La scène islandaise est tellement consanguine que les super-groupes vont devenir une norme. Nouveau rejeton bâtard: MARTRÖÐ, élevé par des membres de BLUT AUS NORD, MISÞYRMING, SKAPHE, LEVIATHAN ou encore AOSOTH. De quoi faire vrombir une nouvelle fois le Black Metal par le souffle acide qui s'échappe de la gueule de la Bête du Nord.

La Bête du Nord c'est le Icelandic Black Metal dont je vous rabâche les oreilles depuis un moment, et qui m’apparaît être essentiel ces dernières années, faisant éclore les œufs de créatures bien décidées à conquérir le trône du genre. MARTRÖÐ, lui, est clairement le germe le plus démoniaque. Il est le fruit de l'accouplement satanique entre des monstres de différents continents, et de fait, parler d'Icelandic Black Metal devient compliqué, il faudrait plutôt parler d'une collaboration Illuminati. Si la scène est une couveuse géante, MARTRÖÐ est le fœtus sur lequel la lumière ne pleut pas. Il baigne dans un jus verdâtre, sous sa coquille assaillie par les ténèbres. Ses frères et sœurs entrevoient de temps à autres un éclat du soleil froid qui transperce la surface, mais lui vit avec le noir comme la lune avec la nuit.

On parle bien d'un Black Metal obscur, fuligineux au possible, avec le riff coupe-gorge qui envoie dans l'abîme, les râles qui soudoient avec rage le bourreau, les cris qui s'extirpent du brouillard comme une menace inconnue, la batterie qui cadence la galère avec le fouet comme compagnon de voyage. MARTRÖÐ est un cavalier de l'angoisse, et rappelle aussi bien SINMARA que DEATHSPELL OMEGA ou BLUT AUS NORD pour ce qui est des chœurs infernaux qui font dériver l'écoute comme une lame de fond le navire perdu dans la tempête. Les dissonances participent au jeu de massacre, en témoigne "Draumleysa" et son introduction pluie de spectres sur un rêve trop docile. Il y a du cauchemar dans le son de MARTRÖÐ, aussi bien qu'une science précise du riff, qui permet de capter constamment l'auditeur sans le perdre dans les miasmes d'un lac sans fond, au contraire du "MoRT" de BLUT AUS NORD.

Un mélange pourtant subtil s'opère entre "Draumleiðsla" la chaotique et "Draumleysa", longue marche d'un culte dévoué à une divinité ancienne et nimbée de mystères. La partie centrale, magnifique, témoigne d'une capacité à articuler violence et calme, sans pour autant sacrifier l'horreur sur l'autel de la paix. MARTRÖÐ reste un pourvoyeur de hantises, une lumière blafarde, spectrale, que l'on suit sur un sentier tordu en croyant naïvement qu'elle nous guidera vers une paix éternelle.

C'est court bien sûr, comme le dernier split de MISÞYRMING et SINMARA, mais cela permet d'entrevoir un futur grand de la scène. "Transmutation Of Wounds", en bon chien de l'Enfer, saura je l'espère être votre meilleur ami le temps d'une descente en sa compagnie, dans les limbes de vos nuits les plus agitées.