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2023 1 Inox

NOVEMBRE [FRA] - Inox (2023)
Par DARK BEAGLE le 5 Août 2023          Consultée 1469 fois

La pochette d’Inox m’a fait songer à l’émission radiophonique "Les Maîtres du Mystère" qui officiait dans les années 50 à 70 et que je n’ai évidemment pas connu autrement que par des rediffusions diverses dans les années 90 et encore récemment, grâce à la magie d’internet. Il s’agissait d’histoires policières racontées pour offrir une expérience sympathique aux auditeurs à une époque où la télévision à domicile était encore un luxe. Forcément, cela m’a tenté et je suis entré dans l’aventure sans trop savoir à quoi m’attendre. J’avoue ne pas avoir été déçu par l’expérience même si elle n’était pas non plus entièrement ce que j’en attendais. Explications.

La première écoute n’est pas franchement facile. Le duo évolue dans un genre auquel on ne s’attend pas vraiment. Imaginez que Grand Corps Malade aurait des pulsions meurtrières et qu’il les évoquerait sur une musique Post Rock/Metal lancinante. C’est très grossièrement résumé, mais NOVEMBRE pourrait être désigné ainsi. L’album défile ainsi, très vite, et la seconde écoute ressemble à une véritable révélation. Ce n’est pas exactement du Metal (ne grognez pas, vous avez l’habitude avec moi), mais il se dégage quelque chose de terriblement malsain de ce disque, qui pourrait renvoyer bon nombre de groupes du genre à leurs études.

Pourtant, ce n’est pas le premier méfait du duo. L’Amiral (Olivier Lacroix, chant) et le Pendu (Jérémie Noël, le reste) avaient déjà publié un EP en 2019, "Nacre", qui posait les bases du projet. Au format LP, NOVEMBRE entre dans une autre dimension. Les textes glauques se succèdent, mais ils ont pour eux qu’ils sont vraiment très bien écrits. Certains littéraires diront que quelques rimes sont faciles, mais quelle importance, du moment que l’effet produit est saisissant ? L’Amiral nous conte des histoires sordides, écrites à la première personne pour apporter un parfum encore plus atroce à l’ensemble. Pour en revenir à la première écoute, seules quelques phrases ressortent réellement, mais elles s’accrochent, froides et inhumaines pour ne plus nous lâcher.

Ensuite, le reste se dessine. Il y a un art de la répétition qui est vraiment intéressant ici, qui conduisent à des variations ou à des évolutions de l’histoire narrée, qui viennent immanquablement mettre mal à l’aise. Si vous avez des pulsions homicides, fuyez ! Vous seriez trop tentés de passer à l’acte tant il se dégage quelque chose de jouissif dans cette grisaille sanglante. Certains passages prêtent à sourire dans leur évolution, où le bon mot conduit à une situation que l’on anticipe et qui tombe comme une sentence. C’est un sacré tour de force auquel nous convie l’Amiral, qui décrit certains sévices qu’il compte affliger, allant du meurtre pur et simple à une forme de torture certainement épanouissante pour celui qui la prodigue.

Et le voilà qui déclame son texte dans une formule que je ne définirais pas forcément comme rappée, mais plutôt slamée. Du spoken word qui ne plaira pas à tout le monde, ponctué par très peu de chant. Mais quand ce dernier intervient, NOVEMBRE entre dans une nouvelle dimension. Très justement utilisé sur "Marchand de Fables", il vient créer un effet, une cassure dans l’ensemble qui ne vient en aucun cas nous rassurer tant il fait ressortir une allégresse dans les horreurs qui nous sont racontées. L’Amiral joue ses personnages avec une conviction effrayante, du prédateur ("Je, Tu") au barbier lugubre ("Kosminski"), en passant par la poésie morbide de "Pendu" qui serait presque touchante dans son développement.

Et bien entendu, il faut une musique à l’unisson pour développer l’aspect lugubre de la chose. Celle-ci n’est pas violente. Elle repose souvent sur des nappes de synthé auxquelles viennent parfois se greffer des guitares et une section rythmique, pas forcément pour dynamiser l’ensemble même si cela se produit parfois, mais pour lui donner corps, une épaisseur lourde et angoissante qui correspond tout à fait aux textes morbides. Aussi, l’ensemble s’emballe par moments, et l’effet se veut alors dévastateur (l’effroyable "Music Hall" et sa galerie des horreurs, "Motel 6"). Entre Trip Hop obscur et Post Rock/Metal lancinant, NOVEMBRE a trouvé sa formule et le rendu est plutôt original, pour ne pas dire unique.

Après, il est vrai que certains effets finissent par être prévisible, comme cette façon de proposer une musique plus touffue vers la fin des morceaux, pour accentuer la dramatique de l’histoire racontée. Cela fonctionne bien, mais au bout de quelques morceaux, on commence sérieusement à les anticiper. En revanche, le fait de n’utiliser le chant qu’avec une extrême parcimonie est une véritable bonne idée, qui permet à l’Amiral d’effectuer sa reptation sordide et de l’interrompre d’un coup, sans que l’on s’y attende, provoquant ainsi un pic de tension.

On pourrait croire que la musique n’est qu’un simple faire-valoir vu comme j’insiste sur la prestation de l’Amiral. Ce serait faire un mauvais procès au Pendu qui orchestre l’ensemble de façon intelligente, vu qu’il parvient très bien à se mettre en retrait ce qu’il faut pour mettre en valeur les textes qui sont l’arme la plus tranchante dont dispose le duo. Le Pendu, lui, attire la proie, l’enveloppe, la charme, pour laisser la place à son comparse. Il met en musique ces trépas, ces morts violentes comme autant de petits Requiem à la dissonance clairement étudiée, où chaque note tombe juste, sans surplus, sans ce gras qui montre que souvent les instrumentistes ne savent pas s’arrêter et en perdent le sens de la sobriété. Ici, elle est une force, elle est puissante, elle nous est nuisible parce qu’elle contribue à nous mettre mal, à nous contraindre à rentrer la tête dans les épaules à certaines évocations.

Personnellement, j'attendais quelque chose de sombre, mais de plus saturé, pour ne pas dire de plus traditionnel. Sans forcément espérer du MACABRE qui possède quelques sujets de prédilection en commun avec NOVEMBRE, je songeais à quelque chose de plus sec, mais pas forcément aussi intimiste que ce qui est proposé sur cet "Inox". D'où cette déstabilisation, cette incompréhension initiale qui s'est muée en une espèce de fascination glauque pour ce qui était amené ici, qui a tout de l'urbex qui tourne mal, de cette terreur urbaine qui transforme notre quotidien en cauchemar, une odeur de souffre qui provient de l'allumette qui a servie à enflammer l'essence.

Vous l’aurez très certainement compris, NOVEMBRE est une véritable surprise qui n’a pas véritablement sa place ici mais qui la mérite pourtant amplement. Après tout, le batteur de GOROD ne s’y est pas trompé et vient filer un coup de main en oeuvrant de sa frappe lourde sur le morceau titre pour un final qui laisse de nombreuses séquelles. Le public Metal est certainement celui qui a le plus de chance et de raisons d’apprécier une telle formation, qui va fasciner autant qu’elle va rebuter. Une écoute au casque peut se révéler être totalement anxiogène, ce qui rend cette œuvre que plus réussie. Tentez l’expérience, je pense que certains d’entre vous sauront apprécier l’audace et la noirceur dont font preuves ces musiciens.

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- L'amiral (la voix)
- Le Pendu (les instruments)
- + Guests


1. Marchands De Fables
2. La Colline Silencieuse
3. Kosminsky
4. Music Hall
5. 50 Nuances De Rouge
6. Pendu
7. Jack Knight
8. Je, Tu
9. Motel 6
10. Inox



             



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