Réactiver SILENT FORCE était-il bien nécessaire ? Réactiver SILENT FORCE sans la présence au chant de DC Cooper, bien occupé avec ROYAL HUNT, était-il vraiment une bonne idée ? Après six années de silence, le groupe du guitariste Alexander Beyrodt remet donc le couvert, et nous fait le coup du phénix renaissant de ses cendres. On imagine mal comment les cinq membres du groupe ont bien pu trouver le temps de mettre en boîte ce nouvel opus : Beyrodt, qui emmène dans sa barque son comparse Mat Sinner de PRIMAL FEAR (les deux sont décidément inséparables), est bien occupé avec son groupe principal et VOODOO CIRCLE, tout comme le second qui cumule en plus des fonctions au sein du groupe qui porte son nom (SINNER) et des activités de producteur. Ne parlons pas du batteur André Hilgers, déjà bien pris par RAGE et encore moins Alessandro Del Vecchio, le stakhanoviste de chez Frontiers, auteur d'environ la moitié des albums de Hard Mélodique parus sur le label italien ces dix dernières années. Ne reste guère que le talentueux chanteur Michael Bormann à avoir un peu de temps libre, lui qui depuis son départ de JADED HEART se fait mercenaire du Rock, posant sa voix sur les récents BLOODBOUND et POWERWORLD. À noter que Michael Bormann faisait partie de The SYGNET, première mouture de SILENT FORCE qui sortit un unique album en 1998 avant de changer de nom.

La reformation de SILENT FORCE ne tient pas donc à des trous dans les emplois du temps, mais semble-t-il a une envie réelle de proposer un successeur à "Walk The Earth", dernier album en date du groupe, qui offrait un bel aperçu du Heavy Mélodique proposé par le quintet teuton. "Rise From Ashes", sans reprendre les choses là où son prédécesseur les avait laissées, semble voué à proposer des ambiances plus directes et efficaces, également légèrement moins fouillées. Si le groupe parvient à rester mordant ("Born To Be A Fighter", qui permet d'apprécier le talent indéniable de Michael Bormann), il glisse néanmoins vers un Heavy Mélodique un peu plus passe-partout et manquant d'accroche, voire vers un Hard Rock burné qui n'est pas sans rappeler les GOTTHARD récents, le titre final "Kiss Of Death" semblant être un copier-coller approximatif de "Gone Too Far", par ailleurs excellent titre des Suisses.

Forcément, le savoir-faire combiné des cinq membres du groupe fait avaler la pilule, et offre, on le suppute, un peu de poudre aux yeux, à l'image de celle que l'on perçoit sur le titre introductif "Caught In Their Wicked Game", dont les 4'40 s'éternisent à force de démonstrations futiles des capacités instrumentales (certes impressionnantes mais peu à leur place sur un titre d'ouverture qui perd ainsi en efficacité) de Del Vecchio et Beyrodt. On lui préférera aisément les titres placés en milieu d'album, à l'image de "Before You Run", qui peut rappeler un PRETTY MAIDS en bonne forme, ou encore "You Gotta Kick It", aux sonorités Hard Rock assumées, qui se veut bien plus fun et moins calculé, tout comme le très accessible "Anytime Anywhere". Entre mid-tempi et titres rapides, SILENT FORCE ne varie que peu son propos, et ne parvient pas à tisser la toile plus théâtrale et dramatique que l'on pouvait ressentir sur les albums précédents du groupe. L'efficacité concise d'un "Once Again" (sur "Worlds Apart"), la dramaturgie épique de "Walk The Earth", sur l'album du même nom, ne sont ici qu'esquissées, et constituent un délicieux souvenir plus qu'une réalité palpable.

Après six ans d'absence, il est ainsi dommage que SILENT FORCE s'en revienne avec un album certes bien construit et interprété, mais qui ne fait qu'effleurer la réussite artistique de ses prédécesseurs. Si l'expression "C'était mieux avant" est souvent galvaudée en matière de musique, elle est ici fort à propos pour parler d'un album un peu poussif, pas vraiment emballant, qui ne permet pas en tout cas au groupe de signer un retour convaincant. Une madeleine de Proust à l'intérêt limité.