"Martyr Of Star And Fire" est un album de plus qu’il n’aurait pas fallu de sitôt oublier ou d’avoir la mésaventure de ne pas écouter en cette riche année 2024, somptueuse au niveau des sorties de qualité au sein du Black Metal. Heureux concours de circonstance, cet album m’a été conseillé par un lecteur bien inspiré et sans doute faisant partie de la bande des grands commandeurs-détecteurs de pépites. L’anonymat complet du groupe – que nous savons écossais - et la faible quantité d’informations de ce projet permettent de se laisser aller, de la manière la plus neutre et la plus pure possible, à ce voyage cosmico-atmosphérique dissonant et oppressant, et de ressentir l’envie d’y plonger ardemment au contact de ses propres impressions et ressentis intimes.

L’album est court et se pare de quatre titres de longueur inégales mais tous mus par des ambiances démentielles à la croisée d’un AKHLYS et d’un KVADRAT nimbé d’un DARKSPACE, ou bien encore d’un VORGA totalement déchiqueté et broyé par l’infernalité d’une aura Black Metal, à son paroxysme de sombreur. Les sensations vertigineuses portées par des leads dissonants superbement orchestrés, permettent aux voix hurlées mais surtout à celles déformées et quasi-synthétiques (que l’on retrouve sur "Atrium - Martyr Of Star And Fire" notamment) pourfendant les titres, d’épaissir le mystère des thèmes et des motifs mélodiques. Bien plus écoutable que les derniers albums d'ABIGOR ou de BLUT AUS NORD dont il pourrait partager les mêmes velléités belliqueuses, ce second opus de ARISTARCHOS est une cavalcade effrénée d’un Black Metal richement mélodique et énigmatique, où s’entremêlent les ombres, les esprits et la lumière. Le travail de composition riche et complexe laisse dès les premières secondes entendre l’excellence de l’album.

"Orb - Shadow Memories Of The Enlived Amid The Deathless Aether", le second titre, est autant éruptif que voyageur et ce double effet est une constance sur cet album. Nous oscillons entre agressivité infernale et vertige angoissant. Nous mirons au contact de ce titre la férocité des abîmes et sentons pourtant de temps à autre une apesanteur fragile nous gagner. Notre corps réagit alors, entre tension spastique et impression de délivrance. Déjà deux titres et nous sommes harassés. Acculés aux confins de nos propres cauchemars, l’expérience se prolonge avec "Oath - Dispersal Of The Spectral Awning In Perpetual Flame". Portée par ces voix spectrales et gutturales du plus bel effet, des riffs aux sons planants, notre âme est attirée vers cette porte infernale que cette pochette représente. Passerons-nous enfin de l’autre côté, quitterons-nous ce sombre présage ? Gagnerons-nous le repos dans l’hostilité ? Lorsque déboule l’incroyable titre "Adornment - Endless Syzygies Of The Constant Immaterial", tous les espoirs sont à nouveau permis. Que nous réservera cet ultime hasard ? Le moins que l’on puisse dire c’est que ce titre nous permet de regagner une certaine région du firmament ? Nous nous extrayons de la torpeur des enfers mais encore pour combien de temps ? Observant anxieusement du haut des cieux cet enténèbrement permanent gagnant sans cesse du terrain sur la lumière, des giclées de sueurs froides nous glacent le visage et le regard et finissent par nous aveugler éternellement.

Les assauts des riffs de ce Black Metal Atmosphérique de haute volée, aidé par l’appui discret de claviers et les jeux vocaux captivants, font de "Martyr Of Star And Fire" une des sorties géniales de cette année. ARISTARCHOS tire son nom du mathématicien et astronome grec Aristarque de Samos, un des premiers contestataires du géocentrisme (nous sommes 250 ans avant J-C.). La dimension philosophique de ces Écossais – si l’on prend la peine d’étudier les paroles – permet d’asseoir l’aspect quasi surréaliste et poétique à la fois de leur concept, dans une dimension héliotropique, comme si celui-ci partageait sa volonté de se tourner tout autant vers la lumière que de rester attiré et aimanté irrémédiablement vers le royaume des ombres. Fascinant !

Note réelle : 4,5/5.