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BLACK METAL à L\'ITALIENN  |  STUDIO

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1989 Black Mass
1997 Do What Thou Wilt
2013 Resurrection
 

- Membre : Secret Sphere, Archon Angel
 

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DEATH SS - Black Mass (1989)
Par CITIZEN le 9 Mars 2022          Consultée 1405 fois

Des fois il faut commencer par le début. C'est le cas pour DEATH SS, groupe légendaire s'il en est et pour lequel il est quand même plus marrant de lorgner du côté des origines. Près de vingt ans après la chronique de Stef (!), et alors que Zodd a gaspillé son talent à parler de l'alors dernier album du groupe, personne ne s'est penché sur les débuts des Italiens, incroyable ! Au passage j'adore la chronique de Stef, publiée l'année de la mise en ligne de Metal-Archives, où l'on sent que l'accès à l'information était bien plus restreint qu'aujourd'hui. C'était la séquence meta/archéologie numérique/autocongratulation.

Parler des origines de DEATH SS c'est important parce que, au-delà du plaisir de raconter des anecdotes sur le passé bouillonnant d'un groupe qui est à peu près aussi riche en la matière que les rois incontestés de SADISTIK EXEKUTION, c'est également peu ou prou parler des fondations de la non moins riche scène Metal italienne, et de certains des musiciens qui ont posé les bases de ce qui a été le plus joyeusement copié dans toute la péninsule.

Mais c'est aussi et peut-être surtout parler des origines stylistiques du Black Metal : Les DEATH SS étaient là nettement avant VENOM, et même s'ils n’ont pas sorti d’album dans les temps pour être compétitifs, leur découverte alternative du Black Metal est on ne peut plus crédible. Alternative, pas concurrence directe : les suiveurs italiens de VENOM s'appellent BULLDOZER ; DEATH SS se conçoit d'emblée sous des auspices qui lui font envisager une musique sombre sous un angle très différent, le terme employé par le groupe étant celui d’Horror Metal. Là où VENOM ne puise la source de son énergie que dans les groupes les plus rapides et plus puissants possibles, DEATH SS est fondé par un fan d'occultisme précoce qui revendique comme sources d'inspiration premières The SWEET et SLADE ! Basé à Pesaro, Stefano Silvestri conceptualise son groupe très jeune, avec un attirail scénique et théâtral élaboré, avec l'idée de ce line-up aux costumes et aux pseudonymes tirés tout droit des films d'horreurs et comics qui obsèdent son fondateur (une source d'inspiration certes peu originale, mais dont le groupe s'empare d'une manière très premier degré et très jusqu'au-boutiste).

DEATH SS est en effet fondé en 1977 (oldschool as shit) lorsque Steve s'acoquine avec Paolo Catena et que les deux zigues passent un pacte de sang, le second adoptant pour la cause le pseudonyme de Paul Chain (un nom familier ?), le nom choisi pour le groupe étant la rencontre de la Mort incarnée par Paolo et des initiales de Stefano (1). Stefano Silvestri alias donc Steve Sylvester c'est une sorte de Peter Steele italien : ténébreux charismatique (mais sans le côté dépressif) doté d’une vision extrêmement précise de ce qu’il veut pour son groupe et de son univers. Mélangé d’un Dani Filth pour le côté décadent très mis en avant, et sans toutefois l'humour de Peter Steele (et donc également de VENOM) : DEATH SS est un groupe extrêmement premier degré, dont l'imagerie horrifique complète les pratiques occultes auxquelles le groupe s'adonnait sérieusement. Un imaginaire extrêmement daté, mais utilisé avec un sérieux sans faille par un groupe très soucieux de choquer dans sa scène de ville italienne moyenne et peu habituée aux frasques du Rock’N’Roll (Steve lui-même semble d’ailleurs faire preuve d’une certaine amertume quant aux chances de succès inégales dont disposaient les groupes originaires de l’Italie).

Les premières années de DEATH SS (1977-1982) sont donc une suite d'histoires d'orgies rituelles (parfois avec les gens de la haute société locale), de séances de spiritisme, de raids sur tout ce que la région comporte de nécropoles pour récupérer çà et là des os utilisés dans lesdits rituels et sur scène. La bande que Steve parvient à rassembler petit à petit ne rigole pas dans son attitude de mecs les plus evil de leur petite ville, le genre de gars qui se marraient en faisant peur aux grands-mères (2). D'où le curieux mélange de clichés vraiment saisissants comme celui utilisé sur la pochette du premier album, et le florilège de costumes de cirque vraiment kitsch. Ça balance des vers dans le public en concert, ça fornique sur scène (3) et ça boit tellement de sang d'animaux ramenés pour l'occasion que Steve en chope la mononucléose (4), ce qui contribue en partie à la fin du premier round de l'histoire du groupe en 1982 ! A ce moment-là, le groupe est déjà culte et fait l'objet d'une tentative de récupération par une maison de disque qui leur propose, fin 82, de devenir une sorte d'hybride clone de KISS et des ROCKETS. Entre-temps, Steve a mis fin au projet et changé de ville, suite à quoi Paul Chain embarque un autre chanteur et continue d'utiliser le nom du groupe sans le mettre au courant, une formation qui ne durera que deux ans et produira une poignée de chansons (dont on retiendra surtout l’énervée "Inquisitor"). Paul Chain se lancera ensuite dans un nouveau projet avec l'ambition artistique de couper totalement les ponts avec les attributs evil de l'univers DEATH SS : Incipit Paul CHAIN, VIOLET THEATER et ses suites, une autre branche de l'histoire du Metal italien dont DEATH SS aura été la genèse.

En 1987, Steve reprend définitivement le contrôle de son grand-œuvre qui consistera désormais en : lui (chant) et : un tas d'autres mecs autour (en fonction). Les costumes et les pseudonymes imposés pour les guests demeurent, le reste change : Steve a arrêté les pratiques occultes et DEATH SS devient un projet 100% musical. Ce background établi, qu'est-ce que DEATH SS en 1989, année de la sortie du second album d'un groupe reformé et qui profite à fond de son nouveau départ ?
 
C'est un groupe étonnamment moderne ! Parler de "Black Mass", c'est un peu parler de la renaissance du groupe. Les premiers morceaux du groupe, dont la composition était partagée entre Paul Chain et Steve Sylvester, pouvaient véritablement passer pour une approche divergente du Black Metal, avec une focalisation sur une ambiance menaçante et posée, cryptique ; à ce titre, le premier album, qui est composé presque entièrement de morceaux composés en 1977-1982, est une sorte d'aboutissement de cette première période. Sur "Black Mass", tout est beaucoup plus pro et plus facile à cerner : il s'agit d'un Heavy Metal franc du collier quoique très grandiloquent par moments, avec des passages up-tempo limites thrashisants du plus bel effet. Bien que l’album s’ouvre sur trois morceaux anciens, ces versions dépoussiérées sont ébouriffantes, font preuve d’une fulgurance et d’un professionnalisme inattendus.

Professionnel, c’est le mot. DEATH SS est alors plus dans le business du tube et du Glam que dans celui du Metal blafard et desséché qu’il pratiquait naguère : le premier titre, "Kings Of Evil", est un énorme hymne qui engage plus à taper dans les mains qu’à faire surgir des démons grimaçants. Il y encore certes des titres plus bourrins comme "Cursed Mama" ou le vicieux "Devil's Rage", avec son riff tournoyant possédé plus fidèle à l'idée qu'on pourrait se faire d'un groupe de Thrash proto-Black que de celui d’un Toscan costumé. Finalement, bien qu’on puisse relever dans cet album la panoplie intégrale des clichés du BM (voix coassée, orgues, etc.), la plupart des morceaux qui s’efforcent de commencer par poser une ambiance ne peuvent s’empêcher de balancer des riffs entraînants d’inspiration tout sauf glauque, des leads jouissifs ("Cursed Mama") sans parler des soli aventureux qui laissent tomber toute velléité morbide.

L’album permet à Steve de donner également cours à ses aspirations théâtrales, dans son égo trip de maître de cérémonie vampire grandiloquent, sur la deuxième moitié de l’album réservée à des titres plus ambiancés et étoffés. La reprise de Paul Chain est pas mal, essayez d’écouter les deux versions pour apprécier la différence d’approche entre les deux ex-compères : susurrement (se voulant) inquiétant pour Steve, voix de mec foncedé pour Paul. D’ailleurs, dans son bouquin Steve tacle la suite de la carrière "artistiquement confuse" de Paul Chain, pourtant la suite à mon goût montre largement que Paul Chain a gardé le cap, tandis que DEATH SS a complètement pété les plombs après 1991 : l’un dans ses trips toujours plus perchés, toujours plus personnels (quitte à perdre l’auditeur), l’autre toujours plus dans le grand-guignol et dans la confusion stylistique.

Pour finir vite fait sur les deux derniers titres : "In The Darkness" est un titre très posé et très ambiancé, langoureux et lancinant, une petite merveille en soi. Il s’agit d’une version totalement retravaillée d’un morceau qu’on retrouve également sur le "Violet Art Of Improvisation" de Paul CHAIN, qui n’a plus en commun que son thème principal lequel se fait d’ailleurs discret. La version de DEATH SS est beaucoup plus riche et baroque, faisant intervenir des touches de piano et voix plus mélodieuses que jamais ; beaucoup plus accessible aussi, il faut au moins reconnaître à Steve qu’il aime bien se mettre le public dans la poche, on sent limite pointer une tentation de partir en mode power-ballad. À côté Paul Chain est complètement dans son monde.

Et enfin "Black Mass", rien de moins que le titre plus ambitieux de la première trilogie de DEATH SS, fait prendre ici toute son ampleur à la notion d’Horror Metal : illustration sonore d’un rituel morbide, ce morceau est en fait plus une longue outro qui mobilise tous les clichés existants (chuchotements féminins, orgue, bruitages, violons stressants, plus une sorte de bruit de moucheron qui me fait marrer à chaque fois) et comporte une courte section musicale avec harangues pour le coup assez VENOMesques. Point bonus originalité : le petit saxophone qui intervient sur "In The Darkness" et "Black Mass". Allez, citez-moi trois groupes de Metal avec du sax ? (5)

Opus surprenant faisant l’équilibriste entre les débuts intransigeants de DEATH SS et un côté Shock Rock flamboyant complètement assumé, "Black Mass" est pour sûr à découvrir y compris pour des gens que le BM rebute en général, les fans de BM ayant tendance à connaître déjà DEATH SS ne serait-ce que par les groupes qu’ils ont influencé. Ceux qui se trouveront scotchés par les ambiances pourront ensuite remonter la piste des démos et EP sortis au tout début de la carrière du combo, ceux au contraire qui apprécieront l’aspect plus débridé et rentre-dedans ne pourront qu’être bien inspirés d’enchaîner sur "Heavy Demons".

(1) Également hommage au poème "In morte di Carlo Imbonati", d'Alessandro Manzoni.
(2) C'est pas juste une blague, voilà précisément ce que dit Steve dans son bouquin "The Necromancer of Rock, the origins of Death SS 1977-1982" : "What we indulged in was really base behavior, like experiencing every single evil act we could think of […] : we vexed anyone who would look weak to us, like harmless old ladies". Un extrait savoureux que je ne pouvais pas ne pas partager. Malheureusement je peux pas reproduire tout le bouquin ici. Toutes les anecdotes en sont tirées.
(3) Une fois. Mais c'était pas prévu selon l’intéressé, Steve s'est laissé emporter dans le feu de l'action.
(4) Notamment en arrachant la tête de colombes avec les dents : ce que Ozzy a fait une fois sur un malentendu, c'était juste un jeudi soir basique pour Steve.
(5). Moi : 1) SOLEFALD 2) euuuuh 3) c'est pas facile !

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- Steve Sylvester (chant)
- Kurt Templar (guitare)
- Marc Habey (basse)
- Kevin Reynolds (guitare)
- Boris Hunter (batterie)


1. Kings Of Evil
2. Horrible Eyes
3. Cursed Mama
4. Buried Alive
5. Welcome To My Hell
6. Devil's Rage
7. In The Darkness
8. Black Mass



             



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