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2009 The Past Prelude
 

- Membre : Tarot

MARENNE - The Past Prelude (2009)
Par BAST le 30 Janvier 2010          Consultée 2180 fois

Chère MARENNE,

J’ai bien reçu ton cadeau. Sans ta bonté, un Noël serait moins que l’ombre de lui-même. Cependant, et n’y décèle aucune offense, je m’étonne de son contenu. Pourquoi avoir sacrifié au traditionnel chèque de 100 euros qui, en ces temps de disette, m’aurait davantage assisté qu’un disque ? Certes, la pochette est un ravissement, mais je ne suis pas comme l’ascète qui sait taire les suppliques criardes de ses entrailles par l’imprégnation de la beauté.

Cher filleul,
Avant de pouvoir jeter ton dévolu sur mon chèque et l’honorer de ces achats douteux comme les aime à impulser l’ingratitude adolescente, j’ai une faveur à te demander. Ah ! Je te prie d’écraser immédiatement ces gouttes de sueur qu’en pensée je vois luire sur ton front soucieux ; le service évoqué est tout à fait dans tes cordes et entamera de manière à peine perceptible la masse de calories aux flammes desquelles tes lèvres gonflées se brûlent plusieurs fois par jour. Ce disque, "The Past Prelude", puisqu’il a un nom, est le fruit de mon travail. Je l’ai enregistré il y a quelques mois avec l’assistance de musiciens rencontrés par la grâce d’internet et aussi celle de mon producteur. Il s’agit de Zachary Hietala et Janne Tolsa (généreusement confiés par TAROT), Jukka Jylli et Tom Rask. Avant de commercialiser "The Past Prelude", je sollicite ton avis, t’offrant la promesse inouïe d’une oreille attentive en place du mépris railleur que tes opinions récoltent plus que de raison. Mon souhait est que tu mettes tes doigts courtauds et boudinés sur ses innombrables qualités afin que me soit suggéré l’argumentaire le mieux approprié à la promotion que j’apprête.


Chère MARENNE,
Les temps sont terribles, j’en ai la cruelle confirmation. Le doute m’est un supplice alors que s’opposent dans la balance deux poids aux forces gravitationnelles si proches. Quelle attitude adopter si le chèque brigué avec tant d’ardeur était assujetti à la teneur des mots impartialement voués au ressenti de ce disque ? Attention, n’y conjecture nulle indication prématurée de quelque opinion, je ne l’ai pas encore écouté, préférant ajuster au préalable la stratégie la mieux adaptée à chasser les ombres d’un avenir annonciateur, j’en ai peur, de ventre creux.

Cher filleul,
Tu me ferais presque couler les larmes. Considère mon chèque comme tout ce qu’il y a de prêt. Imagine-le enveloppé avec soin et étendu paresseusement sur ma table de nuit, visible de moi à l’heure du coucher comme l’espoir qu’un jour enfin tu te décides à me livrer tes impressions et me libère du poids de l’attente. La mise en banque de ce récépissé constituera la juste rétribution de tes écoutes puis de ton analyse, qu’importe sa substance. Je ne nourris guère de crainte à l’endroit de tes critiques. Je ressens assez de fierté et d’assurance pour ces dix titres fraîchement enregistrés que me vînt le plus infime embryon de doute quant à une conclusion éclatante de ta part.


Chère MARENNE,
Aussi effroyables soient-ils, les temps me semblent en définitive plus cléments confrontés à l’instant présent qui me voit rédiger ces lignes. Tu m’exhortes à la franchise. Mieux, tu me jures l’envoi du chèque affranchi de toute indélicatesse à l’encontre de ton disque. Soit. Je me lance, donc, et me sens comme un nageur forcé à fendre des eaux glacées pour récupérer un sésame de papier qu’une âme retorse y aurait plongé.

Je n’ai pas aimé, MARENNE. Si tu me pousses à insister, je dirais même que c’est de la merde. Nichée entre EDENBRIDGE et un EPICA tout juste gothique, il me semble que tu te complais à imiter EVANESCENCE autant que possible. L’exercice est périlleux, d’autres ont vu leurs ailes brûlées d’avoir tenté de s’y frotter. Tu en fais désormais partie.

Le fiasco n’est pas intégral, paix à ton chèque appelé à devenir mien. La production ou les arrangements par exemple, dénotent de moyens et de bon goût tout à ton avantage. En outre, trois titres parviennent à m’arracher un soupçon de contentement.
Je vais insister sur ceux-là pour t’aider à construire au plus pertinent ton argumentaire promotionnel :
"Frozen Tears" est un morceau atmosphérique assez prenant. Quoique sa construction modeste eût pu faire craindre une durée de vie éphémère, je lui trouve des qualités motivant une longue exploration. Ici, on perçoit des mélodies senties plutôt que soupesées. D’accord, la pop n’est pas loin. Seulement, c’est efficace.
"I Whished (Who Can Tell Me)" m’a séduit par son refrain, un peu plus complexe que les autres et ta voix bien agréable.
"My Time", ballade doucereuse, t’honore dans tes aptitudes les plus pures. En outre, le refrain assez osé lui donne un brin d’originalité.
A côté, de l’ennui. Cet ennui que l’on dit greffé aux adolescents plus fermement que leur acné prend ici un sens particulièrement approprié. Faut-il que j’aille plus avant et emprisonne chaque titre au piloris de ses défauts ?

Ta voix apprêtée sur "The Stone" a tendance à me hacher menus les testicules. Les « ouuuuuh » de fantôme plus kitsch qu’une série B italienne étaient-ils vraiment nécessaires ? Tu en fais trop. Le gothique de carnaval sur "Cold Mornings" va arracher des sourires, désolé de te le dire. Étrange que Zachary Hietala, plus à la fête avec TAROT, sorte autant de riffs insipides. Rassure-moi : la guitare sur "Under My Hand", c’est une exigence sous-facturée nichée dans l’ombre d’un cahier des charges ? Et quand le guitariste fourni enfin un travail adéquat, il est jeté à bas par le reste, comme sur "Slow Your Steps" qui joue les méchants avec un riff bien prenant et échoue à sortir des griffes dont il est, au final, brutalement dénué. "Land Of Misery" est mignon tout plein, mais quel pathos avec ces ambiances fraise-banane et ce chant plein de flemme. On croirait entendre les confessions d’une ado allongée sur le lit de sa chambre pestant contre le monde entier parce que Jean-Jean le rebelle préfère le charme de Matilda-Isabelle la pouffiasse.

Mes conclusions impartiales seront donc les suivantes : un album bien fait, bien produit, sur lequel tu te démènes avec un certain talent, mais qui sent tant le réchauffé et le coup marketing qu’il en devient indigeste. Il manque trop de spontanéité, en somme. Ce heavy sirupeux intégrant des relents death/black pour le côté « bad girl » échoue à séduire. Ma note : 1,5 sur 5.

Voila, chère MARENNE, ce que je pouvais dire pour t’aider. J’attends désormais sereinement que le geste donateur promis depuis de longs jours trouve enfin une conclusion heureuse.

Filleul,
Le jour où j’ai accepté charitablement de devenir MARENNE de l’âne bâté que tu es est inscrit en moi comme une plaie à vif. Tu n’es pas digne de l’intérêt que je te porte, cela m’apparaît de manière si éclatante que le simple fait de t’imaginer m’appeler MARENNE m’écorche les oreilles. J’ai une bien mauvaise nouvelle : le chèque dont il est question depuis les débuts de notre échange annuel s’est malencontreusement déchiré. Je suis moins désolée pour toi que pour l’arbre qu’il a fallu abattre à sa conception désormais inutile. Si je dois avoir des nouvelles de toi, c’est uniquement lorsque l’on m’annoncera ta mort (puisses-tu souffrir copieusement), ton internement (tes semblables t’attendent) ou ton incarcération. En attendant, pour mon salut davantage que le tien, considère que je n’existe plus.

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- Marenne (chant)
- Zachary Hietala (guitare)
- Jukka Jylli (basse)
- Janne Tolsa (claviers)
- Tom Rask (batterie)
- Tuomas Laitinen (guitare)


1. The Stone
2. Cold Mornings
3. Frozen Tears
4. I Wished (who Can Tell Me)
5. My Time
6. Dream
7. Slow Your Steps
8. Under My Hand
9. Do You Think Of Me
10. Land Of Misery



             



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