Il était évident qu'avec un nom comme ça, BHAVACHAKRA, ce combo proviendrait… des États-Unis ! Eh oui, l'Oncle Sam a montré depuis longtemps qu'il est non seulement une terre d'accueil pour des musiciens de partout, mais un fieffé copieur, lui qui a de la difficulté à créer au même niveau que des nations comme le Royaume-Uni côté musique. En Metal Extrême par contre, il a une longueur d'avance, surtout en Black, avec des groupes extrêmement novateurs qui proviennent de partout, notamment de l'ouest (Oregon, Colorado) et de la Grosse Pomme. Je ne mentionnerai pas la Floride, ne m'en voulez pas… Ah, mais tiens, BHAVACHAKRA (le cercle vital, en tibétain) vient justement de là, de Disneyland même ! Tu parles…

Si le quatuor vient d'Orlando, deux choses sont claires : son Black n'est pas ensoleillé et on est loin d'une embrassade avec Mickey Mouse. Le Black Prog et technique de BHAVACHAKRA est plutôt très obscur, pas trop violent, très personnel et réalisé avec les moyens du bord. Cela ne veut évidemment pas dire que la facture sonore soit mauvaise, au contraire, elle est un caméléon qui s'adapte bien à l'environnement quasi stérile créé par les Américains.

Ce premier album bourdonne comme l'archétype d'un opus initial, bien que le côté progressif de l'ensemble et les instrumentales (dont l'excellent "Prelude") détonne un brin. On est loin de ce que KRALLICE arrive à pondre dans son gros erlenmeyer ; disons que BHAVACHAKRA est un élève doué qui parvient à faire bouillonner ses fioles avec du matériel assez corrosif pour attirer l'attention de la communauté scientifique. La qualité de ses grattes de feu met la table assez solidement.

Ce qui risque de particulariser BHAVACHAKRA dans un futur assez rapproché sont ces touches de guitare sèche, souvent au début des morceaux, et ce superbe piano dans les interludes. Cette touche plus classique et aride confère à ce Black au caractère singulier et en fusion constante un visage moins détraqué. D'ailleurs, les influences du groupe sont très larges (de LITURGY en passant par EMPEROR) et expliquent ces étonnants premiers balbutiements. Tout ce que j'espère, c'est que les zicos ne se contenteront pas de réinventer à leur façon ce sous-genre, mais contribueront sérieusement à ébranler l'édifice en lui donnant une petite couleur accessible, tout en poursuivant leurs monstrueux essais. Le potentiel est là et la preuve est que la formation a eu la chance de jouer avec CARACH ANGREN et KATAKLYSM.

Tout sur ce cru éponyme hurle à la créativité, à la recherche de liberté et au repoussage de frontières. Écoutez "Kali Yuga" et "Sybaritic Apparitions" et vous comprendrez ! "Bhavachakra" est l'album-type sur lequel l'émulsion est forte mais s'effondre rapidement en raison de la qualité du bol. Le temps permettra aux jeunots d'améliorer leur batterie de cuisine pour que leurs expérimentations se fraient un chemin sur le menu du Black Prog américain. À 51 minutes, "Bhavachakra" est un peu trop longuet à mon goût pour rameuter les troupes comme le tremplin impur de KRALLICE l'avait fait.

Or, nous sommes quand même en présence d'un sacré skeud, mes chers amis, et vous seriez bêtes de ne pas vous y aventurer si le Black moderne aux mille directions vous botte.

Note : 3,5/5.

Podium : (or) "Kali Yuga", (argent) "Untitled", (bronze) "Sri Yantra".