En cherchant dans les caveaux autrichiens, les pépites méconnues de la scène du Black Metal des années 90, voilà que je me suis attardé un certain temps sur une compilation intéressante et particulièrement underground : "A.B.M.S.: Norici Obscura Pars" (pour Austrian Black Metal Syndicate). J'y ai trouvé GOLDEN DAWN et PAZUZU et d'autres groupes bien plus obscurs tels que PERVERTUM dont je chroniquerai tantôt leur unique album : "Creature Of Ungod". Et puis également, TRIFIXION qui, pour le coup, m'a ramené instantanément aux premiers émois de SUMMONING où Trifixion justement (Alexander Trondl dans la vraie vie) s'était associé à la batterie jusqu'au premier album, "Lugburz", avant que Protector et Silenius ne décident du changement de cap judicieux de leur projet et écartent tout besoin de batterie traditionnelle.

En tirant un peu plus encore le fil, j'ai mis la main sur l'unique album de WERWOLF, "Zeitenwende - Only the Strong Survive... War/Inferno", où Trifixion y déploie tout son talent de batteur et s'occupe des nappes de claviers également. En s'associant avec deux autres, Wolf et Hagen, Trifixion livre un album très frondeur pour l'époque. Très militariste et belliqueux, le groupe associe à sa musique une esthétique mêlant treillis et corpse paint et différents samples ambigus (extraits de films de propagande nazie tels que "Ewiger Wald", chant de la Légion étrangère) ou plus communs (explosions, bruits de guerre, marche au pas). Mais ne vous inquiétez pas, chers lecteurs, la lecture du livret est très claire sur ce sujet, le groupe n'est point politique et s'en défend, évitant la parade et les attaques futiles. WERWOLF utilise cette thématique controversée pour mieux renforcer l'atmosphère de guerre, d'urgence et de lutte ; à l'instar d'autres groupes plus récents comme MINENWERFER, KANONENFIEBER ou bien encore ENDSTILLE.

Mettons donc cela de côté et plongeons dans la musique, car si je vous parle de ce groupe, c'est que cet album m'a vraiment... charmé. Produit via le label Lethal Records, qui fera banqueroute quelque temps plus tard et aura peut-être précipité l'arrêt du groupe (le label appartenant au chanteur Hagen), "Zeitenwende - Only the Strong Survive... War/Inferno" est un petit brûlot du temps passé. L'album, plutôt bien calibré, développe de très beaux motifs atmosphériques, notamment grâce à un mid-tempo sacrément dosé, l'ajout sporadique de quelques nappes de claviers bien senties ("Warwolf", "War Is King And Father Of All"). Du reste, les éléments thrashy sont également bien prégnants et colorent intelligemment les compositions ("Under The Flag Of The Sunwheel", "Only The Strong Will Survive"), ce qui permet de conserver de l'énergie à ce Black Metal qui a plutôt bien vieilli.

Sans affrioler, cet unique album de WERWOLF est suffisamment racé pour mériter son écoute. Les ambiances guerrières sont bien réussies et l'apport de nombreux samples n'y est pas indifférent. Le trio que forme le groupe s'arrêtera par la suite et chacun des musiciens, y compris Trifixion, ne produira plus de musique extrême. Un peu dommage que cela se soit passé ainsi, car, lorsque nous écoutons attentivement le jeu de chacun, nous ne trouvons que peu de choses à redire. "Zeitenwende - Only the Strong Survive... War/Inferno" n'est point parfait, quelques parties sur certains titres sont plus médiocres mais, de manière générale, l'album se défend plutôt très bien. Mention singulière au titre très Doom/Sludge "Eclipse By The Moon". Il vous étonnera. Dans tous les cas, dans la série "Les oubliés du Black Metal", cet opus y tient une très belle place. Il vous suffit juste de l'écouter.

Note réelle : 3,5/5.