En découvrant l’année dernière ce quatrième album des Suédo-néerlandais, je dois bien admettre que j’ai tenté de déceler encore des traces tangibles de pur Crust/Black Metal. Non pas que DÖDSRIT a tourné le dos à cette identité qu’il avait bien embrassée à ses débuts, mais le groupe a évolué. Les amateurs de D-Beat, d’un son sale et brut, et d’une éthique DIY sauront quelque peu désappointés. Le DÖDSRIT de 2025 n’est plus tout à fait celui d’il y a sept huit ans. "Nocturnal Will" en conserve les influences, et en superposant bien plus largement des mélodies du Post Black Metal sur la structure rythmique du Crust, DÖDSRIT quitte les effluves cradingues du Punk au profit d’une nouvelle modernité.

Et c’est là où d’emblée nous pourrions imaginer que le bât blesse. En épousant les atmosphères angélico-mélancoliques du Post Black, la bande à Christoffer Öster embrasse davantage la mélodicité, les passages lumineux de beauté, et s’engage à nous entraîner avec une intensité toujours bien énergique vers des rives plus apaisées. Les titres sont majoritairement d’une durée longue – comme à l’accoutumée – et permettent des développements progressifs et une immersion profonde et prolongée. Tout bien réfléchi l’approche bien plus mélodique de ce quatrième album, si l’on prend la peine de bien l’écouter, fait mouche. Christoffer n’est point un manche, et les riffs qu’ils trouvent avec Georgios Maxouris sont bavards je dirais. Bavards, dans le sens où ils nous apportent un lot pas bégueule d’émotions variées. Majoritairement mélancoliques, les compositions nous offrent une expérience d’écoute introspective.

Et c’est bien cela qui fonctionne et qui rend attachant ce "Nocturnal Will". À l’écoute des dix minutes du titre d’ouverture, "Irjala", c’est un voyage intérieur bouleversant qui pourrait surgir en vous. Les leads sont beaux, les bridges taillés sur mesure pour nous embrigader à tenir bon avant les futurs tumultes, les vocaux acérés sont percutants et maintiennent la tension, les blastbeats s’étalent à la grâce du Black Metal… Un titre vif, rempli de trémolos planants et émotionnels. Chapeau donc ! Mais ce n’est pas fini, car cette copieuse entrée va nous emmener un peu plus loin à ourdir les influences Heavy de DÖDSRIT présentes en nombre au sein du titre "Nocturnal Fire" avec notamment son solo ravageur démarrant un peu après la sixième minute, des montées et des descentes de manche raffinées, et une ambiance générale bien épique et propice à nous combler le cœur. "As Death Comes Reaping" clouera définitivement le sort de ce "Nocturnal Will". Sa majestuosité entrainante nous saisit le sang grâce aux harmonies des guitares et aux solos flamboyants. Le temps se suspend et nous nous connectons à la ventilation de ce titre assez sublime. Sa haute teneur en mélodicité pourrait en faire un hymne Mélodeath traversé d’une dose de Black Metal mélodique à nouveau.

DÖDSRIT a repris la main et a marqué le choix de sa direction avec "Nocturnal Will", quittant les rives du Crust/Black Metal, tout en ne l’évacuant pas totalement, au profit d’une sphère plus mélodique et triomphante. Si les deux précédents albums ne m’avaient que moyennement emballé, je dois bien dire que ce nouvel opus me ravit. Son identité davantage marquée, sa fougue toujours indomptable et la grande qualité technique et émotionnelle de ses titres redorent le blason de DÖDSRIT. Un album qui a sacrément du chien et de l’énergie à revendre.