L’appellation "Metal Symphonique" est souvent abusive. En effet, la grande majorité des groupes qui se réclament de ce genre musical sont essentiellement des groupes de Rock/Metal qui s’accompagnent d’un orchestre, ou qui enrichissent leurs compositions d’éléments pouvant rappeler un orchestre symphonique. L’intention est louable, mais l’étiquette peut être trompeuse. Parlez-en au maestro Uli Jon ROTH, lui qui s’évertue depuis de nombreuses années à créer de véritables symphonies mettant en valeur sa guitare sept-cordes. Il n’y a rien de honteux bien sûr, simplement l’étiquette ne correspond que très rarement au produit. Cette réflexion est née de la lecture du dossier de presse qui accompagne la sortie de "Untold", premier album des Allemands de TIMELESS RAGE. Présenté comme un groupe de Metal Symphonique, alors qu’il n’en est rien. La formation, qui avait publié un premier EP en 2013 avant de devoir cesser les hostilités, faute de combattants, propose un Heavy Metal à tendance Speed, aux influences typiquement européennes, et dans lequel elle infuse en effet des arrangements orchestraux plus ou moins imposants, en fonction des morceaux, et qui se font ainsi la cause de cette appellation frauduleuse. Ce qui ne retire rien à la qualité de la musique ici proposée.

La première bonne surprise de cet album est la présence au micro de Frank Breuninger, chanteur et leader du bien trop rare groupe DARK SKY. Dans un registre medium, bénéficiant d’un timbre très caractéristique, le chanteur apporte ici une identité forte à cet album dont certains morceaux évoquent ainsi naturellement la formation principale du vocaliste. À la manière d’un Bernhard Weiss (AXXIS), Frank Breuninger compense des capacités techniques limitées par un charisme irrésistible et une capacité à se mettre au service des morceaux proposés. Ces derniers, au nombre de huit, s’inscrivent dans la droite lignée d’un Heavy/Power à l’européenne, évoquant parfois un groupe tel que STRATOVARIUS, bien que moins subtil et nuancé. Ce sont bien ici les guitares qui jouent les premiers rôles, épaulées par des arrangements symphoniques souvent bien sentis et audacieux, à l’image du travail réalisé sur un titre tel que "Disunity" dont on retient essentiellement un riff frénétique particulièrement séduisant et un refrain dont l’intensité se voit réhaussée par des parties orchestrales dont la richesse mélodique n’a d’égal que la discrétion. Un morceau brillant.

On peine à ressentir le même intérêt sur l’intégralité de l’album. TIMELESS RAGE navigue dans des eaux sombres, sérieuses, et propose des morceaux d’une grande intensité, cette dernière se voyant renforcé par la prestation vocale du sieur Breuninger. En contrepartie, l’album manque de variété, ce que ne parviennent pas à faire oublier des refrains souvent percutants ("Untold"). Quelques éléments viennent apporter un peu de fraîcheur, notamment en fin d’album, à l’image de vocaux "growlés" sur "2 Elements" ou d’une présence accrue des claviers sur le morceau "Warrior". La multiplication des écoutes ne parvient néanmoins pas à passer outre un ventre mou dommageable en milieu d’album, un morceau tel que "Ocean Twilight" ne parvenant pas à marquer les esprits malgré quelques influences néo-classiques intéressantes.

Bon album de Heavy/Power à l’européenne, "Untold" voit l’audace de TIMELESS RAGE récompensée par la force naturelle de certains morceaux savamment construits. Le propos, souvent redondant, peut par moments évoquer les ambiances des albums récents de DARK SKY ("Far From Home", "Piece Of Heaven") par leur sérieux et leur tendance à voir les orchestrations comme une véritable plus-value et pas seulement comme un gadget permettant d’habiller ses morceaux à peu de frais. Un album à découvrir donc, généreux en bonnes idées, pour les amateurs d’un Heavy "mûr" et réfléchi, intense et dont les paroles, inspirées par la SF, apportent une substance supplémentaire. Si vous aimez STRATO, KAMELOT, vous pouvez tenter votre chance.