En plongeant enfin sa musique dans l’identité qui lui correspondait, Zagan opère un changement de style et de line-up pour finaliser le second album de BLACK MESSIAH après un hiatus de près de six ans. Même s’il ne laisse pas beaucoup de place dans le processus de création et de composition aux autres membres du groupe, Zagan est un musicien hors pair et un multi-instrumentiste inspiré qui mène tout à fait bien la barque de BLACK MESSIAH. Avant que mièvrerie Viking n’atteigne un peu trop à mon goût son œuvre, Zagan nous livre un deuxième album très beau et puissant qui comporte certes son lot de défauts, mais fait le pont admirablement entre les racines précieuses du Pagan/Black Symphonique de "Sceptre Of Black Knowledge" et les futurs albums.

Un peu comme les méconnus Norvégiens de FORLORN, les deux premières œuvres de BLACK MESSIAH valent leur pesant d’or notamment si l’on prend la peine de les comparer aux autres groupes similaires de la scène de l’époque et qui trustaient les charts (coucou MOONSORROW ! Salut à toi ô mon BORKNAGAR ! Hey ça boome ?). Non pas que ces belles têtes d’affiche aient été surcotées mais leur grande envergure a causé pas mal d’ombres à d’autres entités sans doute moins bien loties mais tout aussi inspirées. Et ce "Oath Of The Warrior" est assez exceptionnel de ce côté-là. Les raisons sont simples. Envoutés encore dans la brume de nappes de claviers atmosphériques, les riffs des guitares cheminent dans ce jeu de lumière indistinct pour nous conter leur ténébrosité tout autant que leur mélancolie.

Et ces sentiments puissants vont développer aisément une force invisible qui poussera presque tous les titres de cet album à devenir quasi-charnels en touchant notre intimité de leurs entrechocs émouvants tout à la fois lascifs et énergiques. Zagan nous éprend avec les mélodies entêtantes qu’il créée et qu’il nous distille le plus souvent par un riffing sublime (me rappelant très souvent les inspirations instinctuelles de Valfar de WINDIR). Utilisant une mandoline ("Blutsbruder", "My Way To Asgard"), un violon notamment sur la sublime "Christenfeind", de la guitare acoustique, des leads lumineux, et variant aussi parfois son chant comme sur la très sensible "Feld Der Ehre", d’une beauté triste et majestueuse évoquant certains motifs admirables du regretté Juhani Palomäki au sein de YEARNING, Zagan nous conte une épopée historique dans laquelle il nous est aisé de plonger et d’en être fasciné.

Côté composition, l’album ne souffre d’aucune baisse de régime ni de titres anecdotiques. Seul le son de la double grosse caisse me semble indigne. Sonnant artificiellement j’ai peine à croire qu’il s’agisse d’un vrai batteur. Et pourtant… Mis à part cela, "Oath Of The Warrior" va vous conter fleurette. Ma main à couper. Si cet album produit un très beau Viking Metal, il reste néanmoins très atmosphérique (merci au jeu du claviériste !) et subtilement grave. Entendez par là tristesse et carpe noctem. Bref au lieu de continuer à vous en faire l’article, il est bien temps pour moi de faire silence et d’aller me lover dans ces brumes disparates du Grand Nord et de ses légendes victorieuses et maudites. Hail BLACK MESSIAH !