La sortie de leur dernier album est une bonne occasion pour se refaire la discographie, et essayer de saisir un peu le parcours de ce groupe si singulier et envoûtant.
Et justement, "Opportunistic Thieves Of Spring" est la pièce maîtresse du tableau. Pas forcément la plus belle, mais celle qui permet de tout comprendre. Au fond, cet album fait le lien entre le Black Metal lancinant du début, presque psyché, et la sophistication caractéristique de la suite de leur carrière. Un parfait intermédiaire, donc, qui assure la transition entre "The Corpse of Rebirth" et "A Shadowplay for Yesterdays" en toute fluidité.
Au rayon des trucs cool, on retrouve les vocaux hallucinés qui avaient fait la réussite de "The Corpse of Rebirth". Le chant n'a pas encore cette composante théâtrale qui deviendra la marque de fabrique du groupe dans les années suivantes. Un énorme atout, qui donne toute sa profondeur à la musique d'A FOREST OF STARS, son ambiance à la fois brumeuse et tranchante. Les morceaux se veulent atmosphériques, s'étirent en longueur sans jamais lasser. Les sonorités sont d'une richesse rarement atteinte dans le style : les guitares acérées typiques du premier album côtoient des synthés oniriques inimitables (la fin de "Summertide Approach", superbe), une voix féminine mystérieuse ("Starfire's Memory"), des violons inquiétants ("Raven's Eye View"). Le tout finement mixé et orchestré, avec juste ce qu'il faut de bavure pour que l'auditeur se retrouve instantanément plongé dans une épaisse forêt victorienne aux sentiers sinueux. Écoutez juste les premières minutes de "Sorrow's Impetus", ce son fuzzy, cette batterie simple mais terriblement groovy, la voix hallucinée qui arrive par dessus, tout y est.
Une réussite, indéniablement. Je regrette seulement quelques longueurs sur le milieu du disque, avec deux morceaux construits bizarrement (Thunder's Cannonade" et "Starfire's Memory"), qui multiplient les brusques changements d'ambiance sans parvenir toujours à trouver leur cohérence. Accrochez-vous quand même, parce qu'il serait bien dommage de passer à côté du dernier morceau, "Delay's Progression", qui vaut vraiment le coup.
Bref, A FOREST OF STARS est toujours aussi attachant, aussi unique, mais commence à pêcher par excès de sophistication. Ce n'était pas le cas sur "A Corpse of Rebirth", ça le sera encore davantage sur les suivants. Un album de transition, je vous dis. Mais surtout un putain de bon album.
