Brian May, le légendaire guitariste de QUEEN est un mec torturé et a alterné toute sa vie périodes de calme et de dépression. Alors que sa vie sentimentale part en lambeaux et que son mariage capote, il s’enfonce dans une profonde dépression qu’Anita Dobson viendra guérir. Mais les êtres humains, s’ils ont toujours beaucoup affecté le ténébreux six-cordiste, n’ont jamais suffi à étancher son spleen et l’idée de composer sa propre musique a germé dès 1983 avec le STAR FLEET PROJECT. Brian ira chercher son inspiration auprès des plus grands, Eddie Van Halen et Jeff Beck en tête. Un mec qui maîtrise autant le son et qui a même conçu sa propre guitare afin de générer du feedback ne pouvait que rechercher la compagnie d’un géant comme Jeff Beck. Au fur et à mesure de ses pérégrinations il va aussi croiser le chemin du non moins légendaire Cozy Powell, au CV long comme le bras, qui deviendra un ami proche.

Oui mais voilà, Brian May c’est avant tout le guitariste de QUEEN, et nombreuses seront les occasions de repousser ce fameux opus solo, la Reine s’octroyant les compos exceptionnelles telles que "I Want It All", Brian ayant toujours, très pragmatiquement, préféré laisser les compositions prendre vie à bord du véhicule le plus performant. Encouragé par ses collègues, c’est néanmoins la tragique disparition de Freddie Mercury qui va transformer ce "Back To The Light" en véritable exutoire.

On ressent toute la fureur Hard de Brian sur cet opus, créé dans le Hard Rock le plus pur. Point de Les Paul ou de Stratocaster pour déchirer nos tympans : la Red Special du grand frisé aura tôt fait de transformer des chansons Pop en véritables déluges sonores par strates. On retrouve les éléments que Brian a apporté afin de façonner le son QUEEN : les harmonies enchevêtrées, sinistres sur "The Dark", un riffing virulent, n’hésitant pas à utiliser le sous-accordage ("Love Token"), de l’habillage dont lui seul à le secret ("Back To The Light") et des soli mémorables.

Mais en solo, Brian sacrifie très souvent la majesté pour la sauvagerie à l’image de ce monumental "Resurrection" où Cozy Powell brille de mille feux toute double grosse caisse dehors au milieu des explosions du père Brian qui délivre même un monstrueux solo en tapping qui ferait rougir Eddie van Halen lui-même. S’il n’est pas un utilisateur régulier de cette technique, il sait en faire quelque chose d’incroyable : Brian May est un magicien, aucun doute là-dessus.

Et quid du Brian chanteur ? On la connaît cette voix, doucereuse et timide, qu’on a pu écouter entre autres sur "‘39" de QUEEN. Mais Brian frontman ça donne quoi ? À l’image du personnage, la performance vocale de Brian frôle les extrêmes ; douce et sensible ("Too Much Love Will Kill You", "Back To The Light"), presque peureuse ("The Dark") ou alors arrachée à la limite de la rupture ("Resurrection", "Driven By You"). Au final, s’il est loin d’égaler un Freddie Mercury, il est un interprète plein de feeling, à l’image d’un Gary Moore par exemple.

"Back To The Light", de par sa production, son époque et son compositeur, sonne encore un peu QUEEN, à l’image de "Back To The Light" ou "Let Your Heart Rule Your Head", et des arrangements de clavier régulièrement présents même si le mix donne un espace de choix à la Red Special. Et en fait ce premier album solo est l’album de la Red Special, où l’on écoute compilées toutes ses possibilités, entre autres sur le simple instrumental "Last Horizon". En outre, si la qualité est au rendez-vous, on notera qu’une petite moitié est assez oubliable, surtout quand on côtoie le bon ("Last Horizon", "Love Token", "Let Your Heart Rule Your Head", et le très bon (les six premiers titres). Mais essayez un instant d’imaginer cet album avec un "I Want It All" ou un "I Can’t Live With You" dessus pendant que les clochettes et la voix de Brian referment l’album comme il a commencé…