RIGER est de retour, et tout le monde s’en fout.

L’orage, le sang, la débauche, l’indifférence.
Tout ça il a connu. Le soldat Teuton a toujours été un soldat aigri, avec un cœur qui déborde d’une rage rebelle. Il n’a jamais fait briller mille feux, il n’est jamais parti à la bataille avec cette fierté cocasse qu’ont les jeunes guerriers. Il n’a jamais fait que le nécessaire pour survivre et servir son armée. Il n’en apparaît pas moins fatigué. C’était en 2004 qu’il avait pour la dernière fois enfilé sa cotte de maille rouillée, et serré fort dans son poing cette épée courte en fer émoussée et salie.

RIGER est anti-héroïque. Si on a souvent parlé de « guerriers fatigués » dans le cas de groupes qui radottent et deviennent inintéressants au fil des ans (MAANEGARM par exemple), il est ici à prendre comme un compliment. L’essence même de RIGER tient dans le désenchantement, la démystification. RIGER est authentique et fidèle à lui-même, il cherche une pureté belliqueuse sans lyrisme, sans fantasmes épiques surfaits, mais semblant toujours enracinée dans ses origines

Loin de nous les élans d’ENSIFERUM, de TURISAS ou d’autres cadors du Viking Metal abrasif. Les Allemands, même dans leurs affinités intimes avec EINHERJER, ne retiennent quasiment que le côté cru et acharné de la musique des Norvégiens (les premiers albums donc). Dans un Metal acéré entre Black/Death et Viking Metal, sans chœurs, sans flûte, sans claviers, et avec ce son dépouillé mais pourtant si tranchant, les Allemands ressortent leur vieille artillerie. Une artillerie banale, juste un peu plus heavy ici, un peu plus acoustique là, et qui tient toujours le coup des années.

Une telle profession de foi sera à saluer, mais cela nous ramènera toujours aux mêmes problèmes d’avant : une voix death râclée pas esthétique pour le moins du monde, et un songwriting certes pointilleux mais qui n’a pas encore la personnalité des Grands (j’aimerais un jour pouvoir dire un riff « A la RIGER », boudiou !). "Albrandhofer" et "Streyf" ouvrent et clos l’album, des morceaux qui résument à eux seuls tout ce que RIGER s’est tué à faire depuis sa création, avec une émotion viscérale portée à un niveau déjà bien haut. Entre les deux, on trouve des morceaux moins enthousiasmants à la pelle. Moins enthousiasmants, mais loin d’être mauvais.

"Streyf", c’est quelque chose d’électrique, d’authentique, d’hérétique.

Et le guerrier allemand, loin de la première ligne, avec sa vieille épée familiale, reste peut-être frustré de n’avoir jamais accompli d’exploit. Il mourra sans doute comme ça, sans la gloire mordante de certains de ses pairs. Mais une renommée n’étant pas toujours si facile à porter et à défendre, peut-être que rester dans l’ombre lui suffira.