L'Espagne, ainsi que le Portugal, regorge, à l'instar du continent sud-américain, de formations des plus obscures et underground en matière de metal extrême et notamment en matière de Black Metal. Je crois que ce pan sud-américain a encore beaucoup à démontrer, tout comme celui du Proche et Moyen-Orient (l'Est européen est désormais bien défriché). Bref, on revient à l'Espagne, car Uruk-Hai vient de là-bas [leur nom fait référence à l'oeuvre de Tolkien, mais aussi au second groupe de Vikernes (Burzum)]. Sorti de nulle part en 1999 (en fait, de la capitale), Uruk-Hai s'est rapidement fait remarquer des maniacs, d'une part de par son nom, mais aussi de par son Black Metal poisseux et franchement darkthronien, avec sa production de garage, crachotante. Généralement, les copistes ne sont pas trop mon truc, mais je dirais qu'Uruk-Hai défend avec talent et fierté la tradition et m'a séduit, notamment lors de l'écoute de ce superbe E.P sorti en 2001 chez Battlefields Records. A noter, qu'Obscure Abhorrence Productions l'a réédité en 2004 en lui adjoignant les deux titres de leur unique démo de 1999.

Si l'on ressent l'influence de Darkthrone, et si Uruk-Hai pratique un Black Metal si ce n'est darkthronien, du moins à la norvégienne, il n'en demeure pas moins qu'il possède une véritable personnalité et dégage une atmosphère totalement ténébreuse, à l'épaisseur suffocante digne du souffle enflammé du Dragon... Le Black Metal des Ibères est organique, chaud et infernal, rappelant l'excellente formation danoise Blodfest ou bien encore le culte one-man-band espagnol Akerbeltz. Les lignes de guitares sont tranchantes, la basse sauce tout ça grassement, la batterie fonce à toute allure et la voix d'outre-tombe de Crom rehausse de noirceur ces quelques titres fabuleux nous replongeant dans le passé et l'imaginaire démoniaque des adorateurs de cette musique violente et bestiale... Le même pas quart d'heure de musique est vite passé, mais l'on a le sentiment de s'être fait marteler l'esprit, lui-même empoigné avec violence, dès l'intro dépassée. Une grande haine explose alors dans les oreilles, accompagnée d'une douleur et d'une souffrance non feinte, palpable grâce à ces accords de guitares tant enragées que lancinantes... Pourtant, le milieu d' « El Monte de Las Animas » fait place à un passage plus rêveur, plus « Pagan » dans le style et qui remet l'ensemble sur la route de la haine. La piste éponyme qui la suit est elle plus démoniaque, un peu plus pesante, moins véloce, imposant une ambiance lourde et chargé de rancœur et de désespoir. On se trouve comme pris à la gorge. La voix granuleuse de Crom fait mal au ventre. Les guitares se font mélancoliques. Des visions macabres dansent devant les yeux. La nuit tombe, le soleil est perdu à jamais... Terrible track ! Enfin, avant l'outro (avec l'intro, ce sont deux plages d'accords de guitare acoustique), la tempête se déchaîne sur le titre de « From the Iberian Winter Lands ». Celui-ci met les bouchées doubles et fracasse le crâne contre le mur avec son front de cordes sâturées et sa batterie supersonique. Un peu comme si l'on vous tirait par le col au détour d'une ruelle pour vous démolir le visage. Un peu comme si vous voyez de vos yeux l'Enfer. Si vous appréciez « Battles in the North » d'Immortal, vous visualiserez un peu de quoi je veux parler...

Une longue traversée des Enfers en somme que ce mini-disque, enfanté « In the Side of Eternal Eclipse ». Un des meilleurs formats du genre. Un très bon exemple du Black Metal pur et dur. Un bon achat pour les amateurs de Black Metal infernal.