Amusant comme la pochette de cet album d'ADX fait écho au chaos politique que nous vivons au moment où j'écris cette chronique (juin 2024). Même le titre de l'album est à l'avenant. Le visage du roitelet, c'est ainsi que le désigne Dog, pouvant d'ailleurs rappeler celui de l'actuel président de la république. Ce n'est pas la première fois qu'une pochette d'album a quelque chose de tristement prémonitoire, ce n'est qu'une coïncidence mais ça vaut le coup d'être mentionné. Cependant, si l'idée de cette pochette est excellente, je reste quelque peu réservé sur les proportions du personnage principal, qui a surtout des allures de géant, l'effet de profondeur ne me semble pas totalement abouti. Un résultat visuel un peu bancal donc, cela annonce t'il aussi le contenu de l'album ? Au travers des idées qu'il véhicule et des sensations qu'il veut transmettre "L'Empire Du Crépuscule" apparait réussi, mais la résultat final n'est pas toujours à la hauteur de cette ambition.

Avant d'en examiner le contenu, il est impossible de ne pas évoquer les changements de personnel qui ont de nouveau affecté ADX. Cette fois-ci c'est d'abord Nicklaus Bergen qui s'en est allé, ou qui a plutôt été poussé vers la sortie en raison de son éparpillement artistique (son calendrier avec LOUDBLAST entrait semble t'il en collision avec celui d'ADX). Le voici remplacé par le discret Fred Allanic, qui s'était illustré il y a quelques années avec le groupe de Heavy ARÈS, récemment reformé d'ailleurs. Puis Julien Rousseau a lui aussi quitté le navire pour des raisons géographiques, remplacé par Jules Brosset. Cela a inévitablement des conséquences, car si Dog est le compositeur principal, il devait s'appuyer sur tout le talent de Julien Rousseau, ce dernier se chargeant de retranscrire les riffs imaginés... et joués à la bouche par Dog ! C'est donc Fred Allanic qui reprend le rôle de Julien, et si le style d'ADX ne change pas on note cependant que cet album s'oriente clairement vers un son plus thrashy, avec des compos toujours aussi Speed. Il est probable aussi que le jeu de Néo, grand amateur de Speed/Thrash, ait sans doute influencé cette orientation.

Cet "Empire Du Crépuscule" ne manque pas d'atouts. Il ne faut pas beaucoup d'écoutes pour se dire qu'on tient là un album sans doute meilleur que "Bestial". Les textes déjà, Phil est bien plus inspiré ici, on comprend où il veut en venir et il ne manque pas de bonnes idées tel ce "Septembriseurs" qui évoque des massacres commis par des révolutionnaires dans des prisons, précédant la fameuse Terreur qui a si bien inspiré le groupe par le passé. Ou encore ce "Malgré Nous", évoquant les Alsaciens et Mosellans enrôlés de force dans la Wehrmacht, qui contient par ailleurs un des meilleurs refrains de l'album. Un Phil non seulement inspiré dans ses textes, mais également dans son chant. Lui qui montrait des signes de fatigue sur "Bestial" semble avoir justement repris du poil de la bête, s'appuyant beaucoup sur un registre agressif particulièrement efficace. On sent que le travail en studio a payé.

Ainsi, ADX tient toujours bien son rang de héraut du Speed bleu, blanc et rouge au discours didactique. Même si paradoxalement, c'est quand Phil se tait que le groupe nous adresse son message le plus marquant. L'instrumental "Paris Un 13" qui clôt l'album en nous plongeant dans un climat étouffant de terreur urbaine, est une évocation sordide et implacable des horribles attentats du 13 Novembre qui je l'espère ne seront jamais oubliés. C'est peut-être bien le meilleur morceau de l'album au final.

Car malgré ses qualités, et notamment les efforts déployés par son inédite paire de guitaristes, "L'Empire Du Crépuscule", comme "Non Serviam" en son temps, manque de morceaux qui se détachent vraiment, on ne trouvera pas de nouveau classique ici. Certains refrains se distinguent même par leur pauvreté, voire leur côté franchement agaçant, "Hors Contrôle" notamment ou encore "Tout En Puissance". Le côté peu inspiré du refrain de ce "Tout En Puissance" est d'autant plus dommage que ce titre propose une structure évolutive intéressante, ce qui rappelle un peu certains titres de leur âge d'or. Mais bon voilà, ADX reste loin ici d'atteindre le niveau de ses grands classiques, l'absence totale de riff réellement marquant l'en empêche de toute façon. Enfin, si la production est de meilleure tenue que les albums précédents, la basse de Jules Brosset se fait malheureusement bien moins entendre que celle de Julien Rousseau.
Derrière de beaux atours et notamment un final instrumental apocalyptique très réussi, "L'Empire Du Crépuscule" souffre de sa trop grande homogénéité, de son manque de titres-phare. Il n'en est pas désagréable pour autant, loin de là, entre textes intelligents et la percutance de son Speed, il y a de quoi y trouver son compte.