilles non averties, cette galette n’est à conseiller qu’aux amateurs de bouillies informes et sous-produites.

On peut difficilement en vouloir au groupe, qui n’est qu’un projet d’ados fans de SARCOFAGO qui, en 89, s’amusèrent un peu en grindant dans le garage à tata. C’est plutôt tous ces labels nécromanciens qu’il faudrait gronder et leur inculquer une bonne fois pour toutes que certains groupes ne sont pas oubliés et obscurs pour rien…
Bref tout ça pour dire que NECROBUTCHER, ça shlingue comme une lunch box oubliée dans un casier d’école pendant toutes les vacances d'été et que, aussi cool soit la photo en cover, il faut impérativement ranger ce piètre duo trio dans le placard puant des "mauvais groupes kvlt". Et c’est un mec qui a un backpatch de VON qui vous le dit !