Seize années se sont écoulées depuis sa dernière livraison (on parle du très bel album en collaboration avec Hervé N’Kaoua) et évidement encore plus depuis son premier album. Rondat en France c’est un son, une carrière faite de rencontres (Petrucciani, Lockwood m...) et d’aventures uniques (Jarre et ces concerts extravagants dans des lieux non moins inhabituels) ainsi qu’un personnage emblématique de la guitare hexagonale. À cela s’ajoute une image des plus sereines et modestes du genre.

Modeste mais qui a su les années durant se faire un grand nombre d’amis tout autant que d’admirateurs. Ceci expliquant son omniprésence au moment de la sortie de l’album auprès des Youtubeurs guitaristiques français, qui ont immédiatement rivalisé de propos tous plus élogieux à son égard. Ça finirait même par être contre-productif ; on frôlerait quasiment l’hagiographie, par instants.

D’entrée de jeu, Rondat rassure ; on n’est pas en présence d’un album pour guitaristes mais d’un album pour réaliser un voyage musical avec lui, que l’on soit musicien (à fortiori guitariste) ou pas.
Les deux minutes de claviers et d’orchestration de "Overture" plantent un décor cinématographique et prenant. On sent la filiation directe avec l’album à la grenouille. D’ailleurs sur la pochette (assez bof, Rondat a sorti le modèle signature "Amphibia" et non son dernier en date). Un signe ? Sûrement. D’autant plus que sur les vidéos cette grenouille s’intercale entre son prénom et son nom.

S’enchaine ensuite de manière harmonieuse le morceau "Fear And Guilt" où l’on reconnait immédiatement la patte propre à Patrick. Ces aller-retours intenses et ce lyrisme à chaque instant. On nage ici en plein Metal Prog, et l’on pense à DREAM THEATER (le son des claviers par exemple et des plans de batterie), même si à la différence des Américains, le mix n’enterre personne. Le travail sur les voix et le côté symphonique est vraiment très beau. On pense vraiment à un long métrage !

Contrairement à beaucoup de groupes, notamment US, la guitare est moins saturée, donc s’en trouve plus lyrique moins teigneuse, et bien plus déliée quand notre ami passe la seconde avec ses aller-retours démoniaques.

Sur le début de "Invisible Wars" on pense au premier Larry Mitchell. Le mix flatte la basse de Patrice Guers (vieux complice) ce qui permet encore une fois de créer des climats et des dynamiques loin de la logorrhée guitaristique. Guers qui a même un moment solo sur le très beau morceau éponyme.

Plus classique mais totalement marqué du sceau de l’artiste on trouve "Hold On To Your Dreams",ou encore "Back On Track". On parle souvent de son aller-retour mais Patrick a aussi dans son arsenal, un vibrato très particulier (cette technique de Floyd) qui n’appartient qu’à lui.

Sur chaque album son petit lot de surprises : pour ce retour on est gâté. Déjà on a le premier morceau chanté sorti sous son nom. "Now We’re Home" est un super morceau. Superbe en tant que tel mais en plus Rondat se met au service du style du titre et, même s’il garde son identité, se métamorphose en se fondant dans le style demandé. On parle de Folk/Blues Rock, quand même.

Des guests Patrick en a déjà eu, et pas des moindres, mais pas encore des guitaristes. C’est chose faite avec son ami Pascal Vigné. Le Youtubeur étant également professeur comme Rondat autant qu’artiste accompli. Le morceau "From Nowhere" illustre cette passe d’armes dénuée d’ego, au service de la musique.

L’album se termine sur une relecture d’un titre sorti de l’album d’Hervé N’Kaoua. Ici le gain est plus prononcé, mais le lyrisme est toujours là. Néoclassique mais pas boursouflé d’ego. Une réussite.

Le mix est vraiment très bon, très organique loin des productions actuelles stéréotypées et aseptisées. Mention spéciale aussi à Manu Martin qui participe grandement par son talent à la réussite de ce voyage.
Conseil d’écoute : respectez bien l’ordre des titres. Ils ont été pensés, agencés pour faire un tout cohérent et créer un voyage musical.

Morceaux préférés : "Invisible Wars", "Now We’re Home", "Escape From Shadows" et "Prelude And Allegro (In The Style Of Pugnani)"