Je constate parfois (souvent en fait) que ma venue au monde au beau milieu des années 80 m’a injustement écarté d’une bonne partie du développement de la scène Hard/Metal, qui explosa littéralement à ce moment-là, et en particulier de l’âge d’or du Hair Metal et de l’A.O.R. Je repense aux B.O. extraordinaires de cette époque, celle de "Top Gun" (CHEAP TRICK, LOVERBOY, STEVE STEVENS) ou de "Aigle De Fer" (KING KOBRA, QUEEN, DIO) sur lesquelles on pouvait chanter à tue-tête des hymnes ultra radiophoniques gorgés de feeling et de grosses guitares. Cette branche pop du Hard Rock a vu pléthore de formations plus ou moins intéressantes s’essayer à cette musique extrêmement lucrative appuyée et vendue en masse aux Américains par MTV. Et le problème dans ce genre de configuration, c’est que des musiciens méritants et talentueux se font doubler par d’autres ou bien sont fondus dans la masse des clones de BON JOVI. Je pense à TESLA, HAREM SCAREM entre autres et à NELSON.

NELSON que j’ai découvert justement en me documentant toujours un peu plus sur la scène Hard FM, vient s’ajouter à la liste des groupes talentueux n’ayant connu qu’un petit succès, "(Cant’ Live Without Your) Love And Affection" se hissant tout de même au sommet du Billboard. NELSON est le groupe des deux jumeaux Matthew et Gunnar NELSON, deux gueules d’ange à la longue crinière blonde. Donc côté look, OK ça assure. Côté musique ? Il faut préciser que les deux frangins NELSON sont des enfants de la balle, leur père n’étant autre que Ricky NELSON, songwriter et acteur ayant connu un grand succès au cours des années 60 et 70 et leur mère est également actrice et peintre. Ricky NELSON étant lui-même le fils de Harriet et Ozzy NELSON ayant connu le succès dans une émission qui fut précurseur de la série « The Osbournes » que nous connaissons mieux. Donc d’entrée, on n’a pas affaire à une bande de guignols trainant sur Sunset Strip. On pensera davantage à MR BIG sans le paramètre super-groupe de virtuoses.

Les deux frangins Matthew et Gunnar chantent et même plutôt bien. Multi-instrumentistes (Gunnar s’est même mis à la batterie depuis), ils gèrent avec autant d’aisance la six-cordes (et la douze), la basse et les chœurs qui d’emblée les différencient quelque peu de la masse. En effet, les harmonies vocales sont omniprésentes et pas uniquement pour scander les refrains, qui au passage ne manquent pas d’efficacité. D’ailleurs, excepté le batteur Bobby Rock (quel pseudo me direz-vous), tout le monde contribue aux chœurs et donne une plus grande dimension à "Everywhere I Go" ou à "I Can Hardly Wait", privilégiant les harmonies à trois voix plus amples. La guitare n’est pas en reste et l’acoustique sait faire sa place pour porter "(Can’t Live Without Your) Love And Affection" ou "More Than Ever" mais on peut apprécier la qualité de jeu et de son de celle-ci sur "Tracy’s Song" débordante de feeling. La guitare électrique n’est pas en reste, tantôt crunchy et chaude ("I Can Hardly Wait"), tantôt bien saturée et agressive (ce terme restant relatif vu le style pratiqué). Les soli, bien que peu marquants, sont joués avec feeling et caressent subtilement nos oreilles.

Niveau stylistique, la palette est là aussi assez large. Si la cohérence de cet "After The Rain" est assurée par les éléments que je viens de développer, NELSON varie les plaisirs. Il y a la ballade de rigueur en milieu d’album "Only Time Will Tell" très réussie. Le chant tout en nuances des frères NELSON développe ce titre avec finesse, faisant oublier les ficelles un peu grosses de ce genre de titre typique des compositions FM des années 80. On se délectera au moins tout autant du mid-tempo "After The Rain" très BON JOVIen, du boogie endiablé de "(It’s Just) Desire" (proche de MR BIG dans l’esprit) ou du massif mais enjoué "Will You Love Me?" qui rappelle le travail de NIGHT RANGER. Le groove a son importance chez NELSON, et "I Can Hardly Wait" ou encore "More Than Ever" viennent nous le rappeler.

La qualité de jeu et de la production sont assez représentatifs du début des années 90 et des groupes que je cite en référence (MR BIG, TESLA, HAREM SCAREM dont il est le plus proche), plus organiques et moins gavés de batteries électroniques et autres synthés dégoulinants. Ces derniers sont d’ailleurs utilisés avec parcimonie et élégance (à l’image de GARY MOORE) et c’est un vrai plaisir d’écouter un vrai piano sur l’interlude qui précède "Everywhere I Go". NELSON a sur ce premier opus une particularité qui est l’utilisation simultanée des voix des deux frangins et une production rendant justice à leurs réelles qualités musicales même si je suis assez certain que leur gémellité a eu des répercussions non-négligeables sur le visuel en concert. Toutefois, si la variété de ce disque le rend extrêmement agréable faisant que "After The Rain" squatte assez souvent sur la platine, il sera difficile de le voir dépasser les WHITESNAKE, MR BIG ou DAMN YANKEES de la même époque, à la personnalité plus marquée et qui tiennent mieux sur la longueur. NELSON reste cependant à classer parmi les très bonnes formations Hard FM (celles où ça joue grave) et la qualité de son premier opus est nettement enviable.

Un GROS 3/5