Les membres de SAVATAGE ne pensaient pas avoir la chance d'enregistrer un jour un deuxième opus alors être repérés par une maison de disques de la trempe d'Atlantic Records vous pensez…
Pris en charge par un management qui fait les choses bien, le groupe est envoyé dans le studio de Todd Rundgren (connu notamment pour ses collaborations avec Jim Steinman, MEAT LOAF ou encore Bonnie TYLER, véritable star à cette époque) sous la houlette de Max Norman, qui a largement fait ses preuves en produisant les fabuleux premiers albums solo d'Ozzy OSBOURNE. Dans un environnement montagnard et calme, le groupe peut se focaliser uniquement sur sa musique, loin de toutes les distractions qui viendront par la suite pourrir la santé de Jon Oliva.

Porté par une maison de disques qui laisse les coudées franches à son poulain, SAVATAGE ne va pas pour autant bouleverser la procédure de son premier opus et enregistrer en conditions live une fois de plus, overdubbant les soli et le chant. Toutefois le niveau de Keith Collins, malgré un investissement certain dans l'écriture, semble poser problème et les frères Oliva devront eux-mêmes ré-enregistrer certains passages pour corriger les approximations du quatre-cordiste, ce qui conduira à son éviction du groupe. De plus le jeu au médiator manque de raffinement aux oreilles de Criss, ce qui sera un bon point pour le successeur de Keith. Apprenant beaucoup de son producteur, SAVATAGE peaufine cependant beaucoup plus en détail ses compositions, ce qui les rend encore plus percutantes… Quand le songwriting est au niveau.

Car le plus gros problème de "Power Of The Night', c'est sa face B franchement pas terrible et dont seul "Stuck On You" et "Skull Session" (et sa rythmique galopante) réchappent sans trop de dommages. Elle montre surtout une forme d'adoucissement de la musique des Américains qui atteindra son paroxysme sur "Fight For The Rock". Les disques inégaux seront hélas légion dans la discographie de SAVATAGE mais ici, si "Power Of The Night" et ses claviers lugubres, "Warriors", "Necrophilia" et "Washed Out" (sorte de brouillon de "White Witch") s'en sortent et mettent en valeur la plus-value apportée par Max Norman, le groupe ne parvient pas à enfoncer le clou après un "Sirens" plus réussi. "Unusual" et ses claviers est loin d'être inintéressante aussi, assez proche de "The Dungeons Are Calling" dans l'esprit. Mais il n'y a ici que peu de mélodies qui restent en tête, et le riffing est un peu plus convenu, ne mettant pas en valeur les qualités de Criss Oliva, dont les soli overdubbés sonnent un peu étouffés tout au long du disque.

Pour couronner le tout, comme tout jeune qui n'en fait qu'à sa tête, le groupe s'offre le luxe de refuser une vidéo car cela l'aurait obligé à rebaptiser l'un de ses titres ("Hard To Love" que le label voyait mieux en un "Hot For Love" plus vendeur) ce qui le coupe d'une forme d'exposition supplémentaire, même si on voit mal comment le groupe aurait pu obtenir un succès comparable à un "Mr Crowley" ou un "Crazy Train" avec le matériel enregistré pour "Power Of The Night", sorte de "Sirens" aseptisé. Devant les ventes modestes de cet opus, Atlantic Records, qui aura bien flairé le talent de songwriter prolifique de Jon Oliva, lui proposera d'écrire pour d'autres artistes comme John Waite, avant de se raviser, mais ça c'est une autre histoire.