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POWERVIOLENCE/INDUS  |  STUDIO

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2018 Posthuman
2023 Common Suffering
 

- Style : Nails

HARM'S WAY - Common Suffering (2023)
Par ISAACRUDER le 11 Décembre 2023          Consultée 2192 fois

Si la plupart des villes nord-américaines sont des dégueulasseries sans nom, où les banlieues s’étalent comme de longs corps sans vie striés de mornes autoroutes, Chicago fait figure d’exception. Il faut dire que quand le fameux Frank Lloyd Wright se charge de votre architecture, on évite les merdes façon Los Angeles, et on se retrouve avec du building art déco incroyable, des tours à perte de vue qui bandent fort vers le ciel, selon la métaphore toujours très drôle de Céline. L’auteur a indubitablement raison, la constellation de pénis d’acier qui forme Chicago a quelque chose de masculin, de viril, de puissant ; on comprendra sans mal que ces symboles conviennent parfaitement aux États-Unis d’Amérique, l’empire de notre temps, loin de faiblir comme l’affirment certains prophètes pathétiques, et ce malgré ses divisions raciales internes. Au-delà de l’architecture phallique, de cette forêt superbe de membres turgescents et azurés, Chicago est aussi connue pour sa criminalité, son passif de mafia, ses trafics d’alcool durant la prohibition, Al Capone, et de nos jours des gangs d’Afro-américains qui se butent entre eux comme des débiles. On l’utilise souvent en exemple pour se moquer de nos propres villes françaises, Grenoble étant ainsi qualifiée de « Chicago française ». Avec un pedigree pareil, les groupes qui naissent de Chicago ne peuvent être que des turbo mongoliens adeptes du pied-bouche, de la castagne, de la grosse protéine, du soulevage de fonte et des propos noirs, bien noirs comme les nuits de cette Gotham trop réelle.

HARM’S WAY donc, progéniture bien tarée, concentration de tout l’excès de l’Amérique façon Reagan, celle des films d’Arnold, des muscles saillants, des aliens avec lesquels on discute la gatling à la main. Les types sont tellement caricaturaux qu’ils sont devenus un meme ("Harm’s Way Running Man To Various Songs") dans lequel le chanteur envoie une danse légendaire sur laquelle appliquer des tonnes de musique aussi improbables que drôles. Cette montagne de muscles tatouée qu’est Hammers (ça ne s’invente pas) incarne à lui seul HARM’S WAY : de la puissance, de l’élan vital et un amour certain de l’esthétique. Car oui, loin, très loin de "Rust", "Common Suffering" est un album racé, réfléchi, qui ne cède pas à la pure bourrinerie Powerviolence mais s’aventure avec souvent beaucoup de talent sur les terrains Indus défrichés par "Posthuman". Certes HARM’S WAY n’a toujours pas le temps de discuter, et "Silent Wolf" constitue une entrée sous forme de pied-bouche absolument fantastique. Mais l’amorce ne dit rien du reste du projet, résolument moderne, dans lequel HARM’S WAY a gardé toutes ses tripes et a osé inclure moult éléments ici Indus, là Doom Gothique, pour un résultat des plus fabuleux, et qui fait de cet album un superbe écrin ténébreux.

En un sens, il est logique que "Undertow" culmine au centre de "Common Suffering". Ce morceau en guest avec KING WOMAN démontre qu’HARM’S WAY ne s’enferme nullement dans la parodie Hardcore-Powerviolence et sait apporter une douceur – toute relative – à un son implacable. Toute en mid-tempo aérien, "Undertow" subjugue, et ce grâce à la voix hypnotique de KING WOMAN, qui propulse le titre vers des sommets. On pense à ce que CHELSEA WOLFE a pu faire avec CONVERGE, en mieux, et on réalise s’il le fallait encore que la lenteur et la voix féminine fusionnent bien avec le Hardcore le plus violent, comme si la caresse d’une main virginale venait apaiser un temps la bête. Cette dernière reste toutefois aussi rageuse qu’une bande de chances pour la France le couteau à la main dans une paisible fête au village. Il est indéniable qu’HARM’S WAY possède une des plus grosses forces de frappe de la scène, force accentuée par une production impeccable, résolument moderne, et qui met en avant les incursions audacieuses en territoire Indus. La basse est notamment mise en avant, histoire de faire vrombir la ménagère, et on se régale sur les couplets de "Hollow Cry" ou sur l’excellent "Terrorizer", hommage clair et net aux patrons GODFLESH. Il serait cependant criminel de ne pas souligner la qualité riffesque d’un album qui fait du bien par où il passe, en témoigne le mastodonte "Heaven’s Call" au groove incroyable ou encore "Sadist Guilt" et son insolent mid-tempo quasiment Stoner.

Ainsi, "Common Suffering" transpire la modernité à plein nez, et ce même dans les textes, plus intéressants que par le passé, dans lesquels Hammers s’attarde sur la désinformation, les relations modernes pleines de toxicité ou encore les secousses encore trop fortes du séisme COVID-19, qui a construit son lot d’anxieux, de paranos et autres misanthropes. Un tableau bien sombre superbement illustré par l’artwork qui rappelle le "ciel bas et lourd comme un couvercle" de Baudelaire. L’époque est aux chutes, à l’image de ces corps anonymes tombant de la marée humaine comme une pluie de désespoir. Encore cette semaine, on apprend que la moitié des 4ème de France ne savent pas lire correctement, que des gamins se font agresser au couteau parce que blancs, ou que Laurent Ruquier exprime encore des opinions. "Common Suffering" mes zouaves, ou bien la foire à la saucisse, c’est comme vous voulez. Heureusement, HARM’S WAY vient lancer quelques parpaings pour nous réveiller de ce mauvais rêve, et propulser son nom au sommet du Hardcore-jeu.

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   ISAACRUDER

 
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- James 'hammers' Pligge (chant)
- Casey Soyk (basse)
- Bo Lueders (guitare)
- Chris Mills (batterie)
- Nick Gauthier (guitare)


1. Silent Wolf
2. Denial
3. Hollow Cry
4. Devour
5. Undertow (featuring King Woman)
6. Heaven's Call
7. Cyanide
8. Terrorizer
9. Sadist Guilt
10. Wanderer



             



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