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MOURNFUL CONGREGATION - Tears From A Grieving Heart (1999)
Par PERE FRANSOUA le 18 Mai 2024          Consultée 482 fois

Pour diverses raisons j’ai associé dans mon esprit la dégustation du Doom Metal à celle des bières noires, Porter, Stout et en particulier les Imperial Stout devenue pour moi l’incarnation liquide du Funeral Doom.
Difficiles à dénicher, ne plaisant qu’à quelques rares foufous, à peine appréciés du bouts des lèvres mais vécues comme une véritable transcendance une fois épris de ces saveurs si puissantes, saturant les sens la mêlasses épaisse ne s’accommode avec rien, vous n’avez d’ailleurs plus besoin d’autre chose, c’est souvent plus facile à petites doses et s’en enfiler une entière peut s’avérer difficile, voire écœurant, il y en a des décevants mais une fois que vous dégottez un bon fabricant ne le lâchez plus car tout sera délicieux, même avec les infusions exogènes les plus bizarres. Cette plongée dans ces eaux noires et impénétrables se révèle étonnamment réconfortante.

Ainsi mis en joie je ne désire que de parler de ça afin de ne plus jamais m’extirper de ces plaisirs profonds. Mais tous les grands classiques que j’écoute en boucle (des très longues boucles, et très lentes) ont déjà été chroniquées ici et nouvelles œuvres sont rares, les grands maîtres du genre requérant des décennies de gestation.
Tous sauf un.
Alors me voilà bien content de pouvoir vous parler du premier album de MOURNFUL CONGREGATION.

On considère souvent à tort (y compris sur NIME) que le premier album des australiens est "The Monad Of Creation". "Tears From A Grieven Heart" demeure dans les oubliettes, alors qu’il est officiellement revendiqué par le groupe comme leur véritable premier album.
Il y a des raisons à cela.

L’album est tout d’abord sorti en version cassette et confidentielle, sans distribution ni label, et apparemment ni mixé ni masterisé non plus, donc avec tous les atours d’une grosse démo, en 1999.
La durée initiale était de 45 minutes avec un court titre instrumental de 53 secondes en son milieu.
C’est apparemment lors de sa réédition en vinyle en 2002 par un obscur label que le contenu va évoluer, remix et master c’est la moindre des politesses, et enrichit d’une véritable pièce centrale longue de plus de 7 minutes, la très belle et douce "Empirical Choirs", totalement dépourvue de guitares électriques mais tout en guitares acoustiques qui s’entremêlent délicatement dans un registre Néo-Folk mélancolique, accompagnée de murmures mystérieux, entre beauté réconfortante et inquiétante étrangeté.
Juchée en plein cœur de l’album la piste offre une respiration bienvenue entre deux plongées dans les abîmes. L’importance de "Empirical Choirs" est d’autant plus grande qu’il fera date et jurisprudence car depuis chaque album des australiens comportera en son centre une piste de Néo-Folk acoustique.
La petite minute de l’ancienne instrumentale et ses carillons de guitares classiques ne disparaît pas et se verra transformée en outro.

Sympathisants du révisionnisme nous considèrerons donc pour cette analyse l’œuvre telle qu’elle se présente depuis, c’est-à-dire la version remixée et enrichie vers 2002.
Qu’en est-il donc de ce premier album longue durée injustement oublié ?
On peut considérer objectivement qu’il s’agit d’une œuvre réussie qui s’inscrit sans faire tache parmi les autres merveilles de la discographie de MOURNFUL CONGREGATION. Tout est déjà là, à commencer par l’ambiance certes mélancolique mais jamais vraiment écrasante, toujours belle, même dans ses profonds désespoirs. Finalement, dans les tréfonds, on y respire assez bien, il y a de l’espace pour s’ébrouer dans la peine et laisser raison les grondements caverneux du barde.
La patte de composition est là, avec ces longs titres qui s’égrènent et dont l’apparente monotonie est sans cesse déjouée par des variations perpétuelles, le voyage passe vite finalement tant les paysages se transforment subtilement (en tout cas pour du Funeral Doom.) Les notes et riffs s’enchaînent comme des évidences, accompagnés des râles profonds de Damon Good, jusqu’à ce que des contrastes nous saisissent (les alternances de belles mélancolies acoustiques et d’implacables riffs-coup-de-pelle-dans-la-terre-froide-du-cimetière sur "Re-Membrance Of The Transcending Moon".) Chacune des longues pistes nous traine à travers un voyage sans retour, nous comptent leurs propres funeste cheminement (il s’en passe des choses dans les nuances de grisaille), "Opal Of The Stream Beneath The Hills" semble démarrer avec entrain mais se dépouille au fur et à mesure jusqu’à n’avoir plus que la basse lointaine et la batterie sur les os, quand on atteint le fond un coup de pied et puis on remonte vers une fin poignante, on pense que la guitare acoustique fermera l’odyssée mais non car ce sera un riff mid-tempo entrainant qui fermera puissamment la marche.

Ce premier album, plus brut et décharné, se montre très agréable, ça respire, votre âme et votre ouïe n’étant jamais écœurées par des murs de sons écrasants. Il ne se distinguera vraiment des suivants que par un son de guitares plus âpres, des voicing[/i] de mélodies moins riches (les leads terreux se traînent), un spectre sonore moins ample. Damon Good est ici tout seul pour jouer les deux guitares et la basse (étonnamment chaude, ronde et audible). On imagine bien la difficulté pour composer et surtout enregistrer tout seul les deux guitares sur son 16 pistes analogique, en cette fin de vingtième siècle. Justin Hartwig, le second larron qui accompagnera longtemps l’orchestre en tant que guitariste lead, n’arrivera que pour "The Monad Of Creation", et cela expliquera en partie l’enrichissement considérable des imbrications mélodiques des guitares. Mais nous n’en sommes pas encore là. Pour le moment c’est un duo qui grava les titres en 1999, après des années de patiente gestation.
Les mornes percussions d’Adrian Bickle, parfaites dans leur rôle catatonique, se font entendre ici pour la première fois. Ce nouveau comparse, qui fera un long bout de chemin, remplace Ben Petch qui accompagnait Damon sur les deux premières démos à la batterie mais aussi à la guitare et au chant (il reviendra en force en 2018.)

Si ce véritable premier album des tristes Australiens était une Imperial Stout, ce serait LA Stout classique, suffisamment simple pour satisfaire avec la clarté de l’évidente, la pureté de sa belle noirceur, les notes de café présentent comme un matin opaque, peu liquoreuse, presque une Porter (au sens moderne), elle étanche la soif sans écœurer tant et si bien qu’on y revient toujours. Il reste une marge de progression pour ces artisans, cette première réalisation restant assez brute, qui saura rapidement atteindre la perfection, et c'est pourquoi la note maximale n'est pas atteinte.

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   PERE FRANSOUA

 
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- Damon Good (vocaux, basse, guitares)
- Adrian Bickle (batterie)


1. Skyward Gaze, Earthward Touch
2. Re-mmembrance Of The Transcending Moon
3. Tears From A Grieving Heart
4. Opal Of The Stream Beneath The Hills
5. Elemental



             



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