Quelle bonne surprise de voir ce disque ici. Difficile de commenter cette "chose" sans tomber dans les superlatifs. Il faudrait peut être une écriture à la mesure du disque, mais j’avoue en être incapable. Que dire aux gens qui ne le connaîtraient pas encore ? Qu’il y a un siècle de musique concentrée sur 68 minutes, que ce disque contient tout, et qu’en l’achetant, il en achètent 100.
Sa densité indigeste et les grands écarts stylistiques qu’il propose en font évidemment un disque très difficile (Death, tango, électro, contemporain, musique concrète, jazz, ambient, musique orientale…il y a même un instrumental d’easy listening généré pas un synthé midi . )
Sur le papier, cette « chose » ne peut pas exister, pourtant elle est là et tient dans un petit boîtier en plastique. La conception graphique est tout aussi géniale que la musique, et prouve que cette « chose » surréaliste dépasse de très loin le domaine de la musique.
On a beau la retourner dans tous les sens, cette « chose » n’a pas de faille, pas de prise, pas d’angle et pas de face. On l’épluche plusieurs fois par semaine et elle dévoile à chaque écoute des éléments nouveaux et des passerelles secrètes qui semblaient ne pas exister lors de l’écoute précédente.
Si le qualificatif de « progressif » est galvaudé à peu près 99 fois sur 100, il trouve ici sa juste signification. Mr Bungle démontre, à l’instar de ce que fit toute sa vie Frank Zappa, que la synthèse musicale est probablement la seule voie véritablement créatrice, en tout cas la seule apte à créer vraiment du neuf.
Pour information, « The bends » est un clin d’œil à la musique concrète française des années 49 / 50 (Pierre Henry et Pierre Scheaffer) avec ces courtes séquences transpercées de blancs, son piano préparé, ses passages monophoniques et le bruit de fond rajouté.
Ajoutons enfin que Patton, au-delà de ses capacités vocales hors du commun possède un génie expressif et une aptitude à se « caméléonner » proprement époustouflante, mais rappelons aussi qu’il n’est pas le cerveau musical du groupe, et la substance sonore même du Monsieur Bungle est surtout le fait du duo Dunn / Spruance.
