SCORPIONS semble sorti de sa chrysalide avec le fabuleux "In Trance" et dès l'année suivante il lui faut enfoncer le clou. Suivant une logique qui vise à attirer toujours plus l'attention sur lui, une pochette d'album, une photo va venir faire la légende de cet album, plus que sa musique d'ailleurs. À l'ère de #Metoo et des reportages à charge sur Michael Jackson, on peut opposer le puritanisme américain qui censurera cette pochette, comme dans plusieurs pays (excepté la France). Il y aura toujours ceux qui préféreront voir les jeunes gueules de con des Scorps sur la pochette censurée, que cette illustration pour le moins graphiquement réussie et en connexion avec des textes tout sauf dégueulasses.

Après ce deuxième coup de comm' réussi, que propose SCORPIONS sur son quatrième album ? Une suite logique de son prédécesseur sans aucun doute. On y retrouve le même équilibre éprouvé en '75, avec des brûlots hyper Hard ("Catch Your Train", "Virgin Killer"), des mélodies, tant de guitare que vocales enchanteresses ("Pictured Life" sans aucun doute l'un de mes cinq titres préférés de SCORPIONS toutes époques confondues), et des mid-tempi plus sentis, presque atmosphériques ("In Your Park"). Le jeu d'Uli Roth semble encore plus éclairé et ciselé et l'équilibre entre son jeu et celui de Rudolf Schenker fait encore ses preuves sur "Backstage Queen" au riff ZEPPELIN-ien et surtout sur "Crying Days".

Pour autant j'ai toujours eu un peu de mal à rentrer totalement dans "Virgin Killer". Peut-être parce qu'il s'avère dans l'ensemble moins étincelant que son prédécesseur ? C'est en tout cas ce que je pense, et il en aurait été tout autre si on avait eu une succession de titres aussi accrocheurs que la doublette "Pictured Life"/"Catch Your Train" qui ouvre l'album en trombe. Les "Helcat", "Virgin Killer" ou "Backstage Queen" malgré leur violence (particulièrement vocale, Klaus s'arrachant les cordes vocales sur la pièce-titre) ne font pas le poids face à un "Dark Lady" par exemple.

Et tant que j'y suis, la performance vocale d'Uli sur "Polar Nights" n'est absolument pas à la hauteur de ce qu'il propose Stratocaster en main… Le chef d'œuvre "The Sails Of Charon" n'est plus très loin maintenant. Et par ailleurs, si la musique composée par les deux guitaristes arrive encore à faire de sa disparité une force, les compositions d'Uli sont toutes reléguées en face B de l'album, donnant parfois l'impression de ne pas écouter le même album selon le côté qu'on joue sur la platine, qui se termine par un "Yellow Raven" qui préfigure déjà "Born To Touch Your Feelings".

"Virgin Killer" rencontrera un succès fulgurant au Japon, qui va véritablement servir de rampe de lancement pour nos quatre Allemands et notre Belge, avant qu'Herman Rarebell ne débarque avec ses gros sabots. Déséquilibré mais habité par une énergie incroyable, "Virgin Killer" est la face noire d'une doublette d'albums sur laquelle le talent hors-normes de SCORPIONS apparaît comme un diamant brut, et étrangement, "In Trance" s'en sortait mieux, et ce sans forcément beaucoup plus d'inspiration.