Les chroniques mènent à tout (et à n'importe quoi des fois). Connaissez-vous l'état libre d'Åland ? Jusqu'à ma découverte et ma recherche d'infos sur GRÖNHOLM, nouveau venu sur la scène Prog européenne et l'un des rares représentants finlandais du genre, je ne le savais pas. Cet état libre, affilié à la Finlande, dispose de ses propres lois et institutions tant qu'elles respectent les lois de l'UE. Ce petit archipel de vingt-quatre îles est le repère de Lion Music, label spécialisé dans le Néo-classique et le Prog, qui dit, sur son propre site, repousser les frontières du Progressif.

Mika Grönholm a mon âge… Et en 2009 il décide de monter son propre projet avec deux connaissances rencontrées sur le web, dont Markku Kuikka qui habitera les textes de Mika le temps de deux albums. Le résultat c'est "Eyewitness Of Life", fruit du travail à distance des trois protagonistes qui ont chacun leur home studio. Pur produit du monde d'aujourd'hui, GRÖNHOLM aime le Progressif pour sa part de surprise et de renouvellement permanent. En effet, si les dix titres de ce premier opus tournent autour des cinq minutes, il y a de l'info à se mettre sous la dent. Sans savoir s'il s'agit d'une de leurs influences, FAITH NO MORE s'invite régulièrement dans la musique du combo. D'abord par le biais de l'interprétation de Markku Kuikka, qui pourra rappeler Mike Patton. Mais surtout la musique rappelle régulièrement l'époque la plus Metal du combo ("The Real Thing"). On retrouve une basse rondouillarde que la guitare ne vient pas écraser, et des claviers qui n'en font jamais des tonnes mais qui font le boulot de fort belle façon.

Comme toutes les premières œuvres, "Eyewitness Of Life" n'est pas exempt de défauts. On retrouve un sens mélodique pas toujours au summum, avec pour conséquence des passages à vides ("You And Me", "Eyewitness Of Life") et surtout une structuration des morceaux et des enchaînements qui manquent parfois de finition, c'est par exemple le cas de l'incongrue transition sur le final de la pièce-titre, où Mika Grönholm avait visiblement décidé avant tout de s'éclater avec sa guitare acoustique. Mais parlons justement des guitares, car avec le chant, c'est l'un des gros points forts de GRÖNHOLM. Je veux particulièrement mettre en exergue les soli mélodiques posés que nous délivre Mika avec feeling et délicatesse. On retrouve d'ailleurs la même finesse au clavier, où son jeu pourra rappeler celui de Kevin Moore (CHROMA KEY, OSI, ex-DREAM THEATER), l'instrumental "Meet The Maker" aurait sans peine trouvé sa place sur "Falling Into Infinity" d'ailleurs.

En outre, "Eyewitness Of Life" souffre un peu de son homogénéité. Les tempi mesurés adoptés sur la totalité de l'opus laissent de l'espace à la finesse et à l'expression, mais ont tendance à rendre l'écoute exigeante car on a vite fait de dodeliner de la tête et de se déconcentrer. Mais quand ce sont des titres de la trempe de "Fate & Belief", "Meet The Maker" ou "Misfortune-Teller" (qui aurait quand même mérité plus de travail sur l'ambiance, tant j'ai l'impression d'une ambiance route 66 curieusement transposée dans le grand Nord), ça ne pose pas de problème.

Mika Grönholm a du vocabulaire et de l'expressivité à revendre et ses influences qui dépassent le cadre Metal sont clairement un atout. Il lui faudra cependant s'affirmer davantage pour mieux digérer ses modèles et proposer une musique plus accrocheuse sans lui sacrifier son atmosphère.