Je suis toujours impressionné par la quantité de petits groupes français qui tentent de percer et dont personne n'a jamais entendu parler. Quand on part de rien ou presque, c'est toujours très difficile de faire vivre son projet artistique, surtout quand il s'inscrit à contre-courant des modes ambiantes. Je vais donc vous parler au travers de cette chronique de RAKEL TRAXX, un groupe de Glam Metal marseillais... ! Eh oui, parfaitement, un groupe en provenance directe du plus grand port de France, de la capitale de la pétanque et de l'accent de Marcel Pagnol ! Pas grand-chose à voir avec les prouesses californiennes de MÖTLEY CRÜE me direz-vous... Pas si sûr.

RAKEL TRAXX se revendique comme un groupe « Sleaze Glam » mélangeant Punk et Metal au gré d'un hommage à la scène Glam de Los Angeles des années 1980. Auteur d'un premier EP paru en 2008, le jeune combo se prévaut également d'avoir assuré la première partie de groupes aussi prestigieux que PRETTY BOY FLOYD et HARDCORE SUPERSTAR. Un rapide coup d’œil sur leurs photos promotionnelles suffit à nous rassurer sur les intentions : le chanteur pose comme Paul STANLEY dans sa période Glam et le bassiste met en avant son impressionnante masse capillaire blonde directement pompée sur le look de Lexxi Foxxx, le quatre-cordiste de STEEL PANTHER. Pas de doutes possibles les enfants, ça va sleazer.

Produit par le petit label Shotgun Generation qui a déjà sous sa coupe les groupes SUCKERSTARZ et AESTHESIA, "Bitches Palace" est donc le premier album du combo marseillais. Et autant vous dire que dès le premier titre, ça dépote. Pas de temps morts, pas de petites finesses additionnelles : que du pure fucking rock'n'roll à fond la caisse ! La batterie impose un rythme soutenu et haletant, les guitares sont à la fête et le chant, indéniablement Glam, évoque pas mal les performances vocales de Vince NEIL. Et croyez-moi, sur parole, c'est délectable à souhait !

Comme dit précédemment, RAKEL TRAXX revendique des influences Punk et Metal. Eh bien effectivement, sa musique me semble être un bon compromis entre la musique de MÖTLEY CRÜE et celle de THE OFFSPRING : 54 minutes de trucs bien pêchus, avec des guitares gargantuesques se fendant parfois de quelques prouesses technique à la IRON MAIDEN, une ambiance légère enthousiasmante et un paquet de bonnes mélodies imprimées sitôt entendues. Le groupe campe dans ce registre à une exception notable : la power-ballade "Try Again", sans doute l'effort de composition le plus ambitieux de l'album. Vraiment très bien foutue, sentimentale sans être mièvre et tout en restant vindicativement rock'n'roll. Le refrain est digne des meilleurs moments de CINDERELLA. Ca fait quand-même rudement plaisir de voir que des compatriotes sont capables de se prévaloir d'un potentiel pareil : ça ne marchera sûrement pas chez nous, mais y'a de quoi séduire les auditeurs scandinaves qui raffolent de ce genre de sucreries !

Alors bien entendu, si "Bitches Palace" est un album très encourageant, il souffre aussi de plusieurs défauts. Premier album et groupe débutant oblige, les titres proposés sont parfois brouillons : certains passages manquent de finition, ou on surprend des transitions un peu maladroites. Et puis franchement, 54 minutes dans ce genre musical, c'est vraiment trop. Une set-liste plus resserrée et une durée raccourcie d'un quart d'heure auraient sûrement permis de mieux travailler les morceaux, de leur donner cette consistance supplémentaire dont ils ont souvent besoin. Je pointerai également du doigt un mixage trop minimaliste, qui ne rend pas hommage à la puissance et à l,énergie délivrée par RAKEL TRAXX. C'est souvent frustrant, mais je peux comprendre qu'avec le peu de moyens financiers à leur disposition, nos marseillais ne peuvent sûrement pas s'offrir quelque chose de mieux. Et je ferai enfin deux ultimes reproches : les chœurs ne sont pas suffisamment mis en valeur et, surtout, le batteur abuse d'une espèce de cymbale crash rythmique qui produit des sonorités proprement insupportables, ajoutant à l'impression de bordel qui prédomine sur certains passages instrumentaux. Je ne peux que l'encourager à régler ce problème au plus vite, parce qu'en dehors de ça, le niveau technique place la barre très haut et on sent que les zikos sont prêt à se dépasser.

Ces quelques errements propres aux jeunes groupes en devenir ne doivent cependant pas nous faire perdre de vue la qualité intrinsèque de "Bitches Palace" qui, pour un premier album, est un excellent coup d'envoi. Pour être honnête, il m'a plus convaincu que le dernier BLACK RAIN. C'est un album sincère, direct, sur lequel on ressent un énorme appétit de la part d'un groupe qui a fait le pari de donner le meilleur de lui-même. Ce très bon premier effort doit les inciter à continuer, on attend avec impatience leur prochain méfait et on a hâte de les voir sur scène !

Trois grosses étoiles bien méritées.