SOUNDGARDEN revient mais prend magistralement son temps, séparé depuis 1997 pour cause de divergences artistiques, principalement entre Cornell et Thayil. En effet, comme le chanteur tenta de le prouver avec sa carrière solo, sa volonté était de s’éloigner des grosses guitares pourtant la marque de fabrique du groupe. Le succès n’étant pas au rendez-vous, nous tenterons d’oublier l’opportunisme de l’All Star Band qu’est AUDIOSLAVE.
A la surprise générale, le 1er janvier 2010, Cornell annonce via son compte Twitter que SOUNDGARDEN se reforme après douze années de séparation. Depuis, très peu de nouvelles et autant de concerts. C'est-à-dire un show quasi privé donné au Showbox at the Market en avril à Seattle sous le nom NUDEDRAGONS (anagramme de SOUNDGARDEN) puis deux autres en août à Chicago dont l’un dans le cadre du festival LOLLAPALOOZA. Rien sur le vieux continent. Cornell, ayant habité la capitale française, aurait pu se fendre d’une surprise.

A moins de deux mois de l’anniversaire de l’annonce de cette reformation, une double compilation des quatre de Seattle voit le jour, elle répond au doux nom de "Telephantasm" et son but doit être de faire passer le temps en attendant le nouveau matériel studio. Ce "Telephantasm" fait directement suite à une autre compilation "A Side" sortie en 1997. Ce disque s’ouvrait et se clôturait par deux originalités. Le titre "Nothing To Say" issu de leur premier maxi "Sceaming Life" (1987) et "Bleed Together" chute de studio de leur dernier album studio "Down On The Upside" (1996). Ce dernier étant l’unique raison de s’offrir ce "best of" pour le fan absolu. Quoique, celui-ci fût aussi le titre qui accompagna le single "Burden In My Hand". Du fond de tiroir en somme.

Formé en 1984, SOUNDGARDEN franchit pas à pas les marches de la notoriété : il vend 8 millions de disques aux États-Unis et environ 20 millions d'albums à travers le monde. Sa signature chez A&M Records leur permettant une représentation médiatique à la hauteur de leur talent. Personne n’aura oublié le single "Black Hole Sun" vendu à 3 millions d’exemplaires et qui leur permis en 1995 de remporter un Grammy Award. Cet incontournable figure évidemment sur la compile dans sa version originale. "Big Dumb Sex" le titre de SOUNDGARDEN que GUNS N’ ROSES a aidé à faire connaître grâce à son "The Spaghetti Incident?", album de reprises rétros ou ce titre côtoyait celui de T-REX, "Buick Makane".

Deux galettes donc pour illustrer ce "Telephantasm" et pour ne pas trop ressembler à la précédente. Certains titres ont été choisis dans leur version live pour y figurer. "Flower" dans sa version BBC Session et l’incontournable "Jesus Christ Pose" ou "Blow Up The Outside World" tirée du MTV Live’n Loud. Il n’y a que du bon, rien n’est à jeter mais ca ne s’adresse pas aux fans existants, si ce n’est pour se moquer d’eux avec le seul vrai inédit consistant, "Black Rain", issu des sessions de "Badmotorfinger(1991)". On pourra noter la présence de perles à redécouvrir d’urgence comme "Slaves And Bulldozers" ou regretter l’absence de son titre préféré (en l’occurrence pour ma part "The Day I Tried To Live"). N’empêche qu’elle est bien foutue cette compile mais qu’elle ne sert à rien.

Concernant le visuel, il faut avouer que SOUNDGARDEN ne nous a jamais habitué à de jolies pochettes. Cette fois un effort a été fait, le paysage apocalyptique sur fond vert est plutôt léché. Je ne m’explique cependant toujours pas l’irruption redondante de ce chien moche. M’enfin, cela reste un détail.
SOUNDGARDEN est une pierre angulaire du Hard Rock 90’s. Le grunge n’étant pas un mouvement musical mais un argument marketing ou au mieux une scène d’influences disparates issues du même secteur géographique, en l’occurrence Seattle. Œuvrant dans une veine punk à ses débuts (pour les albums "Ultramega Ok" (1988) et "Louder Than Love" (1989) survolant des sonorités metal grâce à "Badmotorfinger" avant de tirer leur référence en dévoilant une approche 70’s de leur musique ("Superunknow" (1994) et "Down On The Upside"). Un début de carrière sous le signe d’influences comme BLACK SABBATH et LED ZEPPELIN, tout en possédant un son unique, la marque des Grands. La seconde ère du groupe que l’on attend de pied ferme, soulève quelques inquiétudes qui ne viennent pas de l’impeccable section rythmique (Shepherd/Cameron) mais du charismatique leader Cornell, qui depuis bien trop longtemps ne nous a plus habitué à pousser de la voix (cf : "You Know My Name" titre illustrant le "Casino Royale" du célèbre espion britannique). Thayil quant à lui est attendu au tournant, on a envie d’aimer ses futurs riffs vicieux, l’attente aussi longue soit elle n’empêchera pas le joug de tomber. On croise les doigts pour que ce retour ne soit pas orchestré sous le signe de la sacro sainte rentabilité. Spécialité américaine qui a tué plus d’un groupe. Ne déprimons pas, restons positifs mais néanmoins alertes.

Cette compilation tient la route mais ne mérite qu’un 1,5/5 puisque la manœuvre commerciale est trop grossière. Cependant, le DVD de 20 clips qui accompagne la série limitée de l’objet vaut quant à elle tout intérêt, ainsi cet objet, plus que l’édition normale vaut un bon 3/5. Maintenant, il reste à SOUNDGARDEN à écrire un nouveau pan de son Histoire, que l’on souhaite à hauteur de nos espérances.