S’il y a eu pendant longtemps un plafond de verre, voire une loi implicite qui rendait le Metal hermétique à la gente féminine, ses hérauts des années 90/2000, avec leurs parcours diversifiés, et pas toujours lié au genre loin s’en faut, ont eu tendance à révéler une fois la tentation de l’effort solo succombée, des albums de Pop à guitare pas toujours amusant pour nous autres. Les exemples sont pléthore : Liv Kristine, Anneke Van Giersbergen ou encore Sharon Den Adel. Donc autant vous dire que l’arrivée d’un album solo de l’incendiaire chanteuse d’EPICA ne faisait clairement pas partie de mes priorités.

Et pourtant… La maîtresse de maison a ses exigences. Et ce disque il lui tenait à coeur et il n’était pas question pour elle de le prendre par dessus la jambe, comme un petit snack entre deux sorties d’EPICA. Et si les deux artistes sont connectés depuis la participation de Simone à "The Source", il est évident que celui qui lui avait laissé une large plage sur "Transitus" ne comptait pas en rester là ; c’est bien Arjen Lucassen qui a été chargé de concrétiser les envies d’ailleurs de Simone Simons.

Arjen Lucassen le stakhanoviste, celui qui sort presque un album par an depuis quelques temps et qui a largement diversifié ses terrains de jeu, entre deux rééditions de ses anciens travaux, et qui semble vraiment jouir de cette liberté d’écrire pour des voix féminines, après l’album de The GENTLE STORM en 2015. Simone a ainsi opté pour la version grand luxe avec un compositeur qui je trouve commence à pas mal se répéter mais possède toujours un talent et un capital sympathie.

Et si sur toutes ses sorties récentes je sentais de la redondance, "Vermillion" est indubitablement son disque le plus réussi depuis peut-être "The Source". Simone, en voulant développer des climats teintés d’Électro amène ce disque quelque part entre "01011001" et AMBEON (voire même "Actual Fantasy") et c’est un vrai vent de fraîcheur. Car les guitares restent très puissantes et ce disque respire le Metal par tous les pores. Ne reniant pas son pedigree de chanteuse de Metal Symphonique, notre rouquine fait passer sa voix par tous les états (micro saturé sur "R.E.D.", chant lyrique sur l’ouverture "Aerterna", élans plus Pop sur "In Love We Rust", "Vermillion" est clairement un disque rafraîchissant même si les amateurs d’AYREON décèleront bien plus que des clins d’œil.

Les ambiances sont soigneusement étudiées d’un morceau à l’autre, et si l’album est incroyablement cohérent, il ne manque pas le moins du monde de contrastes, et aucun morceau ne fait faiblir ce disque compact de trois-quarts d’heure (durée parfaite on le rappelle pour ne pas en perdre une miette) achevé par une pièce intimiste dirigée par le piano, et dont le violoncelle accentue la mélancolie.
Peut-être que j’aime moins "The Core" dont la modernité et les growls cadencés de Mark Jansen sont les plus forcés du disque, et la plus mollassonne "Dystopia" aux lignes de chant pourtant soignées, qui évoquent "In Love We Rust" qui constituait avec "Aeterna" une ouverture de disque de très haute tenue. A contrario, le duo avec Alissa White-Gluz marche d’enfer sans virer au duel petite poupée fragile versus grosse bourrine baroudeuse.

Ce disque de Simone SIMONS c’est une forme de raffinement presque à la française, la douceur humaine dans un monde de machines, et une personnalité des lignes vocales, des textes (tous coécrits avec la propre femme de Lucassen Lori) qui font mouche instantanément et qui donnent son unité à un disque ambitieux, qui me plaît toujours autant après des premières écoutes tellement enthousiasmantes que j’avais peur de surévaluer "Vermillion". Finalement il n’en est rien ; Simons SIMONS vient de réussir un coup de maître, révélant au passage le meilleur de ce qu’Arjen Lucassen est encore capable de composer.