HATE FOREST est mort, vive BLOOD OF KINGU. Ce dernier projet du sombre Roman Saenko s'analyse de très simple manière. Du HATE FOREST version classique (abandonnons-nous donc les espoirs épiques engendrés par "Battlefields") légèrement saupoudré d'une pointe de tribal. Un saupoudrage qui peine à se mêler à cette nouvelle plâtrée à forte teneur en calories livrée par l'est ukrainien. Explication en deux temps :

Peu de choses à dire sur une rythmique qui reprend la sauce "Purity" ou "Sorrow" sans en changer le moindre ingrédient. Chargées de graves pesantes et délicieusement rondes, peu enclines aux respirations, la basse et la batterie se déchargent comme des salopes. Enfin, des salopes respectueuses de l'office et toujours aussi expertes. Une caisse claire au son particulièrement métallique et indélicat, des cymbales présentes mais timides, une double grosse caisse surchauffée, quatre cordes invasives, je vous le dis, je vous le répète, on tient ici la formule HATE FOREST sans modification aucune. Un peu plus de percussions acoustiques (histoire de faire tribal, justement) ? Moué.
Pour les guitares, là encore, on baigne dans le même jus mi-black mi-death 100% gros bras auquel nous a habitué la première création de Roman Saenko. On s'attardera à peine sur quelques ponts et de brefs instants à la distorsion gorgée d'effets qu'on dira différents. Non, BLOOD OF KINGU, pour le moment, c'est du HATE FOREST et seulement du HATE FOREST.
La voix maintenant. Ouuuuuuais ! Enfin, ouf, putain, il était temps. Bonheur joie plaisir bisous love tendresse, on y est ! En voilà de la différence, de la vraie, de la grosse et grasse qui fait mal aux jambes ! Oui euh, calmons-nous quand même. Car la voix, après courte réflexion, on la cherche un peu. C'est même assez drôle de constater qu'une attention un brin volatile nous ferait l'oublier et penser qu'on est toujours bien paumé dans la sinistre forêt de la haine (Défis Fantastiques 47, par Steve Jackson et Ian Livingstone, éd : Folio Junior). Sans paroles, tiens. Car, en fait de chant, BLOOD OF KINGU nous gratifie de rares grommellements que je qualifierai de shamaniques afin de coller à l'esprit de l'album (sans y croire plus que ça). Rares mais utiles car sans eux, on aurait droit à un vulgaire copier-coller d'on sait qui.

Et maintenant, les intermèdes exotiques. Exotiques car l'auditeur est supposé tremper dans un bain égypto-sumérien. Ça commence fort mal puisque "Incoarika Incognita" nous rappelle le folklore…ukrainien. Instruments similaires (euphémisme léger afin de faire croire en un véritable effort de recherche de la part du groupe, ou one man's band, je ne sais trop), climat plus qu'approchant. Et sinon ? Bah, deux courtes démonstrations de tablâ qui n'apportent pas grand-chose en termes d'atmosphère et à l'intérêt évidemment mille fois inférieur à un disque de Zakir Hussain (pour ne citer que le plus connu des percussionnistes indiens).

Tout est dit et bien compris, BLOOD OF KINGU a pour l'instant du mal à exister, accablé par l'ombre de son glorieux prédécesseur. Il en fallait plus (plus d'originalité, plus d'inventivité, un concept plus travaillé) pour en faire un groupe à suivre autrement qu'en pointillés. Alors, on se contentera d'attendre la suite du coin de l'œil, au cas où. Mais pour l'heure, BLOOD OF KINGU ne ravira que les fanatiques boulimiques de HATE FOREST. C'est déjà bien, me direz-vous ? Peut-être, peut-être.