L'une des moins bonnes expériences qu'il me soit donné de faire en matière de Metal est de passer subitement d'un morceau à un autre et de tomber sur un riff ou une succession d'accords de guitare strictement identiques, tant et si bien que cela donne l'impression d'avoir affaire au même morceau, juste placé un peu plus loin dans la tracklist. Cela suscite tout bonnement la sensation que l'artiste que j'écoute se fout sévèrement de ma gueule et qu'il tente de cacher son manque de créativité ou sa fainéantise en dispersant ses compositions les plus similaires à différents endroits histoire qu'on n'y voie que du feu.

Voyez-vous, c'est ce qui m'est arrivé à l'écoute de l'album éponyme de NEAERA, groupe de Death Mélodique allemand lorgnant fortement vers le Metalcore, eu égard aux vocaux de son chanteur, Benjamin Hilleke. Et c'est fâcheux car le premier opus de cette formation méconnue en France était très bon. Or, depuis, les citoyens de Münster n'ont pas vraiment tenu les promesses que le solide "The Rising Tide Of Oblivion" laissait planer. Et après un "Ours Is The Storm" décrié, en 2013, qui dégénéra en séparation, "Neaera", l'opus de leur retour en 2020, permettait d'envisager un certain renouveau.

Si le disque a suscité une vague d'optimisme international, recueillant même de très bonnes critiques par-ci par-là, en ce qui me concerne, il génère chez moi une certaine dose de dépit, presque de mépris. Pourquoi être revenu aux affaires après une tournée d'adieux six ans plus tôt pour fournir un disque en mode pilote automatique ? Et surtout : pourquoi autant de clichés cumulés en un même disque ? Le riffing AT THE GATES aseptisé par vingt-cinq piges de Melodeath toujours plus standardisé ("Resurrection Of Wrath", "Carriers"), le chugging répétitif employé dès que les passages mélodiques s'épuisent ("Catalyst", encore "Carriers"), le chant coincé entre growl et scream, la production sans aspérité (quoique bien équilibrée)… N'en jetez plus !

NEAERA est revenu pour grossir les rangs des formations de Death Mélo dont on ne sait définitivement plus que foutre tellement elles se ressemblent. Écoutez "False Shepherds" pour le constater par vous-même. C'est dommage parce qu'il y a quand même du savoir-faire chez les Westphaliens. Leur plus grande qualité étant certainement de savoir passer d'accès de rudesse à des passages plus calmes sans perdre en efficacité. L'un des meilleurs exemples du disque étant le morceau "Sunset Of Mankind", où le groupe allemand dégaine subitement un tremolo picking quasi Black Metal que vient interrompre un break introduisant un passage mid-tempo bien plus mélodique et mémorisable.

La triplette qu'il forme avec le varié "Rid The Earth Of The Human Virus" et "Lifeless", lequel joue aussi sur la corde Black par moments, est ainsi l'un des moments les moins inintéressants de l'album. Et dans le même genre, le vigoureux "Torchbearer" sait lui aussi se faire quelque peu remarquer. Comme quoi, NEAERA sait encore retenir l'attention de l'auditeur avec un minimum d'application. Mais ces morceaux-là ne sont que des atolls dans un océan de banalité musicale assez désolante. On se fait globalement chier à l'écoute de cet album du come back qui a sans doute de quoi emballer les thuriféraires du Death Mélodique post "Slaughter Of The Soul", et même post copulation avec le Metalcore originel (celui qui ne se voulait pas encore aussi mélodique).

En ce qui me concerne - et j'apprécie à la fois le Melodeath et le Metalcore Mélodique lorsque les musiciens qui en jouent les subliment ou cherchent à sortir un peu de l'ornière dans laquelle les deux genres se sont fourrés ces quinze dernières années - NEAERA restera le groupe d'un seul album. Le premier.