"Lilith" avant d'être le nom du nouvel album des BUTCHER BABIES c'est surtout le nom de la première femme d'Adam (oui avant Ève), la rebelle qui a refusé l'autorité de son mari, celle qui avait une sexualité largement débridée, la mi-femme mi-démon qui devient reine des succubes une fois chassée du Paradis. Voilà ce que représente Lilith dans la tradition religieuse juive.
Une fois qu'on sait tout ça, ça en dit beaucoup sur la pochette et sur l'état d'esprit des deux frontwomen de ce groupe. On en sait du coup un peu plus sur leur façon d'appréhender cet album.

Alors voyons immédiatement ce que donne ce "Burn The Straw Man". Le moins qu'on puisse dire c'est que ce titre donne le ton : des gros riffs Neo / Metalcore, sur lesquels Heidi et Carla viennent pousser leurs hurlements, pour un résultat typiquement BUTCHER BABIESien mais qui envoie sec. Cependant à l'écoute de ce premier morceau on s'aperçoit que les chanteuses ont souhaité apporter un petit peu plus de profondeur à leurs compos en ajoutant une petite touche de mélodicité derrière tout ce gros son, en témoigne le riff en background sur le refrain. Dès le départ elles rappellent à ceux qui l'aurait oublié leur côté Lilith-féministe avec ce "Brûler L'Homme De Paille", cette bourrin-attitude qui leur est si chère mais sans oublier d'ajouter un peu de "finesse" (finesse à la BUTCHER BABIES hein quand même) à ce cocktail. Le titre éponyme et son mid-tempo où se greffent growls et chant sensuel ne vient que confirmer cette approche. Tout comme "Headspin" qui ralentit carrément le rythme et nous propose une ambiance plus sombre, enfin sur l'intro et les couplets surtout, parce que le refrain est juste ultra-catchy ! Ma cure de LADY GAGA (moquez-vous c'est le moment) due au documentaire paru sur Netflix, m'a fait revoir certaines de mes positions au niveau de la Pop et me permet maintenant d'être plus sensible, ou n'ayons pas peur des mots, d'apprécier le type de chant pratiqué sur ce titre.

Du coup c'est ce qui me fait également apprécier un "Look What We've Done", Poppy à souhait mais qui marche du tonnerre chez moi ! Musicalement on dirait du EVANESCENCE mais en plus burné, niveau chant par contre ça n'a rien à voir avec ce côté "petite chose fragile" qui me gonfle chez Amy Lee (ou chez d'autres hein, faut pas que y ait de jalouses !). Non ici les demoiselles chantent avec leurs tripes tout en sachant se montrer félines mais n'utilisent pas de fioritures inutiles ou de de pleurnicheries pour faire passer leur message, ce sont des Lilith après tout ! On le ressent aussi sur "Korova". Après cette intro… Spatiale, qui débouche rapidement sur un mur de son compact, on retrouve les deux growleuses mais aussi les deux panthères que j'évoquais sur "Look What We've Done". L'alternance chant clair / growls fait d'ailleurs beaucoup de bien à cet album ! Des morceaux comme "The Huntsman", avec ses claviers presque religieux et sa rythmique groovy à souhait, "Controller", dont les arrangements presque Indus et les passages plus ambiancés sur les couplets viennent contraster avec les grosses moshparts, ou encore "Oceana" et son break presque atmosphérique, sont terriblement efficaces !

On sent que ce concept de Lilith leur réussit aux demoiselles ! Ce skeud est plus inspiré et plus digeste que ses prédécesseurs. Même un titre comme "#iwokeuplikethis", qui est un concentré de rage et de growls, plus dans l'esprit des précédents albums, passe bien même si cette avalanche de hurlements s'avère fatigante à la longue… "Underground And Overrated" l'illustre d'ailleurs très bien, car en plus d'avoir oublié de dire au guitariste qu'il fallait faire groover son riff pour coller avec le travail du batteur, les deux frontwomen retombent dans leurs travers passés et terminent ce skeud sur un titre brouillon et décevant.

Mais l'apothéose du mauvais goût est atteinte juste avant, sur "POMONA (Shit Happens)" ! Putain l'horreur ! Le seul truc potentiellement sympa de ce morceau c'est ce côté SLIPKNOT, mais il a tellement été… Parodié (?) / poussé à son extrême que l'ensemble en devient terriblement nul ! Sérieusement, même SLIPKNOT n'a pas osé avoir de refrain composé uniquement de "Fuck! Fuck! Fuck! Fu-fu-fuck!" ou de "Shit! Shit! Shit! Shi-shi-shit!"… Et puis c'est terrible niveau chant, on en prend plein la gueule tout le long et c'est même pas agréable… Carla et Heidi se marchent dessus, ne laissent aucun temps mort, tandis que derrière elles ça tricote sur les cordes et ça tatane sur les fûts. Cette surcharge d'infos donne juste envie de leur envoyer de grande tartines dans la tronche pour espérer les faire taire !

Bon mis à part ces petits couacs, globalement ce "Lilith" est bien plus convaincant que "Take It Like A Man" et rassure un peu sur les capacités d'innovation des BUTCHER BABIES. Tout n'est pas parfait, loin de là, on a pu le voir sur les morceaux cités dans le paragraphe ci-dessus, mais on sent que le groupe cherche à élaborer quelque chose de cohérent au sein du groupe, à l'instar d'un IN THIS MOMENT (qui œuvre sur le même terrain) qui a su se construire une identité solide. Alors même si la prod un peu trop compacte étouffe parfois les éléments plus mélodieux qui pointent leur nez dans les compos, je salue leur effort !