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DOOL - Summerland (2020)
Par DARK BEAGLE le 25 Juillet 2020          Consultée 4117 fois

DOOL avait su marquer les esprits avec un premier album prometteur, entre Doom et choses plus cryptiques, un mariage des saveurs qui fonctionnait plutôt bien. Le projet, porté par la voix particulière de Ryanne Van Dorst se voulait assez singulier pour attirer une foule de curieux et se forger un nom dans le paysage underground. L’année dernière, le court EP "Love Like Blood" permettait de nous rappeler les Bataves à notre bon souvenir alors qu’ils nous déclaraient tout leur amour à KILLING JOKE à travers cette reprise incendiaire ; un hors d’œuvre qui ouvrait forcément l’appétit. Le plat de résistance n’avait pas le droit d’être décevant.

La pochette donne déjà quelques indices en soi, tout en délivrant un message inverse, dans un paradoxe étrange et saisissant. Tous ces nuages aux nuances rouges qui laissent le toit d’un édifice religieux les transpercer pouvait annoncer aussi bien un orage que quelque chose de plus vaporeux. Au revoir l’énigmatique cheval du premier opus, adieu l’esprit provocateur que l’on retrouvait sur la jaquette de "Love Like Blood", nous rentrons ici dans une espèce de tourmente, mais sans savoir si l’orage a déjà eu lieu ou s’il va éclater, nous emportant dans son déchaînement. À la fois simple et grandiose, cette pochette donne en tout cas envie de se pencher sur l’œuvre qu’elle dissimule.

Et ne pas le faire s’avérerait criminel vu la qualité du disque. Le plus souvent, l’élément le plus important d’un plat, c’est sa sauce. Vous pouvez réussir la cuisson de la viande à la perfection, votre garniture pourrait être une ode à l’inventivité, si vous foirez la sauce, votre plat sera un échec, il n’aura pas l’impact escompté. Ici, ce sont clairement les mélodies qui viennent napper l’ensemble qui font tout le sel de cet album, qui se veut pour le coup bien plus varié que "Here Now Here Then". Pour cela, l’efficacité brute aura été sacrifiée, l’aspect purement Doom est quelque peu remisé, la lourdeur n’est donc pas un argument ici, tout juste une option. DOOL progresse dans sa musique et sans tout à fait se renier, le groupe entame un nouveau chapitre de sa carrière très différent du premier.

Pourtant "Summerland" n’est pas forcément moins sombre que son prédécesseur, mais il véhicule sa noirceur de façon différente, empoisonnant doucement la lumière qu’il dégage par moments. Difficile de dire ce qui surprend le plus à la première écoute. S’il s’agit de la légèreté toute relative des mélodies ou le chant plus aérien de Ryanne, qui est vraiment éblouissante sur cet album, à la fois posée et agressive, capable de quelques envolées inattendues sur certains refrains. Les titres sont plus courts, mais ils se veulent également plus mouvants, ils explorent plus de surfaces, ils s’enrichissent de l’expérience de chacun des musiciens et développent tous une personnalité à part, dont la particularité est d’avoir des accents retors en commun.

Et DOOL de nous écarteler en nous menant par monts et par vaux là où il veut, sans forcément nous ménager. Passé l’étonnement d’un "Sulphur & Starlight" qui nous conduit dans des contrées plus Rock, forcément Dark, mais tellement écarté des standards Doom, nous rebondissons sur des titres aux caractères bien différents, plus volontiers Metal ("Wolf Moon"), abordant un orgue Hammond de circonstance ("Be Your Sins" et ses cavalcades effrénées), nous soulageant avec un aspect plus calme et doucereux (le title track, le somptueux "Dust & Shadow"), nous ramenant parfois dans des contrées plus connues et attendues, comme "God Particle", qui renvoie à "Here Now Here Then". Une escale rassurante en quelque sorte.

Musicalement, nous ne sommes pas loin du sans faute. Tout le monde est parfaitement à sa place, la section rythmique est tout simplement énorme, elle apporte une dynamique puissante, racée, sur laquelle se greffent des guitares plus sombres, parfois presque maladives tant elles dégagent une espèce de noire mélancolie. Et le chant de Ryanne est le grand artificier, c’est lui qui met le feu aux poudres et qui apporte les petites explosions çà et là qui donnent envie de se replonger à chaque fois dans l’album, le découvrir à nouveau, approfondir une exploration qui n’a rien d’un parcours de santé, tant l’ensemble peut sembler hermétique aux premiers abords.

Mais le trait d’union avec The DEVIL’S BLOOD n’est pas tout à fait effacé. Nous retrouvons encore des traces de ce psychédélisme en noir qui avait fait la réputation de la bande à Selim Lemouchi, qui fut une véritable étoile filante dans le paysage musical des Pays Bas, mais qui y laissera une empreinte indélébile. Puis il y a ce "Khione", ce bonus track qui voit la présence de Farida Lemouchi aux chœurs et qui nous rappelle les grandes heures du groupe qu’elle formait avec son frère. D’ailleurs, il est bien dommage que ce titre ne figure pas sur la tracklist classique de ce "Summerland" tant il se serait naturellement inséré dedans.

Alors, quel serait le point faible de cet album ? Musicalement, il n’est pas loin d’être irréprochable. Les refrains sont plutôt bien foutus, certains vont même se montrer très entêtants, le chant est indéniablement un atout, loin des standards du genre, parfois étrangement plus proche d’un Brian Molko de PLACEBO dans l’idée. En fait, ce qui va gêner avec cet album, c’est sa direction musicale, plus « légère », même si tout cela reste très relatif. Ceux qui s’attendaient à une formule plus lourde et plus agressive en seront pour leurs frais, "Summerland" est ce genre d’album capable de séduire plusieurs publics, pas forcément que celui qui est ciblé.

Vous cherchez un album peu commun qui va tourner longtemps sur vos platines ? Vous voulez du Rock (ratissons large !) qui sonne de façon très contemporaine tout en ayant un petit charme vintage qui se dégage avec parcimonie ? Alors "Summerland" est fait pour vous. Ce disque sonne comme une évolution qu’aurait pu avoir ANATHEMA s’il n’avait pas été attiré plus que cela par le côté atmosphérique de la Force, il transpire des relents Post Punk qui ne détériore pas son fumet plus délicat. Pour faire simple, en deux albums, DOOL impressionne, mais il se place dans une situation très inconfortable. Car à présent, il va falloir combler les attentes que nous allons placer en lui.

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- Ryanne Van Dorst (chant, guitare, claviers)
- Nick Polak (guitare)
- J.b Van Der Wal (basse)
- Micha Haring (batterie)


1. Sulphur & Starlight
2. Wolf Moon
3. God Particle
4. Summerland
5. A Glass Forrest
6. The Well's Run Dry
7. Ode To The Future
8. Be Your Sins
9. Dust & Shadow



             



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