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SKUNK ANANSIE - Paranoid And Sunburnt (1995)
Par HAPLO le 14 Mai 2019          Consultée 3514 fois

Ma première écoute de SKUNK ANANSIE remonte, il faut l’avouer, à un certain nombre d’années : Internet était bien moins présent et les différents groupes tendance n’affichaient pas encore leurs trombines en multi-angles et vidéos à gogo, au cœur même de nos foyers ou de nos transports en commun. Alors pour les ch’tits jeunes qui se moquent (gaffe, le temps passe vite !), non je ne l’ai pas eu non plus sous la forme d’un disque vinyle mais sous le format beaucoup plus anonyme de fichiers mp3.

Vince, mon beau-frère, que le sort injuste à doté d’une oreille absolue, m’avait alors gravé un CD avec quelques titres de ce premier album. Ce traître, après s’être assuré que je ne connaissais pas SKUNK ANANSIE, m’avait alors susurré en affichant un sourire torve : « tu vas voir, c’est pas mal, ça bouge bien ! »

Et ce fut la déflagration ! La collision avec un groupe réellement détonnant que j’imaginais alors cheveux longs, couvert de cuir et headbangant ou pogotant joyeusement dans le studio d’enregistrement, dans les WC, dans les couloirs du métro, avec derrière le micro un néo-punk sans âge avec une chaîne autour du cou, rachitique et pâlichon, à la voix extra-terrestre !

En passant brièvement sur ma tête quand j’ai découvert les membres de SKUNK ANANSIE (de mémoire à la TV) à savoir :
- SKIN : une créature afro-féline, chauve, bourrée d’énergie et sapée avec tout plein de trucs en plumes et des combinaisons moulantes,
- CASS : un bassiste au look rasta bougeant comme un gros metalleux,
- ACE : un guitariste chauve épais comme un sandwich SNCF mais qui sort des riffs à faire tomber des murs,
- Mark : un batteur toujours torse nu qui donne plus dans le sentiment « bûcheron » que dans celui de musicien…
Je me suis dit que ce groupe avait vraiment quelque chose de particulier… Et au moins, je ne m’étais pas gouré pour la voix...

Alors oui il y a du Pop Rock et des relents Funk chez SKUNK ANANSIE, mais si je reste persuadé qu’un groupe comme celui-ci a toute sa place sur NIME, c’est surtout grâce à la haute dose d’én-er-gie qui se dégage de leurs albums et du premier en particulier…

Et justement ! Prenons la machine à (ne pas) remonter le temps et examinons ensemble cette première livraison datant de 1995.

Primo, une remise à l’heure des pendules avec le batteur Robbie France qui n’apparaît pas sur la pochette (assez sobre il faut l’avouer – t’aurais pas un fond de container à me prêter, c’est pour une photo de groupe sur notre premier album studio...) pour la bonne et simple raison qu’il quitte le groupe à la fin de l’enregistrement pour aller voir ailleurs si l’herbe est meilleure. Au revoir Robbie et à bientôt mon cher Mark !

Secundo, cet album est un cri ! un hurlement brut et à peine contrôlé qui dénonce, conteste, accuse et la musique sert bien entendu de poêle à frire pour toutes ces émotions : des morceaux comme "Selling Jesus", "I Can Dream", tout en restant dans des tempos maîtrisés, déraillent et éraillent volontairement l’oreille avec une rythmique compactée et peu respirante. On suffoque et l’on s’accroche alors à la seule chose qui nous guide: la voix limitless de Skin.

Tertio, cet album est également une belle caresse de velours au pouvoir urticant ! Avec des titres comme "Charity", "Weak" ou dans une certaine mesure "Little Baby Swastikka", le quartet nous entraîne dans une douceur qui se révèle vite écorchée puis brûlante. La voix câline de Skin monte alors en puissance et en rudesse, portée par les instruments, le tout nous menant dans une tourmente en acier déchiré !
Le reste de l’album évolue entre des pièces au tempo et riffs très marqués ("All In The Name Of Pity", "And Here I Stand") ou proposant des alternances entre des passages très doux puis des temps forts et puissants sur lesquels la machine SKUNK ANANSIE fait jaillir son énergie ("It Takes Blood..."). Chaque morceau conserve cependant son identité et sa couleur, agrémenté ponctuellement par des lignes de basse flirtant avec le bon Funk et dignement accordées à l’acier trempé du reste de la troupe.

Restent quelques OVNIs tels que "Intellectualise My Blackness" ou "100 Ways To Be A Good Girl" dont l’originalité et le feeling rehaussent (tant s’en faut !) le niveau général d’un très bon album. Même "Rise Up" le morceau qui clôt le chapitre, malgré un allumage un tantinet mollasson (et c’est bien l’unique remarque que j’émettrais) fini quant à lui par une belle envolée en boucle sur laquelle la voix de Skin me donne encore des frissons...

J’ai dit « très bon album » ? Il faut l’avouer, ce premier opus me semble concentrer toutes les qualités propres à un essai carrément réussi pour un groupe alors inconnu. Il faut néanmoins le reconnaître, le train SKUNK ANANSIE est puissamment tracté par l’organe vocal indescriptible de Miss Skin : les autres musiciens ne se contentent cependant pas de cette poussée primordiale et y incorporent leurs styles et leurs jeux mêlant ainsi leurs propres combustibles au carburant de la roquette musicale SKUNK. De plus, contrairement à d’autres chanteuses de notre style musical préféré dotées de voix puissantes, Skin parvient quant à elle à faire varier admirablement cet organe hors-norme, passant de la caresse féline au pic sonore à décoller la peinture, ce qui empêche peut-être l’émergence de cette lassitude d’écoute dénoncée pour ses concurrentes de catégorie.

Une dernière remarque avant de te laisser, Ô lecteur bienveillant, découvrir cette galette braisée, et qui va sûrement faire hurler les vieux loups au fond des bois ! Les (ré)écoutes de "Paranoid And Sunburt" nécessaires à la rédaction de la présente chronique, avec ce mariage heureux de différentes influences, cette énergie omniprésente et bien sûr, cette voix si particulière, n’ont pas été sans me rappeler les premiers albums d’AC/DC sur lesquels les riffs métalliques s’accordaient sur des bases de Blues sous la houlette vocale du sieur Scott...

Je quitte en courant les orées du bois (une canette est si vite attrapée !) en espérant que cette comparaison volontairement osée en poussera quelques-uns(es) à aller se blottir dans les pétales empoisonnés de SKUNK ANANSIE (à qui j'accorde un 5/5 amplement mérité pour ce cri primordial).

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   HAPLO

 
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- Skin -deborah Dyer- (chant)
- Ace -martin Ivor Kent- (guitare)
- Cass -richard Keith Lewis- (basse)
- Robbie France (batterie)


1. Selling Jesus
2. Intellectualise My Blackness
3. I Can Dream
4. Little Baby Swastikka
5. All In The Name Of Pity
6. Charity
7. It Takes Blood & Guts To Be This Cool But I'm Stil
8. Weak
9. And Here I Stand
10. 100 Ways To Be A Good Girl
11. Rise Up



             



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