Si on devait s’arrêter aux pochettes, y a pas mal d’albums qu’on n’écouterait jamais. Déjà parce qu’on aurait trop honte, ensuite parce que c’est juste trop débile. Voyez cette cover du premier album de MORTAL SIN : cette espèce de démon géant (probablement dessiné par un élève de 3ème) qui piétine une ville, en prenant un peu de hauteur, c’est juste nul, non ? Si on remet en perspective cet artwork approximatif avec le titre de l’album "Mayhemic Destruction" (titre qui ne veut pas dire grand-chose) et le nom du groupe « Péché Mortel », ce mélange de "Godzilla feat. Apocalypse" est affligeant. Et absurde. Débile. Vraiment moche.

Et bin, j’assume.

MORTAL SIN, ça tue. Ça tue dans le sens "slayerien" du terme, dans le contexte du « Thrash since 1986 », avec des poils et du cuir qui sent la bête. Un peu Speed, dense, sans violence exagérée, un rien crasseux mais toujours guidé par cette volonté de projeter du riff en fusion dans une autre sphère, un autre univers où l’intensité maligne est le dénominateur de toute entreprise.

Alors le groupe y va et de bon cœur. Son Thrash occupe l’espace. Une bouillie sonore de laquelle émerge une lointaine double pédale, une basse qu’on tente d’étouffer, des lignes de chant qui se perdent dans un angoissant vide et des riffs typiques du Thrash antique ("Lebanon"). Des riffs qu’on martèle, qu’on tricote et déroule inlassablement, jusqu’à la corde ("Liar"). Le groupe donne l’impression de vouloir vous les faire rentrer de force dans le crâne. Les soli abominables (dans la plus pure tradition slayerienne) jouent le rôle de transition maladroite, avant la reprise des hostilités, avant le repiquage du même riff qui avait failli vous assommer juste avant. Pour être bien sûr que vous ayez bien compris votre douleur.

Chaque titre de "Mahyemic Destruction" est de fait une épreuve en soi, un inextricable canevas Thrash qui agit comme autant de coup de boutoirs derrière la nuque.

Étrangement, même si on trouve ce foutoir fondamentalement médiocre, on ne peut se résoudre à en arrêter l’écoute. En ce sens, MORTAL SIN réussit son coup. A force de martèlements, de vociférations et autres grondements dans la plus pure tradition d’un Thrash oublié ; vous vous êtes faits hypnotiser.

Ce « True » Thrash ne saura ravir qu’une minorité, une élite de débiles en somme, le genre qui peut se repaître de cette absence de génie pour se contenter de cette authenticité poisseuse. Cette authenticité du genre qui nous renvoie à l’esprit même du Thrash, à ce Metal qui « bastonne » et rien d’autre. Sans même se soucier de ressembler à METALLICA ou SLAYER. Un Thrash qui sent juste la besogne et la bonne volonté. Avec pour seule envie de revenir à l’essence même du genre, dans sa nullité merveilleuse et son animalité inhérente.

"Mahyemic Destruction" fait partie de ces albums qu’il est difficile d’écouter en entier pour une oreille non apprivoisée, de ces albums de 8 titres à la fois imbittables et magnifiques pour même pas 40 minutes qui semblent peser une éternité. Il rentre dans cette caste des albums de Thrash logiquement mésestimés, ces albums qui ne s’échangent qu’entre amateurs psychopathes, qui ne peut se comprendre qu’entourer de cette complicité des dingues qui peuvent citer plus de 200 albums de Thrash différents.

Donc je le recommande, mais pas à tout le monde.


Note : 3/5.

A écouter : L’enchainement de "The Curse" sur "Women In Leather".
C'est horripilant : "Blood, Death, Hatred".