C'est un peu le "Pink Moon" du Grunge ce troisième ALICE IN CHAINS. Il est évoqué avec beaucoup de pudeur encore aujourd'hui, car le groupe y est entièrement à nu, dur, vulnérable, luttant avec ses démons à cœur ouvert. Des premières notes abrasives, indiscutablement Metal, de "Grind" au final dépité de "Over Now" (on ne fait pas pire dans l'apaisement hypocrite de fin de disque, derrière le vernis acoustique la pourriture mentale est évidente, on attend calmement la fin de l'agonie, parce qu'il y a des dettes à payer...), on traverse un champ de ruines complet, addictions, cœurs brisés, troubles identitaires, délires mystiques, éloge du vide comme seule solution au mal-être corporel et psychologique... Une œuvre d'art totale, écrite pour la catharsis de ses auteurs, détournant les canons du Rock (couplet-refrain-solo, accroches mélodiques) pour mieux infiltrer dans les oreilles de son public les poisons dont il doit se détourner. Le disque est d'autant plus puissant aujourd'hui que c'est un effort collectif, là où "Pink Moon", ou même "In Utero", est un dernier cri individuel. Déchirante impuissance ressentie à plusieurs, insurmontable, et d'autant plus tragique... Et malgré l'intensité évidente de cette douleur étalée à la vue de tous, c'est beau, et on y revient...