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2008 Nahvalr

NAHVALR - Nahvalr (2008)
Par ENLIL le 19 Septembre 2011          Consultée 2707 fois

NAHVALR est le side-projet de deux Amerloques : Dan Barrett et Tim Macuga. Membres du label Ennemies List Recordings et têtes pensantes d’HAVE A NICE LIFE, ces derniers accolent en toute connaissance de cause l’étiquette « Black Metal » à cet enregistrement. Sur le papier, quelques appréhensions : si HAVE A NICE LIFE sur "Deathconsciousness" proposait un rock indie au carrefour de la new wave et du shoegaze, production remarquable mais un peu trop « arty-wannabe-conceptual-prout » à mon goût, alors de quoi pourrait être fait l’éponyme de NAHLVAR ? J’ai imaginé un énième machin de Post-Black inoffensif, pseudo-prog’ ou pseudo-psychédélique, surproduit et faisant peu de cas de la notion de « terrorisme sonore » ; j’ai préjugé de tout un tas d’horreurs répugnantes, de LITURGY à KRALLICE en passant par NACHTMYSTIUM ou AMESOEURS et affiliés.

Puis j’ai écouté ce formidable et indescriptible bordel.

Dire que je me suis planté serait un doux euphémisme.

J’ai dit que NAHVALR était le projet de deux individus. En fait, on se tromperait si, par « projet », on imaginait deux auteurs-compositeurs créant du tout au tout leur œuvre. Si originalité il y a, c’est en grande partie au regard d’un processus de composition peu commun que NAHVALR pourrait être, en toute honnêteté, qualifié d’« innovant ». Laissons ici la parole aux concernés :

« Nahvalr is Open-Source Black Metal. What does that mean ? It means using the internet, using the solitude and separation caused by home recording and digital distribution, to bring together sounds, songs, and lyrics from dozens of artists, each working in complete ignorance of the other. »

Le défi des deux compères consiste donc à fusionner et homogénéiser un matériau sonore disparate en morceaux qui « tiennent la route ». Un "666 International" pris au pied de la lettre, en somme.

Parce qu’une cacophonie sans modus operandi resterait un peu vaine, le dénominateur commun à toutes les « compositions » de ce "Nahvalr" tient en un mot : « horizontalité ». Stratifications et concrétions obligent, difficile – ou absurde – de conditionner chacun des titres à une écriture typiquement rock’n’roll (riffée), de les réduire à une organisation dynamique fondée sur le rythme. A l’instar du "Transilvanian Hunger" de DARKTHRONE, tout l’intérêt de cette musique réside donc dans sa linéarité, sa création de textures, ses superpositions, sa fascination autiste du son considéré en lui-même, déferlant en vagues d’énergie pure, statique, ou déployé dans une optique plus « Ambient Black » – fascination pour l’essentielle bruitiste, on ne peut plus légitime et cohérente vis-à-vis du genre.

Signe d’une réussite manifeste, chaque morceau bénéficie d’une cohérence et d’une direction propre. A tel point qu’ils paraissent ne pas être le fruit d’assemblages studio a posteriori.

La production se révèle assez particulière : relativement intelligible quoique toujours opaque à divers degrés (très biscornue sur le dronien "There Isn’t Anything"), cette dernière autorise une profondeur de champ lorsque nécessaire : ainsi le mixage des aigües et des graves permet la peinture de paysages sonores désolés, comme sur ce "Let Them Eat Blood" à l’entame acoustique funèbre sublimée par quelques chœurs dissonants, le tout rapidement englouti par une basse aux effondrements fuzzy, nuages délétères traversés de stridences de fin du monde.

Reste qu’à l’image du "Kontamination" d’HAEMOTH – pour le côté « terrorisme sonore » parfois insoutenable ("Objectivity"), blast-beat/mid-tempi utilitaro-saturés en sus – ou d’un THE RUINS OF BEVERAST premier du nom – pour l’emphase imparable de riffs atmosphériques encastrés dans ces blocs de bruyante intensité (les supersoniques "Chorus of Blasphemers", "The Witch Box") et certains accords sinistres ("Blood Flood") – voire d’un GNAW THEIR TONGUES pour certaines ambiances en commun, le son de ce "Nahvalr" aveugle, déstabilise, et terrifie par-dessus-tout. Comme si l’expressivité, tendue à son hypertrophie, rejoignait à sa pointe une abstraction à l’impact quasi-physique.

Pour en arriver à ce rendu dense, nébuleux, le duo filtre les instruments, trafique les voix, compresse les guitares, la plupart des pistes étant noyées dans des couches de reverb, de saturation (un fuzz envahissant) ou de bruits blancs. En résulte une monstruosité imprévisible faite de strates, de masses hurlantes qui vrombissent et se soulèvent, déchirées par les plus violentes tensions et les plus intenses chevauchements, et dégorgeant de bruits statiques qui bavent et mordent comme un acide noir, hallucinogène.

Une eau-forte musicale qui, endurée, stimule la plus inconcevable et impersonnelle des fièvres.

De ces vertiges où le sens, comme chauffé à blanc et tendu à son extrême limite, « s’effondre d’abîme en abîme jusqu’à se perdre dans les gouffres sans fond du langage ».

De mémoire de support, jamais épiderme n’aura été aussi rongé, buriné jusqu’à ce que d’un grain cuivré et ferreux, naisse le goût du sang – d’ores et déjà linceul de poussière voilant les plaines calcinées de l’esprit.

Au cœur de cette grande dissolution, brouillamini abscons de courbes, lignes fuyantes et chaotiques esquisses que gravent d’incertaines mélodies, il semble, l’espace d’instants fugitifs, saisir quelques images identifiables. Et puis, plus rien – rien que l’angoisse d’une plaque au noir informe, absolu. « Les images qui masquent le néant sont le poids du néant sur nous » dirait pompeusement l’autre.

Dernier volte-face mystique d’une œuvre riche en surprenants contrastes, "Black Elk Speaks, Chokes and Dies" s’ouvre sur la fascination d’un space-ambient diaphane, non-mesuré, puis évolue en un mid-tempo où les leitmotifs amples de la basse s’entremêlent au son de cloches et de chœurs masculins, désarmant d’une beauté difficile. A la croisée de GNAW THEIR TONGUES et des SWANS, si l’on veut – signe d’un Black Metal déstabilisant, redoutable et hermétique (d’un « vrai » Black Metal), mais inoculant par des voies détournées les charmes d’une fascination impossible.

PS : le monologue ouvrant "Chorus Of The Blasphemies" est en fait tiré de l'émission radiophonique américaine Coast-to-Coast AM animée par Art Bell, personnage rigolo pas mal versé dans le paranormal, la crypto-zoologie et le surnaturel au sens large ; monologue dans lequel l'émetteur explique détenir les hurlements des âmes damnées d'une équipe de mineurs qui, ayant trop profondément creusé dans les entrailles de la Terre, se sont retrouvés en Enfer...

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- Dan Barett (assemblage, mixage)
- Tim Macuga (assemblage, mixage)
- Une Dizaine De Contributeurs Anonymes


1. Chorus Of The Blasphemies
2. Blood Flood
3. There Isn't Anything
4. Objectivity
5. Swallower Of Bile
6. The Witch Box
7. Let Them Eat Blood
8. Black Elk Speaks, Chokes, And Dies



             



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