cette après-midi, un trend m'a dit : 'ANATO, c'est kikoolol et ça pue du derrière'.
la réponse de votre serviteur :
massif, imposant, monolithique. un empilement mégalomaniaque de couches mélodiques à provoquer l'indigestion, des structures alambiquées aux tiroirs inépuisables, un labyrinthe de découvertes et d'étonnements incessants (pas une piste qui n'ait pas ses multiples bridges, ses pré-refrains - même parmi les plus accessibles : "battlefields"...), des mélodies entêtantes ("battlefields", "soulforged") ravalant "bards song" et "past in future secret" au rang d'amusettes pour nouveau né, des refrains hors-normes qui s'incrustent dans votre pauvre cerveau malade jusqu'à provoquer en vous une envie de courir à poil dans la forêt de Brocéliande en hurlant 'saaaaaaadly sings deeeeeeestiiiiiinyyyy'.
le plus ambitieux, le plus complet, le plus abouti des albums de BG.
Et cette voix, enfin complètement maîtrisée, si loin de Donald Duck ("Tales from a twilight world"), du chien qui mord ("Imaginations from..") ou de l'asthmatique en manque de ventoline ("Nightfall..") ; une puissance contrôlée, appuyant chaque chanson de ses accents éthérés et pourtant si épais dans l'âme. seule, ou doublée (voire triplée/quadruplée/etc.. - nous sommes là dans l'album de tous les excès pour Hansi), chaque mélodie vocale semble avoir été travaillée sans relâchement des mois durant.
La section rythmique n'est bien sûr pas en reste, Stauch martelant ses fûts comme jamais, pieuvre boulimique et incontrôlable, tambours de guerre au service de ce monument musical.
(seul point noir : un bassiste - oliver holzwarth - sans caractère, pour ne pas dire une quiche ultime ; mais peut-être à sa défense que finalement, la basse n'était dans ce schéma machiavélique qu'une couche supplémentaire, reléguée au second plan depuis l'abandon de Hansi du poste de bassiste.).
Parfaitement organisé également, après les in yer face 'under the ice'/'sadly sings..', 'maiden n minstrel..' s'impose de soi-même, calme et reposante ; mais là encore, la surprise est de taille, devant cet emballement final de couleurs et de cris, cette fête moyen-âgeuse finissant en tragédie shakespearienne :
Yesterday's memories and melodies
Are gone with the wind, so sad
Snow-white her hands and golden her hair
But she's not the one
Car de surprises, cet album regorge ; du refrain imprévisible de 'age of false innocence' au délire folklorique planté en fin du gargantuesque 'in then there was silence' (la meilleure de BG, et pour longtemps je pense, notamment vu la baisse de qualité du dernier), c'est un sans faute auquel nous assistons.
Car c'est ça, 'a night..' : un album qu'on se dit dès le départ voué à l'échec, aux redondances, victime de sa boulimie inexorable, et pour lequel, au fil de l'écoute, on éprouve une attirance sans nom, dans lequel on se noie avec délectation ;
une épopée à travers des plages musicales démentielles, folles, à l'image de la Symphonie Fantastique de Berlioz, à l'image de cette pochette aux couleurs rougeoyantes d'un orchestre monstrueux et débile, un voyage d'où bien sûr on ne ressortira pas indemne.
BG a écrit une page de l'histoire du Metal, avec une majuscule. ils ont su compiler leur génie de la mélodie (dont ils n'avaient plus à faire preuve) à une puissance hors du commun (dont la majorité de leurs albums, hormis le génialissime 'imaginations..', manquait souvent cruellement, peur de retomber dans leurs travers thrash du début sans doute).
Un seul regret ? oui, que la tragique 'harvest of sorrow' ne figure pas sur cet opus.
Ouvrez vous les oreilles les enfants et délectez-vous de la pierre angulaire la plus massive du spimelo de ces 10 dernières années.