SATAN vs BLITZKRIEG, telle était l’affiche du combat Heavy Metal de la rentrée 2024. Plus qu’un affrontement fratricide entre deux légendes de la NWOBHM, c’est aussi un duel masochiste entre Brian Ross et lui-même. Que s’est-il passé dans la tête des gérants de Metal Blade Records (SATAN) et surtout du petit label danois Mighty Music (BLITZKRIEG) pour penser que c’était une bonne idée que de publier à une semaine d’intervalle ces deux albums ? La force de frappe du label de Brian Slagel a surtout eu pour conséquence d’invisibiliser un peu plus la sortie du BLITZKRIEG qui donne le sentiment de n’être devenu qu’un projet secondaire pour le chanteur de SATAN. De l’aveu même de Brian Ross, cette situation n’est pas idéale.

Pourtant, si avec le médiocre "Back From Hell" et le à peine meilleur "Judge Not!" on comprend aisément pourquoi SATAN a définitivement pris le pas sur BLITZKRIEG, il se pourrait bien que la situation s’inverse avec ce nouvel album dont l’absence de titre peut laisser penser que Ross y voit ici l’opus définitif de sa formation de coeur. Après tout, s’il s’évertue à maintenir vivant depuis le début des 90s cette entité, malgré des changements incessants de line-up, c’est qu'il y croit toujours. Il semble qu’il ait bien raison au vu de la qualité de son excellent single, "The Spider". Une véritable pépite de Heavy Metal old school ! Le titre respecte les canons du genre et ne propose donc rien de révolutionnaire, mais il y a cette fameuse accroche qui fonctionne ici à plein régime. Oui, on peut parler d’un nouveau classique pour le groupe et comme moi vous allez chanter dans votre tête "I see the spider in my dreams" après avoir écouté ce titre, tant pis pour les arachnophobes.

Cependant, BLITZKRIEG nous a déjà fait le coup par le passé de proposer un titre au-dessus du lot en guise de cache-misère. Heureusement, ce ne sera pas le cas ici. Si "The Spider" reste le morceau que l’on retiendra en priorité, il est rassurant de constater que le reste de l’album est largement à la hauteur. Car le groupe a manifestement pas mal de bonnes idées, tant du point de vue musical que textuel. Il propose ainsi un brassage de thématiques bigarrées qui insuffle l’inspiration nécessaire pour produire un album de Heavy qui n’a rien de la linéarité qui est le fléau de nombre d’albums de Metal. La démarche est similaire à celle d’un SAXON, on retrouve d’ailleurs avec "If I Told You" une thématique très proche du puissant "There’s Something In Roswell" qui donnait son efficacité au "Hell Fire And Damnation" de la bande à Biff, sauf qu’à mon sens BLITZKRIEG fournit un album plus qualitatif et homogène.

Chaque titre se distingue du précédent. De plus, on se surprend à se pencher sur les paroles. "Dragon’s Eye" notamment, est un hommage à Ronnie James Dio, c’est lui le dragon, et il ne sera jamais oublié. "I Am His Voice" surprend avec son texte engagé… contre la chasse à courre ! On n’oublie pas non plus les univers pulp avec l’hommage à Michael Myers au travers de "The Night He Came Home", qui reprend en son cœur le fameux thème composé par John Carpenter, c’est un peu facile certes mais c’est tellement efficace.

Là où le groupe se montre malin c’est dans sa capacité à apporter des petites idées musicales qui rehaussent l’intérêt des morceaux. "Vertigo" n’aurait pu être qu’un simple titre de remplissage sans consistance si ce n’était ce refrain à la ligne de chant surprenante qui donne le vertige. L’usage parcimonieux et judicieux de chœurs donne l’emphase que l’on est en droit d’attendre d’eux. Notons également la grande fluidité des solos de Nick Jennison, nouvelle recrue, qui n’est certainement pas pour rien dans la qualité des compositions, il est même crédité à la production. Il est évident que le groupe n’a jamais eu un guitariste aussi talentueux dans ses rangs. Même Brian Ross, dont les lignes de chant peuvent lasser chez SATAN, semble ici bien plus à son aise, comme si tout était plus naturel pour lui chez BLITZKRIEG.

Cet album a effectivement toute légitimité à se vouloir éponyme. Tout simplement car il est certainement le meilleur produit par le groupe depuis l’indétrônable "Time Of Changes".